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Paris Première > Jacques Expert, directeur de l’antenne

Tony Cotte
Publié le 15/12/2006 à 01:41 Mis à jour le 27/05/2022 à 00:41

Paris Première a 20 ans. Si son Directeur des programmes et de l’antenne, Jacques Expert, occupe son poste depuis près de six ans, il n’en est pas moins fier du parcours de la chaîne appartenant au groupe M6. Il est désormais loin le temps où Jacques Expert était rédacteur en chef de Combien ça coûte ? sur TF1 puis directeur délégué aux magazines et documentaires sur M6. Calme, posé et sachant toujours garder sa ligne de conduite, Jacques Expert dresse les défis et les enjeux de Paris Première...

Tony Cotte : Paris Première fête son anniversaire, que retenez-vous de ces vingt années ?

Jacques Expert : Il y a beaucoup de choses à retenir. Mais si je devais en désigner une ce serait avant tout l’état d’esprit de Paris Première. Ce qu’elle était à son lancement en 1986 parait totalement anachronique aujourd’hui. Cette chaîne a toujours fait la différence. Pour parler en termes métaphoriques, il y a la terre et un astre que l’on appelle la lune représenté par notre chaîne. Même si on fait partie de la même galaxie, l’air que l’on y respire est différent. C’est un air de pertinence, de dépendance, de liberté de ton et de modernité. Il est plus oxygéné et moins pollué que sur la terre. Mais notre satisfaction première est d’avoir progressé en audience sans en perdre notre âme.

Tony Cotte : Si vous deviez conserver un programme que vous avez installé, lequel choisiriez-vous ?

Jacques Expert : C’est difficile de ne choisir qu’une émission. Mais si il y en a une qui personnifie l’image de la chaîne ce serait Ca balance à Paris. On y conjugue plusieurs périmètres qui sont liés à l’image de Paris Première : l’indépendance des tons et le concept plutôt original. Des chroniqueurs traitant de culture autour d’une table n’est certes pas vraiment inédit, mais nous avons été les premiers à instaurer le principe de l’invité mystère. On confronte directement les artistes aux gens qui l’ont critiqué. La plupart des émissions de ce genre sont des chapelles où on se renvoit des ascenseurs et où on dit du bien d’un film pour mieux le descendre trois mois plus tard. On y encense les grands auteurs car c’est une des conditions de leur venue sur le plateau. Chez nous, il n’y a aucun échange de ce type là. Nous respectons ceux qui ne veulent pas venir. C’est une réelle satisfaction qu’une émission aussi sincère que Ca balance à Paris fasse également partie de nos meilleures audiences pour les magazines.

Tony Cotte : Paris Première était, à ses débuts, une chaîne parisianiste axée sur la mode et les sorties culturelles. Depuis, elle est devenue une généraliste à part entière. Avez-vous atteint finalement les objectifs fixés lors de la création ?

Jacques Expert : Paris Première est aujourd’hui devenue une chaîne nationale avec 23 millions de téléspectateurs potentiels. Nous avons pour vocation d’être le reflet de ce qui se passe à la capitale. On retransmet des spectacles parisiens en direct. On se veut également le reflet de la culture parisienne susceptible d’intéresser les habitants de Brest, Marseille, Strasbourg ou de Bordeaux. Il y a un réel appétit des provinciaux pour des émissions comme Paris Dernière ou encore 93, Faubourg St Honoré.


Tony Cotte : On peut retrouver sur votre antenne des pièces de théâtre, des séries destinées aux jeunes, des productions dédiées ou encore des fictions. A la vue d’une programmation aussi atypique, n’y a-t-il pas une perte de repère dans le cœur de cible ?

Jacques Expert : On pourrait croire que certains programmes ne s’adressent pas forcément à une cible. Mais récemment, nous avons diffusé Ségolène et les 7 nains en direct depuis le théâtre des deux ânes. Le spectacle a réalisé la deuxième plus forte audience depuis la création de la chaîne auprès des 4+ et des CSP+. Cette cible ne représente pas forcément l’intellectuel qui ne sort pas de sa bibliothèque. Elle constitue un public actif. Mais on ne se cantonne pas uniquement aux spectacles de chansonniers. Nous essayons d’élargir le spectre du spectacle le plus large possible. En matière de programme, la dimension de Paris Première est paradoxale. Il y a deux encrages : celui de la nostalgie et celui de la modernité. Nous avons mené une étude poussée qui le montre clairement ! Si ces deux notions sont antinomiques, elles caractérisent bien ce que nos téléspectateurs viennent chercher. Voilà pourquoi on peut passer de programmes comme Vive la télé, qui en réfère à la nostalgie, à des séries modernes comme Hôtel Babylon ou encore la quatrième saison de Nip/Tuck qui sera diffusée en janvier.

Tony Cotte : Parallèlement à ses émissions, Paris Première a installé de plus en plus de fictions sur sa grille. Quelles seront les nouveautés en 2007 en matière de séries ?

