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André Manoukian : de la Nouvelle Star à John Lennon

Tony Cotte
Publié le 06/12/2010 à 14:07 Mis à jour le 27/05/2022 à 00:42

Après huit ans de Nouvelle Star, M6 a décidé de tourner la page. Le jury a donc été contraint d’en faire de même. Cette nouvelle liberté a entrainé André Manoukian à New York à l’occasion d’une soirée spéciale consacrée à John Lennon. Ainsi, trois documentaires seront proposés au cours de cette soirée diffusée sur Toute l’histoire, une chaine du groupe AB, afin de percer le mystère Lennon. André Manoukian nous en dit plus...

Tony Cotte : Mardi 7 décembre, on vous retrouve aux commandes de la soirée John Lennon : Histoire d’une légende sur Toute l’Histoire. Au-delà d’un tournage à New York, pourquoi avoir accepté cette proposition ?

André Manoukian : Dans le cadre de l’émission Tété ou Dédé sur France 5, j’ai pu visiter New York et notamment le Dakota Building. Nous avons été juste à côté, sur le mémorial du Strawberry Fields et j’en garde de très bons souvenirs. Alors, quand on m’a demandé de retourner sur le « lieu du crime », j’ai accepté avec joie et honneur. L’équipe de tournage avait en plus très bien préparé l’émission et j’ai pu rencontrer Bob Gruen (photographe attitré et ami de John Lennon, ndlr). Je n’avais vraiment aucune raison de refuser ce cadeau.

Les chansons de Lennon ont-elles jonché des périodes importantes de votre vie ?

Je n’ai jamais été très Beatles musicalement, mais j’ai beaucoup de respect pour cet artiste. Tout le monde sait que je viens du jazz, mais quand j’étais môme, ses titres m’ont un peu bercé. Je suis pianiste à la base et le jour où je me suis mis à la guitare, mes premiers accords étaient ceux des Beatles. C’est à ce moment-là que l’on prend conscience d’une sophistication harmonique dans leur travail. Ils ont réussi à faire la quadrature du cercle de la chanson pop : une création avec du fond tout étant accessible au plus grand nombre. En somme, le rêve de tous les compositeurs.

La soirée spéciale John Lennon commence avec le making of de l’album Imagine. Que vous inspire ce disque ?

Il est splendide, surtout avec Phil Spector aux manettes. Il est l’inventeur du « Wall of Sound » (effet musical baptisé le « mur de son » en français, ndlr). C’est quelque part un album de standards. Quand on voit John Lennon au piano qui montre pour la première fois les accords d’Imagine en le présentant comme « une petite ballade », c’est hyper émouvant. Il ne sait pas à ce moment-là qu’il a créé un hymne planétaire. Avec ce disque, il a également composé sa propre légende et, en parallèle, l’a mis en scène avec le fameux Bed in, dont un documentaire sur le sujet sera diffusé au cours de la soirée.

Dans cet album, John Lennon règle également ses comptes avec Paul McCartney, à travers le titre How do you sleep. En tant que mélomane, pouvez-vous nous expliquer le rapport entre ces deux artistes ?

On dit que McCartney était plus mélodiste, plus féminin. Lennon, lui, était réputé comme étant davantage « brut ». Curieusement, chacun enviait chez l’autre cette fonction. Au lieu de camper dans leur position, ils se sont rapprochés. C’était une fusion totale entre eux deux : ils formaient en quelque sorte le plus grand compositeur du 20e siècle. Au cours de mon tournage, Bob Gruen m’a raconté une anecdote : lors du dernier Noël de Lennon, on a frappé à la porte du Dakota. Par peur, puisque le concierge n’avait pas filtré la visite, il a envoyé Bob ouvrir. À ce moment-là, ils ont pu entendre derrière la porte un Wish you a merry Christmas chanté par des enfants. Mais une fois la porte ouverte, ils ont découvert Paul et Linda McCartney venus à l’improviste. Ça a été un peu leurs retrouvailles. Ils ont bu un coup et ont eu, ce soir-là, des rapports amicaux. C’est plaisant d’entendre qu’ils se respectaient malgré toute la pression.


Que doit retenir la nouvelle génération de John Lennon : une icône pour ses engagements pacifistes ou un enfant terrible du rock ?

