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Popstars > Benjamin Chulvanij sans langue de bois

Tony Cotte
Publié le 06/10/2007 à 16:22 Mis à jour le 05/04/2011 à 15:52

C’est au volant de sa Mini Austin que le président du jury de Popstars répond aux questions de Toutelatele.com. Dans sa course à travers Paris, Benjamin Chulvanij revient ainsi sur le télé-crochet de M6 et la musique urbaine en général. Mais dès que l’on évoque les fuites sur la gagnante de l’émission, l’homme insiste lourdement, et même trop, sur le fait qu’il s’agit d’un groupe gagnant. Tentative de bluff ou confession à travers son kit main-libre, toujours est-il que Benjamin Chulvanij ne passe pas par quatre chemins. Interview sans langue de bois...

Tony Cotte : En tant que créateur d’Hostile Records, label exclusivement dédié à la musique urbaine, votre participation à un programme populaire comme Popstars est-elle un moyen pour vous de démocratiser davantage ce genre ?

Benjamin Chulvanij : J’ai commencé ma carrière dans le « music business » via la musique urbaine. Pour moi, c’est un genre populaire puisqu’il vient des quartiers et donc forcément de la classe moyenne. Bien sûr, je voulais démocratiser tout ça. Mais il y a longtemps que cela aurait dû l’être, surtout dans le paysage télévisuel français. Seule M6 a toujours défendu la musique urbaine à travers le Hit Machine ou la diffusion des clips. Aujourd’hui, c’est dans l’air du temps et le gouvernement de Sarkozy - avec une femme comme Rachida Dati - nous aide aussi. Les 15 ans de retard que nous avons avec les States sur l’intégration des anciennes colonies est faite et est représentée par la musique.

Tony Cotte : Par certains côtés, ce mouvement se voulait-il vraiment médiatisé ?

Benjamin Chulvanij : Aujourd’hui, il y a des élites de partout, notamment dans le rock. Quand une musique se « pop-ise » en créant des tubes qui se vendent et passent à la radio, c’est une musique qui, selon moi, va perdurer. Bien sûr, il y a des durs de durs, des gens underground. Mais on a une génération de jeunes qui ont grandi avec des titres urbains par des artistes américains mais aussi français comme Diam’s, Ärsenik, Leslie ou encore Vitaa. Cette jeunesse, qui devient un peu plus adulte, parle désormais aux nouvelles oreilles françaises.

Tony Cotte : N’avez-vous pas l’impression que le terme r&b est totalement galvaudé aujourd’hui et a perdu sa signification d’antan ?

Benjamin Chulvanij : On ne va pas faire du rhythm & blues à Popstars. Je cherche un côté pop dans le r&b. J’ai créé le label Hostile, et c’est ensuite la musique urbaine qui m’a permis de diriger un gros label comme Capitol où je me suis occupé de Norah Jones, Robbie Williams ou encore Coldplay. Pour les gens de l’underground, je suis le diable qui a dénaturé le hip hop. Moi je pense que c’est un mouvement populaire et tout le monde peut l’exploiter, ça ne me dérange pas.

Tony Cotte : Le dossier de presse de l’émission cite comme « star du r&b français », entre autres, Nâdiya, Willy Denzey ou encore Shy’m. Reconnaissez-vous cette définition ?

Benjamin Chulvanij : Nâdiya pas du tout ! C’est d’ailleurs mon gros problème avec le dossier de presse. Ce n’est pas parce qu’on est maghrébine, que l’on fait du R&B. Elle interprète de la variété française électronique au sens pur du terme. Quand elle a gagné une Victoire de la musique pour l’album rap/r’n’b/hip-hop de l’année face à un groupe comme Ärsenik que je représentais, j’étais énervé. Elle devrait être dans la même catégorie que Natasha St Pier. C’est insultant pour la musique urbaine et pour elle-même d’être cataloguée de la sorte sous prétexte qu’elle vient d’Afrique du nord. C’est une artiste de talent qui touche des consommateurs en France mais elle ne parle pas du tout aux jeunes.


Tony Cotte : Ne pensez-vous pas qu’il y ait un certain amalgame quand on voit les photos promotionnelles de l’émission où vous êtes à côté d’un hummer ou encore le O de Popstars orné de diamants. Ce côté bling bling est-il représentatif de ce que vous cherchez ?

