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Léopoldine (Nouvelle Star 10) : « On est de la chair à critique, donnée en pâture au jury et au public »

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Directeur de la publication
Publié le 03/01/2014 à 16:31 Mis à jour le 13/01/2014 à 06:16

A 28 ans, Léopoldine, venue tout droit d’Alsace, a souhaité s’immiscer dans l’univers de la télévision à travers Nouvelle Star avec, pour objectif, d’en connaitre les coulisses et de pouvoir chanter face caméra. Et la jeune femme, qualifiée de « Barjot de l’étape » par André Manoukian, a de quoi raconter sur cette aventure qu’elle ne regrette nullement, mais dont elle sentait la fin avec un certain soulagement.

Jérôme Roulet : Quelles motivations vous ont poussée à passer le casting de Nouvelle Star ?

Léopoldine : J’avais besoin de mettre de côté mon vieux fantasme de passer à la télé et de chanter devant ma maman. [Rires.] J’avais vraiment la curiosité de voir comment cette émission se déroulait de l’intérieur. Après, c’est toujours à double tranchant, car j’aurais pu passer dans les casseroles.

Comment avez-vous vécu la première approche du casting ?

J’y suis allée avec mon accordéon en espérant ne pas me faire humilier... Avec tous les jeunes autour de moi, je me suis demandée ce que je faisais là ! Puis, j’ai chanté et j’ai vu le logo Nouvelle Star derrière moi, je me suis dit « C’est bon je suis dans les casseroles ! » Finalement, ça a été plutôt une bonne surprise.

Il faut dire que peu de personnes ont dû se rendre au casting avec un accordéon...

Oui, effectivement. Mais comme je joue du Michael Jackson à l’accordéon, autant y aller avec ce que je fais, avec ce que je suis. Je savais que Nouvelle Star pouvait permettre à des choses comme ça, d’exister à la télévision.

« Dieu m’a donné la foi » a été l’une de vos premières prestations en direct. Comment analysez-vous cette performance avec le recul ?

Musicalement, c’était quelque chose d’assez baroque et déglingué, ce qui me correspond plutôt. Après, dans le choix de la chanson, c’était une bonne idée de leur part, mais ça ne correspond pas du tout à mon univers, ni la chanteuse, ni les paroles. Aujourd’hui, je regarde ça plutôt avec amusement...

« La télé crée des personnages très identifiés et très identifiables »

André Manoukian a cependant dit de vous : « En 10 ans, on n’a jamais eu ça dans le magasin, tu es donc la barjot de l’étape ». À ce moment-là, avez-vous eu l’impression d’être cataloguée comme la « barjot » de Nouvelle Star 2014 ?

Forcément, la télé crée des personnages très identifiés et très identifiables : la barjot, la belle voix, la nouvelle Rihanna, le farfadet, etc. Personnellement, ça me plaisait beaucoup d’être qualifiée ainsi. Je ne savais pas du tout ce qu’il allait en penser et ça m’a fait très plaisir.

Vous avez également revisité la chanson de la Boum, « Reality ». Que pensez-vous de cette performance ?

C’est une prestation où j’étais assez fébrile. Je suis contente d’avoir chanté ce slow mythique. C’était un joli moment.

Partie 2 > Les remarques de Sinclair et sa vision de la télé...


Pourtant, vous avez avoué que ces deux chansons ne vous correspondaient pas. N’auriez-vous jamais eu le réflexe de les interpréter sans qu’on vous les propose ?

C’est clair. [Rires.] On travaille avec des producteurs et programmateurs musicaux qui connaissent leur métier, et les attentes du public. Ils m’ont dit assez vite que j’étais un personnage segmentant, et qu’il fallait que j’élargisse mon public. Ce qu’ils ont fait. Je leur ai fait confiance. Après, de l’intérieur, j’avais du mal à prendre plaisir à interpréter ces titres. Il y a de belles vieilles chansons qui peuvent transmettre quelque chose de réellement fort. Pour « Reality », en dehors de l’aspect nostalgique, la chanson est assez pauvre... Mais ce n’est pas très grave, je suis très contente d’avoir fait ça

Ce qui vous a fait dire lors de l’after face à Enora Malagré : « Je ne peux pas être une coquille vide, et faire semblant comme sur les deux premiers primes »...

Oui... Lors du 3e prime, on m’a dit « Fais attention de ne pas te saboter, car tu n’as pas conscience de l’image que tu as chez nous, et donc, il faut que tu chantes ce qu’on te dit de chanter. » Mais à un moment, j’étais trop malheureuse, et physiquement j’allais bientôt craquer si je ne faisais pas un truc qui me faisait réellement plaisir.

Le titre « Beat it » correspondait-il à cette attente ?

J’avais très envie de chanter du Michael Jackson, donc j’ai vraiment pris du plaisir. Après, on ne m’a pas laissé le choix de la chanson. Il y avait un arrangement différent qui existait déjà sur « Beat it » alors que sur d’autres ils (la production, ndlr) ne l’avaient pas. Ils ont aussi des contraintes...

Sinclair a été très cinglant avec comme remarque « C’est un hommage dont je me passerais bien ». Comment l’avez-vous pris ?

[Rires.] Ça m’a fait rire. Pour lui, ce n’est pas possible, pour moi, c’est exactement ce que j’aime faire. Les goûts et les couleurs ne se discutent pas. Je savais que j’allais me faire tailler un costard par Sinclair ; je l’avais anticipé. On sait qu’on est de la chair à critique, donnée en pâture au jury et au public. Je l’accepte avec décence. Et c’est assez joyeux d’accepter les critiques. Sur les réseaux, il y a en qui se lâche vraiment. Tant mieux si ça leur fait du bien, car moi ça ne me fait pas trop de mal.

