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A la rencontre de Bernard de la Villardière, le journaliste choc de M6

Tony Cotte
Publié le 02/09/2007 à 12:11 Mis à jour le 07/04/2011 à 17:10

Hier, Ca me révolte ou encore Zone Interdite, aujourd’hui Enquête exclusive, Bernard de la Villardière aime informer et n’a pas peur des risques. Pour la première de la rentrée, Enquête Excusive a suivi Thierry Gaetan, journaliste parvenu à infiltrer un réseau de narcotrafiquants colombiens. Bernard de la Villardière revient sur cette impressionnante aventure produite par Ligne de Front, sa société...

Tony Cotte : Ce 2 septembre, vous proposez une Enquête Exclusive, consacrée aux « Kamikazes du trafic de cocaïne » dont vous êtes producteur. En quoi ce documentaire se distingue des autres sur la même thématique ?

Bernard de la Villardière : On a une exclusivité. Thierry Gaetan, le réalisateur, a infiltré un réseau de passeurs de cocaïne. Il connaît bien la Colombie. Il a fait savoir autour de lui - et dans des milieux pas forcément recommandables - qu’il était candidat pour un passage. Avec une caméra cachée, il montre des images d’un passeur qui ingère des capsules de cocaïne. C’est ce qui fait la force de ce reportage. Nous avons également interrogé un jeune prisonnier français à Bogota pour trafic de stupéfiants et nous avons démantelé un laboratoire en pleine jungle avec les forces anti-narcotiques.

Tony Cotte : Le 1er avril 2007, Enquête Exclusive proposait déjà un sujet sur l’héroïne en Afghanistan où des membres de votre équipe ont révélé en caméra cachée le marché de la drogue. Pourquoi refaire aussi rapidement une émission sur un thème quelque peu similaire ?

Bernard de la Villardière : Ce n’est en rien similaire. L’héroïne en Afghanistan n’est pas la même problématique que la cocaïne en Colombie. La drogue aujourd’hui est un problème de santé publique, de sécurité et d’ordre économique. Avec le chômage, la drogue est une des premières préoccupations des français. Ce n’est pas impossible que nous fassions prochainement une émission sur le cannabis.

Tony Cotte : Après avoir été au Darfour, on peut dire que vous prenez des risques. Au-delà d’un besoin d’informer, êtes-vous attiré par le danger ?

Bernard de la Villardière : J’ai souvent pris des risques dans ma vie. Pour le coup, il était calculé, je n’étais pas tout seul. Mais effectivement, j’aime assez le danger.

Tony Cotte : La direction de M6 vous suit-elle toujours quand vous leur faites de telles propositions ?

Bernard de la Villardière : Elle n’est pas forcément au courant. J’ai une certaine liberté. J’ai 49 ans pas 25. Ils savent que je fais attention. Et puis, je suis père de quatre enfants...

Tony Cotte : Quand vous vous rendez sur un lieu où une semaine auparavant un hélicoptère et neuf policiers ont été abattus, il faut plus que de l’attention !

Bernard de la Villardière : J’avais un gilet pare-balles comme tout le monde. Nous sommes restés 10 minutes sur place. C’était la règle. Au-delà, il y a des risques que les trafiquants évanouis dans la jungle reviennent avec des renforts.


Tony Cotte : Lorsque vous infiltrez ce réseau en Colombie, on voit le journaliste poser un tas de questions, il y a eu quand même eu une énorme prise de risques...

Bernard de la Villardière : Il était stressé et a manifesté son stress. C’était tout à fait crédible avec son personnage. Il a feint l’angoisse. Il était dans la peau d’un homme qui ne demandait qu’à être rassuré en posant des questions et donc obtenir un maximum d’informations. Il a été excellent comédien.

Tony Cotte : Pourquoi avoir flouté le visage des trafiquants ?

Bernard de la Villardière : (il hésite) Parce que nous ne sommes pas les flics. C’était une « présomption d’innocence ». Etant donné que c’est imposé en France, il n’était pas question qu’on ne le fasse pas à l’étranger.

