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André Manoukian : « Nouvelle Star sans moi, ça n’existe pas ! »

Marion Olité
Publié le 18/12/2014 à 19:15 Mis à jour le 26/01/2015 à 22:56

C’est le doyen de la bande, le seul à avoir traversé les aléas des changements de jury, de présentateurs et de chaîne au sein de Nouvelle Star. Il en représente aujourd’hui la quintessence. Toujours aussi philosophe, André Manoukian est revenu pour Toutelatele sur cette dernière saison, marquée par l’arrivée de Elodie Frégé et Yarol Poupaud.

Marion Olité : Vous entamez la saison 11 de Nouvelle Star. Avez-vous toujours le même enthousiasme ?

André Manoukian : Oui, ça fait douze années en fait. Et 12, c’est vachement bien comme chiffre. Le 1 se sépare en 2 éléments qui engendrent le 3. C’est le chiffre du « créé ». On va dans une année de création formidable !

Êtes-vous satisfait du niveau par rapport à l’année précédente ?

Je n’ai pas été du tout déçu des candidats de l’année dernière. Mathieu est génial. Il a déjà envoyé bouler trois directeurs artistiques. Il veut faire son album avec ses compos. Je pense que pour sortir un album, c’est mieux de prendre son temps. Sophie Tith s’est retrouvée prise dans une contradiction. Soit on leur sort un album de reprises le lendemain de leur victoire, soit on prend le temps. Il n’y a pas de miracles : il faut au moins un an de travail pour sortir une création originale.

La victoire de Mathieu vous semblait-elle justifiée ? Sinclair nous a confié récemment que pour lui, Yseult était la gagnante, et que de toute façon, il était rarement satisfait des gagnants de Nouvelle Star.

Ce n’est pas mon cas. Mathieu est mon farfadet. Son côté folk était super génial. Je n’ai jamais vraiment été déçu par les gagnants. Même les candidats qui ne vont pas au bout sont des musiciens formidables. Ce n’est pas parce que vous ne répondez pas à toutes les cases que vous n’avez pas d’intérêt, au contraire. Le paradoxe de Nouvelle Star, c’est qu’il faut être à la fois stylé et pouvoir chanter des trucs complètement différents. Cette année, je sens une volonté de la prod de revenir à des fondamentaux musicaux, de se mettre plus au service du style des candidats. Ce n’était pas le cas avant, où c’était le show télé avant tout. Si le candidat s’écroulait parce qu’il chantait du Dalida et que c’était un chanteur de soul, c’était tant pis.

Entre la première saison et cette saison 11, avez-vous ressenti une grande évolution dans le niveau des candidats ?

Le niveau des gamins et leur éducation musicale ont énormément évolué, en bien. Dans l’histoire de l’humanité, les gamins n’ont jamais écouté autant de musique. Ceux qui arrivent maintenant sont nés avec internet. Avant, un gamin qui écoutait du rap était scotché à Puff Daddy. Maintenant, il remonte jusqu’à Otis Redding, et plus loin encore. C’est aussi la première saison en 12 ans que je vois des gosses arriver et chanter du Brassens. C’est à tomber. Il y a une abolition du temps. La modernité, ça ne veut plus rien dire aujourd’hui. Ils remontent jusqu’aux années 30. Ils peuvent faire leur tambouille en chopant un riff chinois mélangé à un truc indien... C’est très surprenant.

N’êtes-vous pas frappé de nostalgie en repensant à vos anciens camarades de jeu sur Nouvelle Star ?

C’est la fonction qui crée l’organe. Les réactions sont toujours imprévisibles, drôles... Sur cette saison, on est beaucoup plus complices, car on est quatre musiciens. Ça n’empêche pas de vrais débats. Élodie est très sur la nostalgie, la retenue. Un chanteur trop frontal, qui envoie, ça va la saouler. Ce n’est pas mon cas, donc on peut se prendre de chouettes prises de bec (rires). C’est pareil avec Mathieu, qui a horreur de tout ce qui est un peu « old school ». Mais le old school, c’est moderne ! On a toujours de la confrontation, des débats, et en même temps on se marre. Quand on s’est retrouvé en studio pour la première fois, on s’est bien fendu la gueule. Je ne suis pas nostalgique de ces années avec Dove ou Marianne. Tout a tellement changé, et dans le bon sens. Aujourd’hui, neuf candidats sur dix sont musiciens. La chaîne décide qu’on va aller dans un sens plus musical que storytelling. Je suis ravi.

« C’est la première fois qu’on se marre autant dans le jury »

Comment se déroule la collaboration avec ce nouveau jury ?

C’est la première fois qu’on se marre autant et qu’on est vraiment sur la même longueur d’onde. Dans ce genre d’émission, d’habitude, c’est un peu chacun pour sa gueule. On est à la fois dans le même bain et indépendants les uns des autres. En fin de journée, on est tellement crevé qu’on a une seule envie : se retrouver seul. Avec ces quatre-là, c’est la première fois qu’on va boire des coups ensemble, qu’on pense à faire des trucs ensemble. Je parle de Yarol et Élodie, mais aussi de Sinclair. À l’époque de Manoeuvre, il était plus sur la réserve. Là, on a l’impression qu’il y a eu un cap de franchi.

Qu’avez-vous ressenti à l’annonce du retour de Benjamin Castaldi ?

L’impression d’avoir fait une boucle ! Vous savez, Bouddha dit : « Quand tu es un petit hamster dans ta cage, ça ne sert à rien de courir, car la roue tourne ». L’idée est de rester au même endroit. Ça s’appelle les cycles. Bref, j’étais ravi, car comme tout le monde le sait, Benjamin est un grand bouddhiste (rires). Blague à part, j’aime son regard à la fois bienveillant et ironique. À l’époque, il servait beaucoup d’interface entre le jury et le public. On râlait contre le public et ses goûts de chiotte. Rappelez-vous Marianne et sa phrase « Français, vous avez de la merde dans les oreilles ». Hanouna était plus rond dans sa présentation. Il avait peut-être moins de plaisir à le faire.

Que pensez-vous de cette nouvelle « épreuve du feu » ajoutée cette saison ?

On aurait du la faire bien avant. Le candidat va se retrouver avec des projecteurs dans la gueule, des zikos qui jouent à 200 à l’heure et une vraie salle. Avant, c’était le premier prime, et il y a eu des moments où se disaient « oups » ! Ça va nous permettre d’avoir un niveau plus élevé.

N’avez-vous jamais eu envie de raccrocher de Nouvelle star ?

Non ! Ce qui est fatiguant quand on fait ce métier, c’est de devoir faire autre chose que de la musique. J’ai expérimenté ça. Je me suis retrouvé chroniqueur chez Marc-Olivier Fogiel. Je m’embarquais dans des trucs super compliqués avec Marco, qui faisait semblant de rire alors qu’il ne comprenait rien (rires). C’était affreux ! Une fois, je suis sorti de là avec limite une colique néphrétique. Dans Nouvelle Star, on reste des zikos, filmés à la télé. Et on nous a toujours laissés en roue libre, ce qui est super rare dans ce milieu télévisé. De toute façon, Nouvelle Star sans moi, ça ne peut pas exister (rires) !