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Arnaud Poivre d’Arvor mène l’enquête

Tony Cotte
Publié le 04/11/2008 à 16:12 Mis à jour le 04/06/2010 à 17:06

Faîtes entrer l’accusé, Faits divers le mag, Enquêtes criminelles... le genre est plus que jamais à l’honneur dans le paysage audiovisuel. Pourtant, France 2 n’hésite pas à proposer son nouveau magazine, Non élucidé. A ses commandes, Arnaud Poivre d’Arvor et à nouveau en lumière une affaire criminelle en compagnie de Jean-Marc Bloch, grand enquêteur criminel et ancien patron de la SRPJ de Versailles. L’animateur / producteur est bien décidé à se faire un nom malgré la surmédiatisation actuelle de son patronyme. Retour avec l’intéressé sur sa nouvelle émission, son père et ses projets...

Tony Cotte : A partir du 4 novembre, on vous retrouve aux commandes de Non élucidé, un magazine de faits divers. Les comparaisons avec Faites entrer l’accusé sont-elles inévitables ?

Arnaud Poivre d’Arvor : Elles sont inévitables pour un magazine de faits divers, a fortiori en étant diffusé dans la même case horaire. La comparaison s’arrête en revanche ici : nous ne traitons que d’affaires non résolues à l’inverse de Faites entrer l’accusé. Nous sommes complémentaires...

L’émission de Christophe Hondelatte est pourtant déjà revenue sur certaines affaires dont l’identité du meurtrier n’a pas été clairement identifiée comme pour le petit Grégory, Ranucci ou encore le cas Patrick Dills...

Il s’agit de gros dossiers médiatiques. Nous n’irons pas sur ce type d’affaires. Nous ne connaissons pas la fin de l’histoire, la part de mystère est donc plus importante. La réalisation de Non élucidé est également différente : nous sommes en situation, sur les lieux mêmes des événements et je suis accompagné tout au long de l’émission d’un ancien grand flic (Jean-Marc Bloch, ndlr) qui apporte toute sa légitimité d’enquêteur criminel.

La démarche n’est-elle pas un peu présomptueuse de vouloir ouvrir des dossiers qui ont déjà été traités par des professionnels ?

Notre approche est en réalité très modeste. L’idée n’est pas d’ouvrir des affaires et de concurrencer les services d’enquêtes mais de mettre à nouveau en lumière et réveiller les mémoires. Nous faisons ensuite un appel à témoin directement en relation avec les services concernés. Il ne faut pas oublier que les enquêtes sont toujours en cours, même si elles sont moins actives ou, dans un certains cas, dans l’impasse.

Vous sollicitez la participation des téléspectateurs en fin de chaque émission, allez-vous en revanche assurer un suivi ?

L’idée est d’avoir un droit de suite. On souhaite que les choses puissent avancer, mais encore une fois nous restons très modestes. A aucun moment nous prétendons résoudre l’affaire, cela n’aurait aucun sens. Des appels à témoins il y en a de plus en plus via les journaux télévisés et sur des sujets de deux ou trois minutes. Notre émission en dure pratiquement quatre-vingt-dix, nous avons le temps de revenir sur les faits et de provoquer de nouveaux témoignages.

Vous parlez certes de modestie, mais, sur le plan personnel, votre objectif n’est-il pas d’arriver à un dénouement ?

Au fond de moi, j’espère qu’il se passera quelque chose au moins sur une affaire traitée. Nous n’avons pas du tout le même investissement que les enquêteurs ou les magistrats, mais nous sommes en contact avec la famille. Forcément il y a une envie de faire bouger les choses. Je suis très sensible à la souffrance de ceux qui ont perdu un proche.

La série Les Experts et la tendance pour les programmes sur les affaires criminelles ont-t-elles été une influence pour la conception de Non élucidé ?

Je regarde beaucoup les séries policières. J’apprécie énormément Esprits Criminels, c’est une source d’inspiration au même titre que Cold Case. Au delà de ça, la fiction c’est très bien, mais il s’agit ici de réalité. Quand on parle du meurtre d’un enfant face aux parents, les enjeux sont forcément différents.


Dans Dossier Scheffer sur France 5 en 2006 et Babylone sur France 2 lors de l’été 2007, vous reveniez également sur les étapes de différentes investigations. Il semblerait que ce thème vous tienne particulièrement à cœur...

Je suis une personne curieuse. La recherche de la vérité dans la grande Histoire ou dans les faits divers m’intéresse. J’accepte parfaitement l’étiquette d’ « animateur enquêteur ». J’aime l’idée de l’enquête, d’aller sur les lieux et de ressentir les choses.

Se rendre sur les lieux d’un crime peut aussi être à double tranchant. Ne risque-t-on pas de parler de « curiosité malsaine » pour Non élucidé ?

Pour la première, nous nous sommes rendus dans la colonie de vacances où le petit Jonathan a été enlevé, dans la chambre même où se sont passés les faits et sur un petit étang à l’intérieur d’un manoir, là où le corps a été retrouvé. L’idée est d’être plus près et de rendre les choses concrètes tout en essayant de bien percevoir ce qu’il a pu se passer. Non élucidé a cette volonté d’apporter une pédagogie de l’enquête pour comprendre la réalité. Bien sûr, il faut être prudent.

