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Thierry Ardisson : un dernier dîner pour la route

Thibaut Lescuyer
Publié le 12/06/2007 à 12:24 Mis à jour le 27/05/2022 à 00:41

Ce mardi à 22h30, Thierry Ardisson investira une ultime fois l’appartement du 93, Faubourg Saint Honoré pour son émission du même nom. Pendant 4 ans, l’animateur le plus impertinent de la télé a reçu à sa table tout le gotha parisien : écrivains, politiques, chanteurs, comédiens, animateurs sont venus festoyer chaque semaine autour d’un thème original (personnes de télé, dîner indien, foot...) Diffusé en deuxième partie de soirée, ce dîner infiniment select et branché est rapidement devenu l’un des programmes emblématiques de Paris Première, au même titre que Ca balance à Paris et Intérieurs. Si bien que Thierry Ardisson a eu bien du mal à se séparer de son « bébé ». Chronique d’une histoire d’exclusivité mouvementée.

Début de l’été 2006, l’animateur se résigne à abandonner Tout le monde en parle, son émission sur France 2. Forcé de respecter la nouvelle clause d’exclusivité érigée par Patrick de Carolis, le Président de France Télévisions, Thierry Ardisson choisit de conserver son 93, Faubourg St Honoré plutôt que de continuer son talk show sur le service public. L’occasion pour ce provocateur de montrer que c’est aussi un homme d’honneur, en privilégiant Paris Première, une chaîne qui lui a tendu la main alors qu’il traversait une période de disette télévisuelle. Depuis, l’ancien présentateur de Double jeu a rebondi en rejoignant Canal+ pour Salut les terriens et se retrouve ainsi de nouveau confronté à la clause d’exclusivité. Cette fois, Thierry Ardisson argue avoir été informé au préalable par les dirigeants de Canal+ et se dispose à se séparer de son 93, Faubourg Saint Honoré.

Annoncé pour lui succéder, Karl Zero ne reprendra finalement pas l’émission. Nicolas de Tavernost, président du groupe M6 et propriétaire de Paris Première, en a décidé ainsi en choisissant d’appliquer la même règle que pour Thierry Ardisson. Comme l’ex-présentateur du Vrai Journal sévira ponctuellement l’année prochaine sur la chaîne cryptée avec une série de documentaires dans la veine de son dernier film sur Jacques Chirac, la clause d’exclusivité stipule qu’il ne pourra pas non plus se produire sur Paris Première.

Après le refus de Frédéric Beigbeder qui s’est vu proposer une augmentation par Canal+, Péri Cochin, la chroniqueuse de la bande à Laurent Ruquier, semble désormais tenir la corde pour prendre la relève. Une autre éventualité n’est cependant pas à exclure : si la chaîne ne trouve pas une personnalité qui la convainc, le concept ne sera tout simplement pas reconduit.

Pour cette dernière du mardi 12 juin - rediffusée le 17 juin à 7h30 pour les lève-tôt, Thierry Ardisson a concocté une émission dont la thématique « côté cuisine » proposera de dévoiler l’envers des fourneaux. L’occasion pour l’homme en noir de convier ses amis : son fidèle « irrévérencieux vanneur professionnel », Laurent Baffie, accompagné de Laurent Boyer, Faustine Bollaert, Patrice Carmouze, Guillaume Durand, Laurence Boccolini, Geneviève de Fontenay et Julia Migenes.

Désormais, Thierry Ardisson n’enfilera plus ses invariables costumes noirs que sur Canal+. Depuis le 4 novembre 2006, il se consacre en effet à son nouveau rendez-vous diffusé en clair chaque samedi soir. Tout droit inspiré du Daily Show retransmis sur la chaîne américaine Comedy Central, Salut les terriens, propose « l’actualité de la semaine en 50 minutes », un 7 sur 7 à la sauce Ardisson, complètement déjanté mêlant interviews décalées et autres facéties « ardissonniennes ». En témoigne sa rubrique, « le champion de l’actu » où des questionnaires mixant informations véridiques et purs délires (signés par Kader Aoun un de ses auteurs fétiches) viennent solliciter les zygomatiques des invités et du téléspectateur. Par ailleurs, le très border-line Stéphane Guillon signe chaque semaine des revues de presse empreintes, comme à l’accoutumée, de cynisme et d’impertinence.

Magnétos insolites, jingles et autres gimmicks chers à Thierry Ardisson sont évidemment de la partie. L’homme en noir sait s’y prendre : son passé de publicitaire (on lui doit certains slogans célèbres comme « Quand c’est trop, c’est Tropico ! ») lui a permis d’écumer bon nombres d’astuces pour séduire, marquer et fidéliser le téléspectateur. Il ne manque pas de les appliquer consciencieusement dans chacune de ses émissions.

Avec moins d’un million de téléspectateurs séduits - soit 5% de part de marché, Salut les terriens a trouvé son public. La chaîne peut même se targuer d’afficher ses meilleures performances sur la case du samedi depuis 1999. Le 3 mars, Canal+ a même réalisé sa meilleure audience depuis 8 ans sur cette case le 3 mars 2007. Aujourd’hui, en cette fin de saison, l’audience est en léger repli (750 000 fidèles en juin).

Salut les terriens ne parvient cependant pas à égaler les très bon scores du Grand Journal de Michel Denisot qui a rassemblé en moyenne 1.25 millions de téléspectateurs depuis le début du mois. Et encore moins à rivaliser avec 50 min inside, On a tout essayé... même sans le patron ou le 19/20, ses concurrents directs sur les autres chaînes. Il en faudra cependant beaucoup plus pour démoraliser un Thierry Ardisson qui peut désormais entièrement se consacrer à son talk show du samedi soir...