« Je savais que j’allais me faire tailler un costard par Sinclair »

Avez-vous ressenti les faussetés soulignées par la plupart des jurés ?

Non, car sur le plateau on ne s’en rend pas compte. Quand je chante à l’extérieur, je suis dans des conditions qui, pour moi, sont plus gérables, et j’utilise une voix que je connais... Ici, j’ai accepté de travailler sur une voix de poitrine que je n’utilise pratiquement jamais. C’était assez compliqué physiquement et ça demandait beaucoup d‘effort. Après ça m’a beaucoup fait évoluer vocalement et j’ai découvert des choses que je vais continuer à travailler.

Avez-vous revu cette prestation depuis ?

Pas encore, et je ne veux pas la revoir tout de suite. Je fais du théâtre, car c’est quelque chose qui se passe sur le moment ; c’est un vrai échange. Nouvelle Star, c’est du « faux live », le public est chauffé, il faut s’adresser aux caméras, c’est très particulier. J’avais conscience de tout ça et j’étais un peu flippée par toute cette mécanique. [Rires.]

Confirmez-vous ce que vous avez dit lors de votre élimination : « Je sais que la télé n’est pas mon endroit » ?

Oui, ce n’est pas du tout mon endroit, en tout cas pas pour la musique. Après il y a d’autres choses à la télé avec de vraies conditions de concerts comme dans Taratata ou sur Canal+...

Partie 3 > Son journal intime sur son aventure


À la fin du show, vous vous retrouvez seule face à Claudia. Avez-vous alors encore un quelconque espoir ?

Je savais que j’allais partir, et je l’espérais. Claudia a une vraie fraîcheur et une vraie belle énergie. Elle a beaucoup plus quelque chose à faire que moi avec le public de Nouvelle Star. Le public de D8 n’est pas tout à fait celui de M6, il n’y a pas assez de gens qui ont adhéré à mon univers même si je reçois beaucoup de messages de soutien.

Vous avez tenu une sorte de « journal intime ». Comment vous en est venue l’idée ?

Je l’ai décidé dès le départ. J’étais là en tant qu’observatrice ce qui était assez schizophrène. J’observais la manière dont on nous parle et dont on nous formate : on va te parler comme ça parce que tu as 17 ans, comme ça parce que tu as 28 ans, on va taper là où ça fait mal, etc. Il y a quand même des techniques assez limites...

Cela vous a-t-il déstabilisé ?

Bien sûr ! On se rend compte qu’ils (la production, ndlr) jouent sur de l’argumentation. Après, ce n’est pas si grave que ça, on sait où on met les pieds. Heureusement, j’ai 28 ans et un peu de recul pour le vivre. Après des jeunes de 17 ans, et pour l’avoir constaté, le vivent avec beaucoup moins de recul. Ils se prennent des coups de poignard dans le cœur. Ça va les atteindre et les fragiliser beaucoup plus que moi, et j’en suis désolée pour eux.

Pensez-vous à Hugo qui a craqué sur le plateau ?

Non, je ne pensais pas à lui particulièrement, car j’ai trouvé qu’il gérait plutôt bien. Mais c’est vrai que pour un jeune de 17 ans, c’est plus dur d’argumenter en face d’adultes, et surtout ces derniers vont donner beaucoup moins de crédit à son argumentation qu’avec quelqu’un comme Mathieu ou moi.

« J’observais la manière dont on nous parle et dont on nous formate »

Qu’allez-vous donc faire de ce « journal intime » ?

Je vais le relire, peut-être sélectionner des passages, rajouter les messages qu’on m’envoie sur le net. C’est un cahier d’observation. Il décrit ce que je ressens, l’univers de télé, etc. J’ai noté plein de phrases et d’anecdotes... Je vais peut-être en écrire des chansons ou une forme hybride théâtre-chanson... J’ai envie que cette matière serve à quelque chose.

Du côté des projets, vous avez évoqué la création d’un groupe « Maman » avec votre frère. Qu’en est-il ?

Il y a cinq ans, j’ai rêvé une nuit que je montais un groupe avec mon frère qui s’appellerait « Maman ». Je lui ai raconté et il a dit OK. Ça fait six mois qu’on travaille sérieusement dessus et on a un premier concert à Strasbourg au mois de mars. Ce seront des chansons électro avec du saxophone, de l’accordéon, plein d’objets sonores, autour d’un univers loufoque.

Vous allez également jouer une pièce de théâtre aux États-Unis. Vous sentez-vous comédienne ou chanteuse ?

On catégorise toujours tout, c’est comme dans les rayons à La Fnac. [Rires.] Je fais mon métier selon les projets qui arrivent. C’est une histoire de rencontres avec des chemins qui donnent un parcours. Je suis chanteuse, musicienne et comédienne. J’ai commencé par le piano classique, puis j’ai fait du chant en plus par plaisir. Et après, mon choix a été le théâtre pour mieux revenir à la musique par moi-même sans qu’on me l’impose. À la base, quand j’étais petite, je voulais être égyptologue. C’est un peu aussi s’intéresser aux textes et à la poésie. J’ai gardé cette curiosité... Je n’ai pas l’impression d’être totalement à l’ouest de l’égyptologie finalement. [Rires.]