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Emmanuel Priou, producteur « Dans la peau de Jacques Chirac »

Joseph Agostini
Publié le 12/03/2007 à 00:10 Mis à jour le 14/03/2010 à 19:39

Rendez-vous en terre inconnue, Dans la peau de Jacques Chirac, La marche de l’empereur, c’est lui. Emmanuel Priou, oscarisé, césarisé, est aujourd’hui un producteur de cinéma et de télévision comblé. De passage à Tahiti, où il était membre du jury du Festival océanien du documentaire, il revient sur son parcours chaotique mais auréolé de chance et de talent...

Joseph Agostini : La marche de l’empereur a été votre sésame...

Emmanuel Priou : La boîte de production que j’ai créée (Bonne pioche ndlr) avec Yves Darondeau et Christophe Lioud a déjà treize ans. Je produis avec mes deux collaborateurs des documentaires sans ligne éditoriale spécifique depuis 1993. Le réalisateur Luc Jacquet est venu nous voir en juillet 2002, avec une autorisation exceptionnelle de la base antarctique française durant tout l’hiver. En lisant son projet, nous avons été conquis par la force de l’histoire.

C’est ensuite que tout s’est compliqué...

En janvier 2003, alors que Luc était déjà complètement inaccessible, puisque la glace avait repris possession de la mer, nous savions que n’avions pas assez d’argent pour produire ce film. Nous ne pouvions payer que les salaires, pas même la location de matériel... Nos partenaires en télé ne suffisaient pas. Le seul moyen, c’était d’aller en chercher au cinéma. Pour les convaincre, nous n’avions même pas de bobines alors que nous venions d’apprendre que l’autorisation de tournage nous avait été retirée par la base française ! A l’époque, tous les gens qui nous recevaient nous prenaient pour des cinglés.

Comment avez-vous stoppé cette bérésina ?

Quand Buena Vista France a décidé de nous suivre ! L’autorisation a été récupérée et, en voyant les images au Festival de Cannes 2004, le film a été vendu au monde entier en deux jours ! Canal +, qui n’en voulait pas, l’a pris à ce moment-là. En 2005, la Warner s’est associée à National Géographic pour l’acquérir. A sa sortie, le film a fait deux millions d’entrées en France et plus de 2500 copies dans le monde. C’est le plus grand nombre de copies de l’histoire du documentaire !

Vous êtes passé du surendettement aux Oscars. Comment avez-vous géré cela ?

Dans le travail de producteur, il y a toujours une part de prise de risque. On ne peut pas y couper. C’est le succès du film qui a été étonnant. J’ai déjeuné avec Spielberg quelques mois après avoir galéré pour qu’on achète mon film ! Cela dit, je venais d’avoir 40 ans et avais suffisamment connu les aléas de mon métier pour ne pas choper la grosse tête ! Ça m’est arrivé au bon moment.

Avant La marche de l’empereur, un certain Frédéric Lopez était déjà venu vous voir pour vous parler d’un projet en télévision. Pourquoi a-t-il retenu votre attention ?

Frédéric Lopez nous a séduits avec son concept : mettre des célébrités dans un endroit inconnu en mélangeant les genres. Son projet se situait entre le magazine d’aventures et le divertissement people. On a dit banco et on ne s’y est pas trompé. Les deux premiers numéros de Rendez-vous en terre inconnue avec Muriel Robin et Patrick Timsit ont très bien fonctionné. France 2 en a commandé 4 autres.

Robin et Timsit étaient deux humoristes. Vous allez passer à d’autres styles ?

Il faut des personnalités fortes pour cette émission, des gens très charismatiques capables de tenir la distance dans un milieu qui leur est complètement étranger. J’aimerais avoir Jugnot, Bouquet, Depardieu pour les prochaines...

Après La marche de l’empereur, les sceptiques sont devenus des amis ?

Comme toujours dans cette situation. Notre deuxième film de cinéma, Dans la peau de Jacques Chirac, a été récompensé au César dans la catégorie Documentaires. C’est le premier portrait au vitriol d’un président en exercice. Quant à Luc Jacquet, il travaille à nouveau avec nous sur Le renard et l’enfant, un documentaire qui raconte l’histoire d’une petite fille et d’une renarde sauvage. Il est déjà prévendu partout et sortira à Noël.