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Bruce Toussaint (I>Télé) : « Le bashing des chaînes d’info est devenu un sport national »

Alexandre Raveleau
Publié le 16/05/2014 à 18:42 Mis à jour le 22/05/2014 à 17:21

Depuis la rentrée de septembre, Bruce Toussaint est en charge de la matinale de I>Télé. Entre 7 heures et 10 heures, la #Team Toussaint décrypte l’actualité à chaud sur la chaine d’information continue, avec Amandine Bégot, Marie Colmant, Nicolas Bouzou, Stefan Etcheverry ou encore Christophe Barbier. Si la saison n’est pas encore achevée, Bruce Toussaint dresse bilan des audiences. Le 7 mars dernier, sa tranche a battu son record, pointant à 6.3% de part de marché. Globalement, le 7/10 de I>Télé a progressé de 15% par rapport à la saison passée. Bruce Toussaint profite également de cet entretien pour recentrer le débat autour de la mission des chaines d’information continue et donne son opinion sur la question du passage en gratuit de LCI.

Alexandre Raveleau : Vous êtes le patron de la matinale de I>Télé, l’une des tranches les plus importantes de la grille de la chaîne d’information. Quel bilan tirez-vous de cette première saison ?

Bruce Toussaint : Je suis très heureux puisque l’audience est bonne, et surtout dans une progression constante depuis la rentrée, en particulier avec la fin de l’hiver et les élections municipales. C’est un motif de satisfaction, même si pour être tout à fait honnête je n’ai pas le nez sur les chiffres tous les jours. Sur I>Télé, nous avons cette chance d’être un peu épargné par la couse effrénée à l’audience, cette pression permanente, d’autant plus que nous sommes dans une offre concurrentielle terrible. Le paysage du matin ne cesse de s’enrichir donc c’est très difficile dans ces conditions de s’améliorer.

Dès votre arrivée, vous avez cassé les codes de la matinale classique en choisissant une équipe, votre #Team Toussaint, qui vous accompagne durant toute la tranche. Allez-vous effectuer des changements à la rentrée ?

À ce jour, je suis incapable de vous dire ce qui peut changer pour l’année prochaine. Mon objectif est de bien finir cette saison. En revanche, l’idée pour nous c’était de marquer une différence avec la concurrence. Il ne s’agit pas de la matinale d’un homme ou d’un couple, mais d’une équipe. On a tellement voulu assumer ce côté qu’on la mit dans le nom, « la team ». Et ce n’est pas un effet de manche. D’autre part, j’assume ce climat à la fois sérieux et relativement détendu. Le matin, on a pour mission de réveiller le public en douceur. Nous compensons l’agressivité de l’info par une ambiance plus chaleureuse. Il y a une alchimie entre tout le monde et c’est assez chouette. Malgré l’actualité ou l’horaire, on a plaisir à se retrouver pour travailler et s’amuser.

La durée de vie des « matinaliers » est généralement plutôt courte à l’antenne, parce que l’exercice est réputé éreintant. Quelle marge de manœuvre vous donnez-vous ?

Je ne m’en fixe pas. Il s’agit de ma septième année de matinale, avec quatre sur Canal+, puis un arrêt et deux ans sur Europe 1. Lorsqu’il sera temps d’en parler, on en discutera ensemble avec I>Télé. Pour l’instant, je ne projette pas.

« La critique est souvent très injuste, et la plupart du temps par méconnaissance »

Vous êtes apparu à plusieurs reprises en soirée pour animer des débats ou des éditions spéciales. N’avez-vous pas envie de changer de créneau horaire ?

Est-ce que je suis fatigué le matin ? Oui. Tous mes camarades sont aussi fatigués, mais en même temps, c’est largement compensé par le job qui est passionnant. Faire une matinale, c’est l’une des places les plus intéressantes dans nos métiers. Il faut l’accepter. Pour vous répondre, lorsque je suis arrivé à I>télé, j’avais demandé à pouvoir assurer le plus souvent possible, et en fonction de la demande de la chaine, des « breakings news ». Ce n’est pas un désir particulier de faire autre chose, mais plutôt complémentaire de mon job de matinalier. Et quand on fait le 7 heures / 10 heures, on a un peu de temps libre... Je blague évidemment ! (rires)

Les chaînes d’information continue font régulièrement l’objet de critiques vis-à-vis du traitement de l’information, prônant l’immédiateté, manquant de recul, multipliant les effets... Comment réagissez-vous ?

