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La TNT va t-elle révolutionner le PAF ?

Joseph Agostini
Publié le 10/02/2005 à 00:42 Mis à jour le 27/03/2015 à 18:22

Le Président du CSA, Dominique Baudis, l’a annoncé : la Télévision numérique terrestre démarrera le 31 mars prochain. Mais qu’est-ce qui, concrètement, va changer à l’arrivée de ce nouveau mode de diffusion ? Sur le plan purement technique, le passage au numérique par voie terrestre signifie surtout que nos bonnes vieilles chaînes hertziennes seront désormais retransmises gratuitement en haute définition et en son numérique.

La compression des signaux, en passant de l’analogique au numérique, permettra de multiplier par 6 le nombre de canaux disponibles, ce qui engendrera l’arrivée d’autres chaînes et de nouveaux services. Fini donc le monopole du numérique pour les bouquets satellite et les réseaux câblés payants ! En résumé, la TNT sonne l’ère du tout numérique pour tout le monde et finalise une marche en avant, commencée au début des années 80 avec la numérisation informatique.

Au moyen d’un simple adaptateur, et pour « 0 euro seulement », comme s’acharne à le répéter l’agence Léo Burnett dans sa première campagne de communication, nous serons tous appelés à recevoir 14 chaînes nationales gratuites, en comptant les six canaux traditionnels. Ainsi, TMC (Groupe Pathé), M6 Music (qui pourrait être remplacée par Téva) et La Chaîne parlementaire (LCP/Public Sénat), déjà existantes sur la câble et le satellite, se partageront le gâteau avec quatre autres nouvelles chaînes. Direct 8 (Groupe Bolloré), NT1 (AB Groupe), France 4 et NRJ TV (NRJ Groupe).

Les programmes de Direct 8 seront connus le 14 mars, a indiqué Philippe Labro, responsable du projet auprès de Vincent Bolloré. « Ce sera une chaîne responsable et civique (...) 95% en direct », a d’ores et déjà prévenu Philippe Labro. « Il s’agira d’une chaîne faite par des inconnus », a-t-il ajouté, en confirmant que Direct 8 permettra à de nouveaux talents d’éclore, loin des chaînes généralistes traditionnelles. France 4, elle, promet d’être « la chaîne branchée du service public », selon les mots de Marc Tessier, Président de France Télévisions. Son programme sera composé, entre autres, de concerts, de pièces de théâtre, d’« arts vivants », et nous invitera à découvrir les coulisses des spectacles. A noter qu’elle ne couvrira pas (ou rarement) l’actualité classique, réservée à Mezzo, une chaîne du même groupe. NT1 sera plus généraliste, avec 70% de fiction, du divertissement et des magazines d’information. Le groupe AB veut créer une chaîne « familiale », de dialogue et de service. Elle s’est aussi engagée à s’investir fortement dans la création de fictions françaises. NRJ TV associera la musique à des séries, le tout ponctué par des formats courts de jeux, d’infos et de divertissements, pour les 11/49 ans. Quant à Arte et France 5, elles auront désormais un canal chacun. La première aura des multidiffusions en journée et en soirée tandis que la deuxième émettra 24h/24.

Daniel Boudet de Montplaisir, Président de la mission TNT, a également évoqué son désir d’« étoffer le menu des chaînes gratuites », avec la création de deux chaînes d’information et d’une chaîne jeunesse. Do TV (groupe AB), le projet conçu par Dorothée, serait encore à l’étude, comme celui d’une chaîne jeunesse, qui associerait Lagardère et France Télévisions. La télévision catholique KTO TV, créée sous l’impulsion de l’archevêché de Paris, aurait aussi demandé à faire partie de la nouvelle offre gratuite...

Mais la deuxième grande « révolution » de la TNT est prévue pour le mois de septembre, avec l’arrivée de 15 chaînes payantes sur le réseau de terre (Canal+, Canal J, AB1, Ciné Cinémas, Eurosport, ITV, LCI, Paris Première, Planète, Sport+, TF6, TPS Star, Cuisine TV, Comédie et Match TV). Mais, face à des coûts de diffusion trop élevés, les chaines Comédie !, Cuisine TV et Match TV auraient, d’ores et déjà, prévenu le CSA de leur désistement.

Pour ces chaînes commerciales, la norme MPeg 4 a été adoptée. Il s’agit de la compression numérique la plus pointue, qui permettra de regarder des programmes en 3 D et interactifs. Les avantages du « Tout numérique » ne sont pas à négliger. Le fabricant ADS Tech proposera bientôt un boitier pour accéder à la télévision et à la radio numériques avec son PC. La course aux offres a commencé. Le 15 mars 2005, les possesseurs du PC imedia H5333 TNT Pack de Packard Bell recevront les quinze premières chaînes disponibles de manière totalement gratuite. Le monopole de la TDF appartient désormais à un temps révolu. D’autres opérateurs diffuseurs (Towercast, Antalis...) arrivent en France, un pays déjà très en retard par rapport à l’ensemble de ses voisins européens. L’Etat a laissé aux bouquets satellites et à ses investisseurs (TF1, France Télécom, Canal+) le temps de se développer avant de se lancer à la conquête du numérique terrestre.

Même si TDF est rentrée en 1997 dans le capital de la TNT britannique, tout reste encore à faire dans la pratique. Et la route sera longue ! En effet, le 31 mars, seuls 17 sites (notamment Paris, Lyon, Marseille, Brest et Toulouse) soit 35% de la population nationale, pourront profiter de la TNT. Il faudra attendre 2007 pour que le réseau couvre 80 à 85% des foyers français. Concernant la norme MPEG 4, elle n’est pas encore tout à fait finalisée et certains spécialistes parlent déjà d’un lancement prématuré. Enfin, certaines chaînes dans la palette d’offres de la TNT sont encore à l’état de projets, et il n’est pas certain qu’elles trouvent un large public... Si le numérique terrestre brisera une bonne fois pour toutes l’oligopole français, encore faut-il que sa gamme de programmes soit adapté. C’est toute la question des attentes des téléspectateurs.