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France 4 et France Ô vont-elles disparaître ?

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Directeur exécutif en charge des contenus
Publié le 18/09/2014 à 16:19 Mis à jour le 18/09/2014 à 17:14

Tous les groupes audiovisuels publics en Europe sont soumis à des restrictions budgétaires. De la BBC au Royaume-Uni, à TVE en Espagne, les chaînes publiques concèdent toutes à des efforts économiques afin de réduire leur déficit d’exploitation, et de faire face à un marché de plus en plus concurrentiel. La RTP au Portugal est d’ailleurs passée in extremis à côté d’une privatisation, tandis que la RAI en Italie s’est déjà séparée depuis plusieurs années de divertissements puissants, mais onéreux, et ce, malgré de bons taux d’audience. En France, Bruno Patino, directeur général des programmes de France Télévisions, a souligné lors des conférences de presse des antennes que le groupe était à l’économie.

La priorité reste « le respect des obligations du cahier des charges, mais également la stabilisation des investissements dans la fiction et le documentaire » pour Thierry Thuillier, directeur de l’antenne et des programmes de France 2, tout en diminuant les coûts. Pour ce faire, la première chaîne publique française a augmenté sensiblement le nombre de rediffusions sur sa grille et a renégocié tous ses contrats en fin de saison. Doté d’un budget de 2.49 milliards d’euros en 2014, le groupe ne peut compter sur les recettes publicitaires après 20 heures, horaire où les écrans publicitaires sont pourtant les plus puissants à la télévision. En parallèle, France 2, France 3, France 4, France 5 et France Ô ont généré 325 millions d’euros de recettes publicitaires en 2013. La direction de France Télévisions tient à maintenir et réaffirmer le cap du retour à l’équilibre financier à l’horizon en 2015, mais pour cela, le groupe devra procéder à encore quelques efforts.

420 millions d’euros pour les antennes régionales de France 3, soit 50% du budget de la chaîne

Dans les faits, le coût de grille de France 2 a été estimé par Thierry Thuillier à 790 millions d’euros (information et sport inclus) pour cette saison. France 3 coûtera 360 millions d’euros aux contribuables, sans compter les 420 millions d’euros alloués aux antennes régionales. À titre de comparaison, la dernière chaîne mesurée par Médiamétrie, France Ô, dépensera 29,3 millions d’euros en 2014-2015. Après un déficit d’exploitation de 85 millions d’euros en 2013, France Télévisions espère une perte de 40 millions à la fin 2014. Ce plan s’accompagne en plus d’une réduction de la dotation budgétaire par le gouvernement jusqu’en 2017, passant de 292 à 29 millions d’euros. Dans son numéro d’août dernier, la revue Stratégies rappelle que ce montant sera compensé par une hausse prévue de la redevance de 250 millions d’euros. Pour rogner les coûts, le groupe va dans le même temps revoir ses effectifs à la baisse.

Le directeur général adjoint de France Télévisions en charge de la gestion,Fabrice Lacroix, a par ailleurs rappelé que la situation était complexe pour le groupe audiovisuel public, en expliquant qu’il s’agissait « de supporter une hausse de coûts de 30 millions d’euros par an ». Le respect du cahier des charges semble donc de plus en plus complexe et Fabrice Lacroix a annoncé, «  Si on nous enlève 200 millions d’euros, on rediscute des missions  ». En ces termes, le directeur général adjoint sous-entend que France Télévisions ne pourrait plus s’offrir certains droits pour la retransmission d’évènements sportifs ou encore assurer la diffusion de France Ô et France 4. Menace réelle ou pression contre le gouvernement, la situation demeure en tout état de cause problématique.

Pourtant, ça ne serait pas une première en Europe. En mars dernier, Tony Hall, le directeur général de la la BBC, annonçait la fin de la diffusion sur les réseaux numériques terrestres, le câble et le satellite de BBC 3. En transformant cette mini-généraliste en « un service en ligne nouveau et innovant », le groupe audiovisuel public anglais investira 36 millions d’euros par an dans BBC 3, contre 110 millions actuellement. De fait, la fermeture de France 4 et France Ô n’a jamais été envisagée par le groupe audiovisuel et les équipes travaillent activement à la refonte ou à la réaffirmation de l’identité de ces canaux. Reste que les contraintes budgétaires pourront un jour menacer sérieusement certaines chaînes du groupe...