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Axel Kiener (voix de MacGyver / Prison Break) : « J’aimerais que MacGyver soit plus dans le conflit et qu’il s’en sorte un peu moins facilement »

Joshua Daguenet
Par
Rédacteur TV & Séries
Publié le 09/02/2018 à 18:39

Axel Kiener est actuellement la voix française de MacGyver, dont les nouvelles aventures sont proposées par M6. Familier des fans de Prison Break pour être la doublure de Michael Scofield, le comédien s’est livré sur le doublage, et la préparation nécessaire afin d’offrir la meilleure performance possible. Aussi, il a dévoilé le personnage qui avait le plus marqué sa carrière...

Joshua Daguenet : Comment se déroulent les castings pour les acteurs spécialisés dans le doublage ?

Alex Kiener : Les directeurs de casting proposent eux-mêmes des acteurs car je ne fais pas que du doublage, je tourne dans des films, des pubs et je fais du théâtre. On fait ensuite des essais et, au final, les chaînes de télévision choisissent les comédiens. Même si on a doublé un acteur à plusieurs reprises, il se peut qu’on ait de nouveau à repasser les castings si les studios sont différents… Pour les séries télé, il y a tout de même une affiliation et les chaînes essayent de suivre.

Peu de personnes connaissent votre nom et votre visage. Est-ce important de concentrer votre notoriété sur la voix ?

Effectivement, actuellement je tourne pour une série et les gens qui y travaillent trouvaient ma voix familière. C’est une situation assez cocasse. Mais on m’interpelle également par rapport à mon visage, je dirais que c’est équivalent.

Quel impact la performance du doublage a-t-elle sur la réussite d’une série dans un pays ?

Un mauvais doublage peut faire foirer une série donc la qualité est très importante. Beaucoup de gens en France regardent désormais la VO [version originale] et surtout sur Paris. Dans la capitale, il ne reste que très peu de salles de cinéma où on peut regarder en VF [version française]. En province, elle est plus présente.

Un bon doublage peut-il apporter une plus-value à une série ?

Oui, je pense. Sur la série Friends, le public a été très attaché aux voix françaises et le choix du casting a été excellent. Aujourd’hui, c’est un peu différent, je ne m’aventurerais pas à avancer qui de la VF ou de la VO est la plus appréciée. Par exemple, si vous êtes un peu fatigué et que vous n’avez pas envie de vous concentrer, vous allez tranquillement écouter les voix françaises pour suivre. Il y a beaucoup de studios de VF donc cela marche toujours.

« Un mauvais doublage peut faire foirer une série donc la qualité est très importante »

Quel est l’acteur et/ou personnage le plus marquant de votre carrière ?

Le personnage de Ron Woodroof, incarné par Matthew McConaughey dans Dallas Buyers Club. Un film qui traite du sida et centré sur un homme condamné à mourir. N’ayant plus rien à perdre, il va se rendre compte qu’il ne peut pas compter sur les laboratoires pharmaceutiques et il va mener ses propres recherches et parvenir à vivre 15 ans de plus. Aà travers sa maladie, il va se révéler être un type exceptionnel alors, qu’à la base, il aime juste la cocaïne et les putes. J’ai adoré l’histoire et le personnage et c’était un rôle physiquement dur à jouer même en doublage.

Est-on attaché à un personnage que l’on double durant plusieurs saisons, tel Michael Scofield dans Prison Break ?

Oui, bien sûr. Prison Break on s’y attache car la série était un phénomène à ses débuts. À l’époque, elle m’a aidé à obtenir des rôles ailleurs. Je l’avais trouvée dans l’air du temps et, à son démarrage, il y avait beaucoup moins de séries qu’aujourd’hui. À présent, je la trouve dépassée. Je n’ai pas accroché avec la dernière saison, les scénarios étaient trop faibles par rapport à ce qui se fait actuellement.

Cela pourrait remettre en cause votre participation à une éventuelle saison 6 ?

Non, car je suis seulement sur la voix. Je ne vais pas arrêter un doublage car je n’aime plus mon personnage...