Jacques Expert : Nous allons diffuser la nouvelle saison de Scrubs et la série MI-5. En ce qui concerne les inédits, nous proposerons par exemple Kitchen Confidential.

Tony Cotte : Vous faites preuve d’une importante réactivité en effectuant parfois des changements sur la grille à l’instar d’une chaîne hertzienne. La série Jack et Bobby en a d’ailleurs fait récemment les frais. Procédez-vous à des ajustements selon des audiences quotidiennes ?

Jacques Expert : Nous ne procédons pas de façon aussi brutale qu’une chaîne hertzienne. On tente de laisser du temps aux programmes pour qu’ils puissent s’installer et plus particulièrement à nos magazines. En matière de séries, nous nous sommes trompés dans le choix de Jack & Bobby. Ca ne fonctionnait vraiment pas. J’en prends la responsabilité. On ne déprogramme pas pour le plaisir de déprogrammer. Il s’agissait d’un mauvais choix de série...

Tony Cotte : Pourtant c’est une production de qualité qui a été acclamée par la critique !

Jacques Expert : Compte-tenu de l’offre sur le marché, il faut être hyper puissant pour une chaîne comme la nôtre. Les téléspectateurs sont habitués à voir Les Experts, Prison Break ou encore Desperate Housewives. Si aujourd’hui, on n’offre pas de production de cette envergure, les gens ne viennent pas. Earl en revanche marche très bien et les premiers scores de Hôtel Babylon sont positifs. Jack & Bobby n’était pas mauvais, au contraire, mais pas suffisamment remarquable. Je regrette d’avoir dû la déprogrammer.


Tony Cotte : Laisserez-vous plus de temps au divertissement Ding dong qui semble être une réelle déception en terme d’audience ?

Jacques Expert : Ding dong s’arrête à la fin de l’année comme le contrat le prévoyait. Nous sommes toujours déçus quand une émission ne connaît pas le succès escompté. Mais je suis plutôt satisfait du programme en lui-même. Nous sommes allés au bout des 40 formats avec Laurent Baffie. Nous allons continuer à travailler ensemble. On lancera ensuite dans la case horaire Hénaut Président avec Michel Muller qui, j’espère, rencontrera son public.

Tony Cotte : Parmi les visages de la chaîne, on peut retrouver Mélissa Theuriau, Estelle Denis ou encore André Manoukian. Allez-vous continuer à compter sur les animateurs issus de M6 ?

Jacques Expert : Pourquoi pas ? Il n’y a pas de raison de ne pas faire appel à eux à partir du moment où ils sont compétents dans leur domaine. Je suis allé chercher Estelle Denis pour animer le Tournoi des As parce que c’est une joueuse de poker et aussi une excellente animatrice. Mélissa Theuriau, elle, adore les voyages. Il était naturel que l’on pense à elle pour une émission sur ce thème. J’insiste sur le fait que nous ne l’avons pas prise pour son physique ! Quant à André Manoukian, c’est lui qui est venu à nous avec un concept. Ca nous a plu. Nous avons donc signé pour six numéros. Mais nous ne prenons pas des animateurs de M6 pour dire d’aller chercher des visages de cette chaîne. Ils ont chacun la légitimité de leur présence sur Paris Première. Heureusement que nous pouvons compter sur eux face aux exclusivités des uns et des autres...

Tony Cotte : Belle transition pour aborder le sujet de Thierry Ardisson... Les différentes campagnes publicitaires et la case horaire clin d’œil reflètent une véritable fierté de votre part de pouvoir compter sur ses services cette année encore. Peut-on dire que Thierry Ardisson est la valeur sûre de Paris Première ?

Jacques Expert : Thierry est une des valeurs sûres de la chaîne. Ca fait au moins huit ans qu’il est chez nous. C’est un animateur qui s’est réalisé sur notre antenne. C’est un monument de Paris Première. Il a un esprit cohérent avec le nôtre, à savoir impertinent, créatif et il est compétent dans son domaine. Nos animateurs maîtrisent toujours le sujet qu’ils abordent. Il y a une adéquation avec leurs univers, leurs personnalités et leurs compétences. C’est une constance sur notre chaîne.

Tony Cotte : Que nous réserve Paris Première en 2007 ?

Jacques Expert : Dans les nouveaux programmes phares, les téléspectateurs pourront retrouver la quotidienne de Michel Muller. De ce que j’ai vu des premiers tournages, c’est vraiment décapant ! Même s’il ne va pas parler de la campagne directement, il portera un regard distancé et ironique dessus. En parallèle, Paris Première va continuer à cultiver l’art de l’événement dont quelques-uns sont en prévision. Nous avons aussi mis en place en septembre une case « Art de vivre », dans laquelle va s’inscrire la future émission de Mélissa Theuriau. Cette case est une vraie réussite en terme d’audience. Dans cette plage, on peut retrouver des émissions comme La mode, la mode, la mode et Intérieurs qui réalisent 8% de part de marché. Suite à une étude, nous avons remarqué que notre public l’identifie comme une case haut de gamme. Nous allons donc continuer de l’enrichir en 2007.