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Clem ou l’histoire d’un succès transgénérationnel

Claire Varin
Publié le 28/03/2011 à 11:06 Mis à jour le 28/03/2011 à 11:08

Clem est apparu sur les écrans français le 22 février 2010. Ce soir-là, le téléfilm réunissait 9,41 millions de téléspectateurs (soit 34,8% de part de marché et 42% sur les 4/14 ans) et battait le record d’audience pour une fiction française diffusée sur TF1, depuis 2007. Un succès qui a poussé la chaîne à commander des suites. Un an plus tard, les aventures de Clémentine (Lucie Lucas) se déclinent en quatre épisodes. Et si le public est à nouveau au rendez-vous, une autre session sera tournée l’été prochain. Lundi 21 mars 2011, TF1 a diffusé le second épisode de 90 minutes, qui a rassemblé 6,4 millions d’individus. Un score nettement moins important que le premier, mais le succès n’est pas encore démenti. Alors pourquoi cette fiction intéresse-t-elle autant les téléspectateurs ?

L’histoire de ce succès démarre par un sujet vraisemblablement porteur. Clem a 16 ans et fait face à la maternité, avec tout ce que cela implique à son jeune âge : les responsabilités, l’immaturité, les disputes avec ses parents, les études, les relations avec ses amis, etc. La grossesse chez les adolescentes est un thème universel. Comme l’a souligné Victoria Abril, la mère de Clem dans la série, « cela peut arriver dans n’importe quelle maison. Ça ne vient pas de la lune ! Le scénario n’est absolument pas irréaliste : voir ta fille tomber enceinte, que tu sois pauvre ou riche, ça peut arriver à n’importe qui ! Et se réveiller deux semaines trop tard (après la date limite pour avorter - ndlr), c’est vraiment chiant ! »

Ce sujet sociétal assez grave est ici abordé sur le ton de la comédie. La grossesse chez les adolescentes a également été traitée avec humour dans Juno, un film souvent cité par la presse comme une référence pour Clem. Mais si Lucie Lucas aime l’idée de tenir un rôle similaire à celui d’Ellen Page ; pour Victoria Abril, CIem et Juno n’ont pas grand-chose à voir. « Clem, c’est l’histoire de toute une famille. » Ici, Joyce Buñuel met en scène une histoire d’adolescente qui implique et perturbe toute une famille, voire deux. Disputes, soutiens et incompréhensions, les situations peuvent suscitées l’identification chez les téléspectateurs de tous âges. Et cette exposition des problèmes adolescents (sexe, contraception, relations amoureuses....) et des réorganisations provoquées par la naissance d’un enfant dans la vie d’une famille, évoque - parfois à travers son traitement du sujet - la série américaine La vie secrète d’une ado ordinaire. Cette problématique basée sur une réalité a été maintes fois représentée dans des fictions à l’étranger, mais assez peu en France. Ce qui fait tout l’intérêt de Clem.


D’ailleurs, en 2010, lorsque l’importante couverture promotionnelle débute, TF1 a l’idée de jouer sur une ambiguïté. Le personnage de Clem est présenté comme réel. Le public ne peut que se demander si son histoire est véritable. Fiction ou docu-fiction ? La confusion s’amplifie autour du fait que l’actrice Lucie Lucas, âgée de 24 ans, a elle aussi donné naissance à son premier enfant. Aujourd’hui encore, les internautes posent la question : est-ce une histoire vraie ?

Car Clem existe également sur la toile. À travers le site de la série, la vie des personnages est prolongée. L’héroïne s’exprime dans un blog, sur lequel elle poste des textes et des vidéos, auxquels le public est invité à réagir. Une activité de blogueuse que les fans lui connaissent. Et il est amusant de constater que lundi, à 21h46, était posté sur le site « Je veux que tout redevienne comme avant !!! Je veux que tout redevienne comme avant !!! Je veux que tout redevienne comme avant !!! [...] » Au même moment, le public devant son écran de télévision voyait Clem taper ce texte sur son ordinateur. L’univers fictif se répand alors sur un autre médium et rejoint la réalité des téléspectateurs. Sur internet, les autres personnages - comme Alyzée, la meilleure amie - ont aussi la parole, tandis que les internautes distillent abondamment leurs messages d’encouragement.

Ce procédé promotionnel peu commun en France, stimule ainsi une réflexion sur ce que c’est d’être mère à 16 ans. Tout en installant une connivence avec le public. Les téléspectateurs - notamment les adolescents - peuvent alors s’identifier pleinement et rester fidèles aux personnages, assurant une continuité heureuse à la série...