C’était un mec qui voulait faire réfléchir à l’époque et faire avancer les choses. Il a marqué les années 60 en groupe et la décennie suivante en solo. Avant tout, il faut lui reconnaître la qualité de mélodiste, mais en plus d’avoir été un musicien exceptionnel, il pose un problème philosophique majeur : celui du bouc-émissaire. C’est curieux comme les gens qui prônent la paix peuvent déclencher la violence chez les autres...

Pensez-vous aujourd’hui qu’un artiste peut avoir les mêmes engagements, sans être accusé de démagogie ?

Aujourd’hui ça n’aurait pas de sens de faire ce qu’il a fait. Même s’il y a toujours la guerre dans le monde, le combat est ailleurs. À l’époque, la musique était un vecteur de contestation très fort. Elle est devenue un objet de consommation aujourd’hui. Ça n’a plus vraiment de sens, même si certains n’ont pas renoncé à l’engagement d’une autre manière. Je pense à un Bono, discret dans les médias et qui fait énormément pour les pays du Tiers Monde.

La consommation de drogues est un fait marquant dans la carrière de John Lennon. On dit que les substances psychotropes ont eu une influence notable sur sa créativité...

C’est de cette manière que Yoko Ono a été importante pour lui. Elle a été ce qui l’a retenu. Elle a eu un poids moral et intellectuel important dans sa vie et l’a empêché de faire des conneries. Mais ce n’est pas propre à Lennon. À la fin des années 60, de nouvelles drogues ont fait leur apparition. Ça a éclaté pas mal d’artistes pendant quelques mois. Certes, le mouvement psychédélique a donné Led Zeppelin ou encore les Doors, on même appelé ça la « drogue culture ». Tout le mouvement rock en a été imbibé. Mais ça ne dure qu’un temps, même pour rire. Une fois que la drogue a fait ses ravages, tous ont, à leur manière, crié à l’aide. Beaucoup ont laissé leur peau, d’autres ont cherché d’autres manières d’arriver à ce genre d’extases.

Qu’en est-il d’André Manoukian ?

(rires) Je n’ai pas besoin de drogues pour m’envoyer en l’air. Il faut savoir se mettre dans des états d’éveil sans psychotropes. J’ai juste besoin d’un peu d’inspiration, d’une jolie voix, d’un paysage ou d’un discours. Le plus dur est de redescendre...


Le petit écran semble jalonner de plus en plus votre parcours. Comptez-vous privilégier une carrière d’animateur ?

Je ne suis pas du tout animateur. Je suis musicien et c’est sous cette casquette-là que l’on me demande d’intervenir ou que j’interviewe des artistes. Les incursions dans des téléfilms, ça c’est autre chose : c’est une discipline qui m’amuse simplement. Je vais partir en janvier en Afrique du sud avec Tété pour France 5, mais là encore, je n’y vais pas en tant qu’animateur. C’est un autre métier qui demande un talent que je n’ai pas. Je m’en rends compte : pour lancer un plateau, il faut une certaine pêche et une expérience. J’ai du respect pour les gens qui font ça bien.

Un mot sur la fin de Nouvelle Star : avez-vous vraiment appris la nouvelle par un simple SMS comme le veut la rumeur ?

En effet. Et c’est un peu triste bien sûr, mais ça ne m’a pas touché plus que ça. Après tout, un SMS c’est plus sympa que de l’apprendre par la presse (rires).

Que souhaitez-vous que l’on retienne de cette émission après toutes ces années ?

Personnellement, je garde un souvenir formidable de la première et la dernière saison. On a commencé cette émission d’une façon un peu chaotique, mais musicalement c’était fort. On a réussi à plaire au grand public et aux plus difficiles. Après, quand je vois Luce, et le plaisir que l’on a pris jusqu’au bout avec mes petits camarades, je ne peux pas comprendre ceux qui disent que la dernière saison était celle de trop. C’est dommage que M6 ait foutu une programmation face à Dr House, mais ce n’est pas grave. On est le pays, avec les États-Unis, où le programme a duré le plus longtemps. Ailleurs, ils ont remplacé ça par X-Factor...

Auriez-vous accepté de faire partie du jury de X-Factor si on vous l’avait proposé ?

Ma réponse aurait été en fonction du choix des autres jurés. Et puis je sais que les règles ne sont pas les mêmes, ils sont plus impliqués. Pour ma part, je ne sais pas si j’aurais pu le faire. Si on m’avait demandé de coacher des candidats, je les aurais détournés vers d’autres chemins artistiques. Ça n’aurait pas été évident pour la production (rires). En fin de compte, ils ont bien fait de prendre ce jury pour X-Factor.