Les téléspectateurs vous ont découvert devant la caméra avec des one-shot en première partie de soirée sur France 2 en 2001 suivi, un an plus tard, de l’actualité people sur Match TV. Avec le recul, comment considérez-vous ce début de parcours ?

C’était des débuts un peu ... (rires). C’était culotté de faire du prime time alors que je n’avais pas beaucoup d’expérience. J’avoue que je suis content de ce que je fais aujourd’hui. Depuis mes débuts, l’écriture magazine me passionne. Mon métier est plus celui de producteur, ma carrière d’animateur est un plus. Je préfère concevoir des émissions et essayer de les vendre.

Face à L’île de la tentation, Babylone n’est parvenue à réunir un large public en seconde partie de soirée sur France 2. En tant que producteur, êtes-vous plus confiant pour l’avenir de Non élucidé ?

Babylone était un magazine sur l’Histoire diffusé en plein été face au carton de l’île de la tentation sur TF1. J’en suis toujours fier mais Non élucidé a, je pense, plus de chance de fonctionner, la thématique du fait divers étant plus porteuse. J’ai bon espoir et j’ai très envie de continuer cette aventure. J’ai vraiment le sentiment de travailler sur quelque chose d’utile.

Combien de temps la chaîne vous laisse-t-elle pour vous installer ?

Ils vont juger sur les performances de la première émission. Les choses peuvent s’arrêter tout de suite. Ce serait dommage mais aujourd’hui on ne laisse plus beaucoup de temps, même si le service public est censé être plus indulgent. Je ne suis pas en access, l’émission doit fonctionner immédiatement et c’est difficile...

L’objectif de Babylone était fixé à 15% de part de marché. Il y a-t-il également un seuil à atteindre pour Non élucidé ?

Il y a une barre psychologique, mais je ne veux plus prendre le risque de la dévoiler. Avec France 2, nous n’avons en revanche cité aucun chiffre, je sais simplement que nous n’avons pas droit à un score moyen, juste à une belle performance. L’ambition est de créer une collection avec 7 à 8 numéros sur l’année, voire même un rythme mensuel. Trouver une alternance avec Faites entrer l’accusé serait intéressant. Nous travaillons sur deux autres numéros de Non élucidé en stade de développement. L’audience de la première lancera ou non le tournage...


Votre retour à l’antenne de France 2 correspond à une période où jamais le patronyme Poivre d’Arvor n’a été autant médiatisé. Habile stratégie ou pure coïncidence ?

Je ne sais pas si c’est une bonne ou mauvaise chose mais il s’agit vraiment d’une coïncidence. L’émission aurait même dû être programmée avant l’été mais il y a eu du retard dans la production. En terme de communication, je ne mise pas là-dessus, je vais avoir de toute façon du mal à lui voler la vedette (rires).

Votre soeur a réalisé un portrait de votre père pour la collection Empreintes, le 17 octobre dernier sur France 5. Certaines critiques, dont Télérama, n’ont pas hésité à parler de « pur exercice d’autocélébration complaisante ». Qu’en avez pensé ?

Télérama a toujours eu la critique un peu facile. Il faut savoir de quoi on parle : Empreintes met en avant une personnalité qui se raconte. Il n’y a pas de commentaires, ce n’est pas un programme à décharge de son sujet. J’ai vu l’émission, c’est le regard d’une fille sur son père et j’ai trouvé cela proche du personnage que je connais dans sa vie quotidienne

Auriez-vous pu en faire de même ?

Je ne pense pas. Je m’entends très bien avec mon père, mais j’ai besoin d’exister de mon côté. Ce n’est pas couper le cordon... (il hésite) j’ai grandi dans la même sphère, c’est déjà suffisant. La comparaison est souvent faite, je n’ai pas envie d’aller plus loin.

Pour conclure sur ce sujet, estimez-vous avoir suffisamment de recul par rapport à toute la situation avec votre père...

... J’ai tout de suite compris que c’était une bêtise. Je ne suis peut-être pas objectif, mais j’étais là lors de son dernier journal. J’ai vu comment la rédaction a réagi, c’était extrêmement émouvant. Il a peut-être des défauts, mais dans ce domaine il excelle. Je ne comprends pas pourquoi TF1 s’est passée de son meilleur joueur, ce n’est certainement pas pour des raisons commerciales. Une erreur de stratégie que TF1 paye aujourd’hui. Pour ma part, j’ai été triste et extrêmement en colère.

Pour vos projets, on parle d’une émission sur l’Histoire avec Stéphane Bern. Pouvez-vous en dire davantage à ce sujet ?

Nous discutons ensemble. Nous avons évoqué l’Histoire, le patrimoine ou encore la généalogie. Pour le coup, les influences sont les programmes anglais Nous allons présenter le ou les programmes en question aux chaînes du groupe France Télévisions...