Il y a un bashing des chaînes d’info, qui est devenu un sport national et qui m’amuse beaucoup. C’est souvent très injuste, et la plupart du temps par méconnaissance. La chaîne d’info est là pour donner l’information immédiate. Elle peut aussi faire du décryptage et de l’analyse, mais ce n’est pas sa mission première. L’information la plus importante à nos yeux, c’est celle qui vient de tomber. Après, pour approfondir, vous avez d’autres supports. Personne ne mesure l’incroyable difficulté de fabriquer 24 heures d’antenne par jour, en direct et non renouvelables. C’est un défi gigantesque. On devrait plutôt rendre hommage à ce travail là. Rien ne nous est épargné, jusqu’aux fautes de français. Moi même je les regrette, mais mon Dieu... Remarquez, je préfère qu’on nous reproche ça que des fautes de déontologie.

Partie 2 > BFM TV, le dossier LCI, son passage dans L’Oeuf ou la poule ?


Ne trouvez-vous pas dérangeant que l’information soit parfois diluée au milieu de véritables tunnels de publicité ?

En tant qu’animateur d’une tranche, je préférerai évidemment qu’il y ait moins de publicité, voire pas du tout. Nous n’avons pas d’autre choix possible pour des raisons économiques. Par contre, je suis d’accord avec vous, il faut trouver le bon dosage entre ce qui ne va pas faire fuir le public et cette nécessité économique. Pour l’instant, on est un peu bloqué, même si nous avons déjà fait un effort sur la question depuis quelques semaines.

Avez-vous les yeux rivés sur BFM TV durant votre direct ?

On s’intéresse à la concurrence et c’est normal. Je fais également attention à ce que font les radios. Tout ça fait partie du job, d’autant plus le matin, car une matinale est souvent une affaire de pari sur les infos du jour.

Quelle est votre position par rapport au dossier du passage en gratuit de LCI ?

Je pense que ce serait une folie pour le secteur de l’info. Je veux bien comprendre les raisons, mais je m’inquiète. Je trouve que c’est un secteur bien riche. Est-ce que la chaine trouvera sa place ? Son public ? Est-ce qu’elle ne risque pas d’affaiblir les autres ? France 24, la Chaine parlementaire, Euronews, BFM... Je crains un bouleversement du paysage. Et si LCI existe depuis vingt ans sur ce modèle, il y a une raison.

« Je pense que ce serait une folie pour le secteur de l’info de voir arriver LCI sur la TNT »

Dans un tout autre univers, vous figurez sur la liste des invités de L’Oeuf ou la poule ? de ce vendredi 16 mai sur D8. Quel souvenir gardez-vous de cet enregistrement avec Cyril Hanouna ?

Nous avons passé un excellent moment. Il y avait Élie Semoun, Roselyne Bachelot, Max Boublil... Des gens venus de tous les horizons. On s’est vraiment bidonné pendant l’enregistrement. Et Cyril Hanouna a le talent pour réussir à mettre l’ambiance et faire le show. C’était très amusant.

Par le passé, vous avez animé des jeux et des magazines tournés vers le divertissement pour Canal+, entre Le News Show et Tout le monde il est beau... Ce ton ne vous manque pas ?

Je suis avant tout journaliste. J’ai eu la chance de faire sur Canal+ des émissions plus humoristiques, mais j’ai toujours gardé ce regard de journaliste. Sur I>Télé, je suis aujourd’hui très heureux. Rien ne me manque.

En décembre 2012, France 2 a annulé votre émission Vous trouvez ça normal. Elle a été remplacée par Ce soir (ou jamais) qui ne réalise pas des meilleurs scores. En voulez-vous toujours au service public ?

C’était désagréable sur le moment, je ne le nie pas. Aujourd’hui, tout ça me parait tellement loin. Je souhaite bonne chance à Frédéric Taddéi pour la suite. Il est selon moi l’un des grands talents du service public et son émission est souvent remarquable. Je ne lui veux vraiment que du bien.