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Rémi Faure (Directeur de la Programmation TF1) : « On va mettre environ 70 fictions de Noël à l’antenne sur TF1, dont une quinzaine totalement inédite »

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Directeur exécutif en charge des contenus
Publié le 25/11/2016 à 17:08 Mis à jour le 25/11/2016 à 17:10

TF1 a débuté la programmation des téléfilms de Noël le 14 novembre cette année, en devançant largement sa concurrente M6. Rémi Faure, directeur de la programmation de TF1, revient pour Toutelatele sur cette nouvelle stratégie, mais aussi sur l’éviction durant cinq semaines du soap historique de la chaîne, Les feux de l’amour. Rencontre.

Benjamin Lopes : Cette année, TF1 a démarré la diffusion des téléfilms de Noël dès le 14 novembre. Quelle est la stratégie de la chaîne ?

Rémi Faure : On a proposé un avant-goût à partir du 14 novembre avec un téléfilm de Noël chaque jour. Cela correspond au week-end post-Toussaint où Disneyland commence par exemple à installer ses décorations de Noël. De nombreux magasins ont aussi commencé à se mettre à l’heure de Noël. On s’est calé sur ce timing, car c’est le début de la ligne droite vers Noël. On procède en deux temps. Dès le week-end du 26 novembre, on propose également un téléfilm de Noël l’après-midi, et on double en quotidien dès le lundi suivant. Ce dispositif sera effectif jusqu’au début des vacances. Ensuite, on met une offre de cinéma l’après-midi, ce qui explique aussi que l’on commence plus tôt.

Quelle typologie de téléfilms de Noël proposez-vous au public de TF1 ?

On a deux typologies de téléfilms de Noël. Le premier avec les romances adultes, on les a toujours mis derrière Les Feux de l’amour, car on s’adresse à un public adulte et féminin. Et puis, il y a une typologie de téléfilms de Noël un peu plus familiaux, destinés à un public plus large. Nous en avons dans notre catalogue, mais ils étaient moins évidents à programmer sur TF1, car pas suffisamment en adéquation avec la case post-Feux de l’amour en semaine. L’idée d’en proposer le week-end va en ce sens. Programmer deux fictions par après-midi nous permet aussi de construire une case plus large ne s’adressant pas qu’à un public sortant des Feux de l’amour.

Est-ce à dire que Les feux de l’amour limitent réellement le panel des téléfilms diffusés juste après ?

On a fait une petite pause avec Les Feux de l’amour durant les vacances de la Toussaint pour avoir une offre de téléfilms l’après-midi qui s’adresse à un public familial. On a un peu de mal à programmer ces téléfilms là après Les Feux de l’amour, car ils engagent un public moins large en termes de cibles. On les exploite sur la TNT habituellement. Mais il était dommage de ne pas leur offrir une visibilité sur TF1. On essaie donc de mettre des titres un peu plus familiaux avec des problématiques un peu plus jeunes durant cette période précise.

« À la sortie de Noël 2015, on s’est posé des questions afin d’être totalement en phase avec le public »

Cette politique de programmation demande un stock de téléfilms plus important. Comment anticipe-t-on ce genre de décision ?

Ça s’est décidé il y a un an. C’est une demande de la programmation d’avoir un stock de téléfilms de Noël plus important auprès des acquisitions. On va mettre environ 70 fictions de Noël à l’antenne sur TF1, dont une quinzaine totalement inédite. L’année dernière, on en avait moitié moins. Ça s’anticipe donc. A TF1, on essaie de débriefer assez vite sur ce type de période, de ce qu’on a perçu. À la sortie de Noël 2015, on s’est posé des questions afin d’être totalement en phase avec le public. On a remarqué qu’il existait une appétence très importante pour les téléfilms de Noël dès la fin novembre. On voulait être au rendez-vous.

Par conséquence, TF1 a pris la décision de supprimer Les feux de l’amour durant cinq semaines, une première depuis les débuts du soap en 1989. Par quoi a été motivé cette décision ?