Benjamin Chulvanij : C’est une Cadillac ! Il faut être précis parce que j’adore les grosses voitures (rires). Comme disait Marianne, il y avait la gauche caviar et maintenant la droite bling bling. Ce terme est un peu cliché mais ne me dérange pas du tout. J’assume cette image.

Tony Cotte : Au cours de l’interview accordé à Toutelatele.com, Sébastien Farran n’a cessé de parler de crédibilité. Sur la forme, Popstars fait tout de même très superficiel...

Benjamin Chulvanij : Je me suis occupé de Diam’s qui est le diminutif de diamant. Je n’arrive pas à voir le côté superficiel. La production a fait un énorme effort pour la décoration, on dirait un show à l’américaine. Je tiens à féliciter les équipes pour ça. Ce n’est pas parce qu’une lettre est en diamant dans le logo que nous ne sommes pas crédibles !

Tony Cotte : Les médias annoncent d’ores et déjà que le gagnant de l’émission est une jeune fille. Ne craigniez-vous pas de devoir faire face à des fuites comme c’était le cas pour Popstars 2 ?

Benjamin Chulvanij : Ces fuites et ces rumeurs sont très parisiennes, elles touchent très peu les français. Il y en a toujours eu. Une émission comme Koh Lanta est tournée en avril, chaque année on connaît les gagnants à l’avance et pourtant elle fait 8 millions de téléspectateurs. Ca n’empêchera jamais le public d’être au rendez-vous.

Tony Cotte : On a déjà pu voir votre caractère bien affirmé, notamment envers une fan d’Ophélie Winter dès les premières secondes de l’émission...

Benjamin Chulvanij : (il coupe) C’était une fille avec des petits problèmes psychologiques. En dehors des caméras, elle était aussi dérangeante que dérangée. Elle a mis ensuite des gris-gris sur la tête d’Ophélie Winter ! Pour moi, Popstars n’est pas une séance de dédicace mais un changement de vie pour certains et un début de carrière. J’ai fait ce casting d’une manière très pro.


Tony Cotte : En tant que producteur du futur disque issu de l’émission, ne craignez-vous de réitérer les déceptions des lauréats des dernières éditions ?

Benjamin Chulvanij : C’est mon métier. C’est là où je joue ma crédibilité. Mais je vais mettre tout mon réseau de l’urbain pour concocter des tubes et un disque crédible. J’ai envie de faire participer sur ce projet des grands noms du hip hop. Les français doivent regarder l’urbain d’un œil différent. On voit beaucoup dans le programme de « nouveaux français », comme dirait Amel Bent. Ce sont des gens issus des Antilles ou encore d’Afrique du Nord qui font la France d’aujourd’hui. Ce n’est pas parce qu’ils portent un baggy qu’ils n’aiment pas leur maman et qu’ils vont voler le sac d’une grand-mère. Des filles comme Vitaa vont s’ouvrir musicalement au fil des années, elles viennent toutes d’une base urbaine, elles ont écouté du rap étant jeunes et savent être dans le flow avec un rappeur. C’est toute cette culture que l’on a mise en avant avec ce Popstars.

Tony Cotte : Artistiquement, Nouvelle Star a réussi à enthousiasmer les journalistes de supports les plus frileux à ce genre de programmes comme Libération ou Technikart. Aviez-vous une pression particulière par rapport à ça lors des phases de castings ?

Benjamin Chulvanij : Du moment que ça me plait à moi et aux auditeurs, la presse je m’en fous. Si on devait signer des artistes en fonction des goûts des journalistes, on ne prendrait personne, surtout avec Libération. J’estime que c’est un fanzine, un truc qui se vend pas et qui casse sans arrêt. Je préfère que le public aime.

Tony Cotte : L’angle que les médias semblent apporter, ou du moins qu’on leur donne, est uniquement axé sur des tensions entre Ophélie Winter et Mia Frye. Est-ce une image que vous déplorez ?

Benjamin Chulvanij : Ca me fait vraiment chier car derrière on ne parle pas du programme, des 12 000 candidats et de l’équipe avec laquelle on a passé des super moments. C’est vraiment cliché mais j’ai vécu des moments incroyables avec certains artistes, cadreurs ou personnel au son. Jouer autour de Mia Frye et Ophélie Winter, ça ne m’intéresse pas. Un des candidats m’a même avoué qu’il trouvait ça « con » car les deux seuls qui se disputaient vraiment c’était Sébastien (Farran, ndlr) et moi. Après c’est de la presse people, il faut bien les faire manger... et bien qu’ils mangent !