Tony Cotte : Sans révéler tout ce qui va se passer au cours de l’émission, il n’est pas précisé en revanche si vous aviez dénoncé le réseau après l’avoir infiltré ?

Bernard de la Villardière : Nous ne l’avons pas dénoncé (silence). Ce n’est pas notre boulot. Encore une fois, nous sommes journalistes, pas flics.

Tony Cotte : D’une certaine manière, vous cautionnez donc ce trafic !

Bernard de la Villardière : Notre métier est de dénoncer par l’image, les faits et le récit. La question n’est pas là. Si on fait tomber un réseau de ce genre, il se reconstitue. Le problème est d’ordre géo-politique. Il est d’ailleurs en train d’être résolu au niveau militaire en Colombie.

Tony Cotte : Vous aviez déclaré à l’époque de Ca me révolte que tous les sujets que vous traitiez vous révoltait personnellement. Aujourd’hui dans Enquêtes Exclusives, on retrouve également des reportages sur des thèmes à scandales comme la pédophilie ou encore le trafic de drogue. Votre société de production se nomme « Ligne de front », un terme assez fort. Finalement, Bernard de la Villardière n’est-il pas un être profondément révolté ?

Bernard de la Villardière : Je dirai que je déteste simplement l’injustice. Un des rôles du journaliste est de mettre ses mains dans les plaies, de dénoncer les incohérences et porter à la connaissance des autres la souffrance qu’il peut exister un peu partout dans le monde pour faire en sorte que les politiques la répare.


Tony Cotte : Quand le magazine Entrevue consacre plusieurs pages sur le présumé bidonnage d’un de vos reportages, comment réagissez-vous ?

Bernard de la Villardière : Je réagis en les traînant en justice. J’ai déjà gagné une fois contre eux. L’affaire est dans les tribunaux. (silence) Je trouve insupportable, voire indécent, d’avoir des pseudos leçons de déontologie de la part d’un torchon.

Tony Cotte : On vous connaît journaliste, rédacteur en chef, producteur et également chroniqueur lorsqu’en février dernier vous avez interviewé les candidats à l’élection présidentielle dans l’émission 5 ans avec.... Que retenez-vous de cette expérience ?

Bernard de la Villardière : Ca m’a donné l’occasion d’interroger les candidats à l’élection Présidentielle, je crois sans complaisance. C’était une expérience à la fois humaine et journalistique intéressante.

Tony Cotte : On a vu que l’entretien avec François Bayrou s’est déroulé avec quelques accroches. Regrettez-vous que cela ait eu lieu de la sorte ?

Bernard de la Villardière : Pas du tout. Il a été agressif avec d’autres journalistes. Il a fait une campagne un peu lepeniste. C’était dans sa stratégie de candidat de s’en prendre aux journalistes puisque c’est un démagogue. J’ai été surpris par son agressivité. Il s’en est pris à moi pour ce que je représentais. J’ai trouvé cela assez détestable.

Tony Cotte : Allez-vous continuer à produire avec Ligne de front pour la jeune génération comme le magazine de T-Miss sur NRJ12 ?

Bernard de la Villardière : Le magazine Génération n’est, a priori, pas renouvelé. T-Miss d’ailleurs voulait faire autre chose. Elle est plus divertissement qu’info. Mais nous allons continuer à travailler avec NRJ12

Tony Cotte : Quels sont vos autres projets ?

Bernard de la Villardière : On va continuer avec Enquêtes Exclusives. On prépare actuellement un sujet sur l’islamisme mais je ne peux pas trop en révéler. Je suis lié par une clause de confidentialité avec M6.

Tony Cotte : Une enquête sur l’Islam ! Ne craignez-vous pas des représailles ?

Bernard de la Villardière : Je pense que c’est, en effet, une émission qui va déranger. Mais nous sommes là pour ça. Je n’ai pas peur des représailles, ça fait partie de mon métier.