Un acteur de doublage n’a pas son mot à dire sur l’évolution de son personnage. Avez-vous déjà été frustré par un scénario ou des événements contraires à ce que vous auriez imaginé et souhaité ?

On est forcément frustrés à un moment. Il y a évidemment des situations pour lesquelles vous n’êtes pas d’accord. Prenez MacGyver, il a des tas de problèmes mais on sait qu’il va s’en sortir. On aimerait qu’il soit plus dans le conflit et qu’il s’en sorte un peu moins facilement. On se dit un peu trop souvent « je ne suis pas sûr qu’en vrai, ça aurait pu se passer comme ça ». J’aimerais que MacGyver se retrouve un peu plus dans la merde.

Quand vous êtes amené à doubler un nouvel acteur, comme Lucas Till dans MacGyver, comment préparez-vous votre performance ?

Je pars dans un monastère pendant deux, trois mois. Je m’imprègne de son énergie et quand mon être se sent prêt, je me lance (rires). Sinon, la préparation est la source du travail. Je regarde les épisodes par avance et en plateau, je discute beaucoup avec le directeur artistique. Je suis de près les performances de l’acteur principal. L’énergie et le ressenti sont très importants. Pour les voix, il y a des énergies d’acteurs qui, de base, collent parfaitement avec un style d’acteurs. Par exemple, M6 avait déjà des noms en tête pour doubler les principaux personnages de MacGyver. Après, j’arrive à m’adapter assez facilement à un personnage.

Est-ce différent de préparer le doublage de MacGyver et Michael Scofield ?

Non, la préparation sur l’instant est d’écouter la musicalité de l’acteur. Il y a aussi une préparation psychologique pour retranscrire au mieux ses émotions et vraiment s’imprégner de son énergie. C’est très important. Chaque personnage, chaque personne a son rythme, le mien, par exemple, est différent du vôtre Il faut le comprendre pour le reproduire.

« Je ne vais pas arrêter un doublage car je n’aime pas mon personnage »

Lucas Till a repris un rôle mythique. La voix française de Richard Dean Anderson, Edgar Givry, est toute aussi familière des fans. Avez-vous ressenti une pression particulière dans ce nouveau challenge ?

MacGyver a bercé mon enfance donc c’est assez émouvant de travailler avec Edgar Givry, qui l’a doublé pendant plusieurs années. J’avais peur de le décevoir car c’est un très bel acteur et une très belle personne. Ce personnage a tellement marché en France... Nous avons bien travaillé ensemble mais je me suis concentré sur la performance de Lucas Till. Il y a plusieurs niveaux bien souvent dans cette préparation, jouer la comédie et aussi retravailler les textes quand c’est nécessaire.

Votre voix étant votre outil de travail, prenez-vous des précautions particulières pour ne pas l’abîmer ?

Oui, tout à fait ! Donc, on fume des cigarettes et on boit beaucoup de rhum !

Ces consommations sont autorisées dans les monastères ?

En tout cas, il faut le faire très discrètement (rires) ! Non, il faut se protéger, se couvrir, boire de l’eau chaude pour conserver sa voix. Si je n’ai pas de voix quand je suis derrière un ordinateur, je peux quand même travailler. Mais si je suis sur un plateau, comment je fais ? Après, certains acteurs s’en foutent, ils fument leurs cigarettes et boivent de l’alcool. Mieux vaut être bien portant et prendre soin de sa voix.

Quand un acteur ou une actrice de doublage décède et délaisse ses personnages, quels sont les clés pour ne pas perturber les adeptes de la version française ?

Il n y a rien à faire ! Le drame est arrivé et la voix change... Récemment, un acteur de 24 heures chrono est parti très rapidement, un autre est arrivé et il a apporté ses qualités. C’est la fatalité...

Sur l’écran, où peut-on vous voir actuellement ?

Je tourne pour la série Demain nous appartient, sur TF1. Je suis le nouveau gynéco-obstétricien qui arrive à l’hôpital, un rôle récurrent mais pour combien de temps ? Je n’en sais rien. Ma première apparition est le 13 février et mon personnage va être amené à beaucoup évoluer. Je tourne tout le mois de février déjà. Parallèlement, je continue les doublages et les pubs.