On y a réfléchi longuement, et je ne vais pas dire qu’on ne prend pas un petit risque. Les feux de l’amour est un programme auquel on tient particulièrement et dont les audiences se sont peu tassées, malgré la progression de la TNT sur ces tranches horaires. Ce feuilleton tient bien. L’année dernière sur cette période de Noël, il y a cependant eu une appétence pour les téléfilms de Noël, et la série a eu tendance à souffrir légèrement. On a un socle fort, mais une partie du public nous fait des infidélités à cette période pour aller chercher des romances de Noël. À la Toussaint, après la pause de deux semaines, le public des Feux de l’amour est revenu assez vite, c’est un bon signal pour nous.

M6 a atteint des records d’audiences Noël dernier face aux Feux de l’amour avec ses téléfilms. Cette situation a-t-elle finalement motivé TF1 à prendre ce risque ?

On a constate surtout qu’il y avait une demande du public. Quand Les feux de l’amour perdent trois à quatre points d’audience sur cette période de Noël, et qu’inversement les programmes de la concurrence connaissent un gros succès, on ne peut que le constater. Il faut aussi noter le succès des fictions de Noël sur TMC et NT1. On a fait une pointe à 14.4% auprès des femmes de moins de 50 ans responsables des achats le 13 novembre dernier. Donc c’est une vraie tendance générale. TF1 était en retrait dans son offre, et il fallait l’enrichir.

« Les feux de l’amour reviennent début janvier 2017. Et pour de bon »

Les feux de l’amour seront-ils bel et bien de retour en janvier 2017 ?

Les feux de l’amour reviennent début janvier 2017. Et pour de bon. On a vécu deux périodes exceptionnelles avec la Toussaint et Noël. On espère que le public fan ne nous en voudra pas trop. Ce n’est pas quelque chose qui va se réitérer à priori sur d’autres périodes.

Cependant, si les performances des téléfilms sont meilleures dans cette case, la diffusion des Feux de l’amour pourrait-elle être sérieusement remise en cause sur TF1 ?

L’idée n’est pas de remettre en cause la diffusion des Feux de l’amour. On fait attention aux audiences et ce sont des périodes très spécifiques. Le souhait est de poursuivre Les feux de l’amour qui est un programme fort de l’antenne. Il est dur de se projeter, car ce n’est pas l’exercice recherché. Ce n’est pas l’un ou l’autre, mais les deux.

Est-il possible de voir revenir sur la grille des programmes deux épisodes des Feux de l’amour par jour au lieu d’un épisode et demi remonté comme cela a été le cas en fin de saison dernière ?

Ça dépend du format des programmes que l’on a en access. Quand on a un jeu comme Money Drop qui est plus court que Bienvenue à l’hôtel, on a l’opportunité d’allonger le plaisir sur Les feux de l’amour avec deux épisodes. On a, par ailleurs, un retard par rapport à la diffusion américaine et on peut donc se permettre de le rattraper.

Parmi votre offre de fictions de Noël, un titre particulier se démarque-t-il tout particulièrement ?

On a acquis les droits du téléfilm A Christmas Melody, réalisé et avec la chanteuse Mariah Carey, mais aussi Lacey Chabert de la série La vie à cinq. Ça a été un beau succès sur Hallmark Channel aux États-Unis (4 millions de téléspectateurs, ndlr).

« Notre ligne éditoriale en matière de fictions est orientée vers l’adulte »

Les téléfilms sont arrivés sur TF1 le 2 janvier 2001. Après quinze ans, peut-on parler de repère historique sur TF1 ?

Véritablement. Le cinéma est très réglementé à la télévision. Dans notre jargon professionnel, on fait la différence entre un film de cinéma et un téléfilm. Aujourd’hui, je ne sais pas si c’est évident pour le grand public. Les téléfilms nous permettent de proposer une offre qualitative. C’est un plaisir quotidien qui change tous les jours. La règlementation étant ce qu’elle est, c’est une façon d’offrir des films au quotidien.

Si les téléfilms de TF1 sont leaders chaque après-midi, la chaîne a parfois traversé quelques zones de turbulences à cet horaire, hors période évènementielle. Comment l’expliquez-vous ?

Il y a environ deux ans et demi, un peu avant l’été, on a connu une période plus faible qui correspondait peut être à une qualité de production moindre et au fait que l’on avait accéléré les délais de rediffusion. On tournait à un écart de six à sept mois entre deux programmations, ce qui était un peu excessif, contre un an maintenant. On en a pris bonne note et on a amélioré l’offre. On propose désormais plus d’inédits.

Peut-on dire que la ligne éditoriale des téléfilms de TF1 est globalement axée vers le thriller ?

Tout à fait. Notre ligne éditoriale en matière de fictions est orientée vers l’adulte. On est dans une logique de programmation d’après-midi, Feux de l’amour / téléfilm, qui est plus adulte que celle de M6. Quand on a deux téléfilms qui s’enchaînent sans l’étape Feux de l’amour, c’est un peu différent comme je l’ai dit avant. On peut alors essayer d’aller chercher un public un peu plus large, plus familial, et un peu plus jeune notamment pendant les périodes de vacances dès 14 heures. Cette clé d’entrée Feux de l’amour contraint un peu l’offre qui la suit. Lorsque l’on a fait des essais avec des téléfilms plus jeunes après Les feux de l’amour, on a eu des échecs. Ces mêmes titres adossés à un autre téléfilm ont pourtant fonctionné.

TF1 a déjà identifié par le passé des cases téléfilms avec « Made in America » le jeudi soir, mais aussi « Hollywood Night » le samedi en seconde partie de soirée. La case de l’après-midi n’a jamais été identifiée en tant que tel. Quelle en est la raison ?

Il est vrai que cette case n’est pas marketée tout au long de l’année. Ceci dit, sur les périodes de Saint-Valentin, on fait une semaine spéciale avec des romances par exemple. Quand on travaille sur des périodes spécifiques, on trouve plus judicieux de communiquer. Notre principal levier marketing, c’est ce que l’on fait en ce moment avec de belles bandes-annonces. Une seconde bande-annonce spéciale présente cette offre de double-téléfilm chaque jour sur la chaîne.

« Quand on programme 700 téléfilms sur les antennes du groupe TF1, il faut savoir gérer les titres avec la saisonnalité »

Concernant la programmation, vous rediffusez les téléfilms un an après, quasiment jour pour jour, contre dix-huit mois en moyenne sur M6. Pourquoi ce choix ?

Ce n’est pas un réel choix. Cela découle plutôt des objectifs de rotation que l’on se fixe pour ne pas diffuser des titres trop proches. On peut avoir un panier un peu plus large quand on se permet de diffuser des fictions de qualité un peu moindre. Ce n’est pas notre cas. De facto, un an après, ça tombe à la même période. Quand on programme 700 téléfilms sur les antennes du groupe TF1, il faut savoir gérer les titres avec la saisonnalité. L’été, on propose des titres avec un peu plus de lumière et des mariages par exemple, alors que l’hiver on diffusera plus des thrillers. Il y a une réalité saisonnière qui explique cette stratégie.

Vous avez diffusé quelques téléfilms en prime time sur HD1. Peut-on imaginer que ces fictions faisant le succès de TF1 l’après-midi puissent avoir une véritable seconde fenêtre d’exposition au sein du groupe ?

Absolument. On a fait des premiers tests sur HD1 et on a été les premiers avec cette typologie dans le contexte de l’Euro au mois de juin dernier. Ça a très bien marché. Les plus gros titres dont on dispose dans notre catalogue pourraient être diffusés en prime time, c’est quelque chose que l’on a envie de reproduire.

Des mini-séries sont parfois diffusées dans la case du téléfilm de l’après-midi. Pourtant, il est plus rare de voir des séries de téléfilms sur TF1, à l’inverse de M6. Est-ce une contrainte qui découle de vos deals avec les distributeurs ?

Nous n’en avons tout simplement pas l’opportunité. On le ferait avec grand plaisir, d’autant plus lorsqu’on a deux téléfilms qui se suivent. On a notamment proposé Les enfants du pêché la saison dernière. Sur les séries testées, comme Deception, ça correspond plus à une consommation particulière, face à une concurrence particulière. Ce n’est pas quelque chose que l’on veut particulièrement reproduire.

On retrouve essentiellement des téléfilms américains et canadiens sur TF1. La chaîne se refuse-t-elle à diffuser des téléfilms européens, notamment allemands où l’offre est riche ?

On en programme quelques-uns, notamment le mercredi au printemps dernier. Objectivement, la qualité n’est pas la même. Pour le coup, M6 en fait un peu plus que nous. On n’en fait pas un dogme du tout, on regarde tout. On essaie d’être très sélectif pour diffuser les meilleurs téléfilms. On n’est donc fermé à aucune acquisition, au contraire.