César / Victoires / NRJ Music & Co : une déferlante de cérémonies
Depuis de nombreuses années, les cérémonies ont fait leur apparition dans le paysage audiovisuel français. Influencées par la culture américaine, ces remises de prix constituent une valeur sûre pour les diffuseurs. Et bien que l’impartialité des différents palmarès soit souvent remis en question par les téléspectateurs, ceux-ci affluent pour suivre l’événement derrière leur poste de télévision.
Si les remises de prix sont majoritairement récentes en France, elles existent depuis de nombreuses décennies outre-Atlantique. La plus populaire reste incontestablement celle attribuée par l’Academy of Motion Picture Arts and Sciences, plus connue sous le nom d’Oscars. La cérémonie récompense chaque année, depuis 1928, les meilleurs films sortis aux États-Unis ainsi qu’un éventail de professionnels du 7ème art à travers diverses catégories. Avec plus de 40 millions de fidèles chaque année, les Oscars reste la remise de prix la plus regardée mais également un des divertissements les plus suivis outre-Atlantique derrière le Superbowl ou encore les Jeux Olympiques. Considérés comme une sorte de « pré-Oscars », les Golden Globes ont lieu quelques semaines avant et priment, à leur tour, les productions cinématographiques mais également télévisuelles par les membres de l’association hollywoodienne de la presse étrangère. Quant aux Emmy Awards, ils concernent exclusivement le petit écran et sont décernés par l’Academy of Television Arts & Sciences. Les Golden Globes et Emmy Awards réalisent chaque année une audience similaire, aux alentours des 20 millions de téléspectateurs.
Si les productions du grand comme du petit écran sont à l’honneur chaque année, la musique n’est pas en reste. En effet, depuis 49 ans les Grammy Awards, renommés par certains comme les Oscars musicaux, gratifient les oeuvres discographiques. Ancré dans la culture américaine, cet événement est une aubaine à la fois pour le marché du disque et le diffuseur de la cérémonie, CBS, puisque le programme attire en moyenne plus de 20 millions de téléspectateurs. Les autres manifestations similaires sont les American Music Awards et Billboard Music Awards, moins populaires en France.
Retour en France. Considérées comme les « Grammy Awards français », les Victoires de la Musique décernent depuis 1985 différents prix aux productions musicales. Si aux débuts des années 90, près de 9 millions de téléspectateurs étaient au rendez-vous, aujourd’hui la cérémonie a bien du mal à fédérer un large public avec des audiences en dent-de-scie. Ainsi, en 2004, 3.3 millions de fidèles étaient présents sur France 2, soit 18.5% de part marché entre 21 heures et minuit. Une performance identique aux 17èmes Victoires de la Musique en 2001. L’an dernier, la chaîne publique a connu un sursaut de son audience en rassemblant quelques 4.2 millions de téléspectateurs, soit 24.6% du public présent devant son petit écran. Longtemps considérée comme une cérémonie élitiste, longue, voire soporiphique, France 2 a décidé depuis quelques années de redynamiser ce divertissement. Pour ce faire, le public a été amené à déterminer les gagnants dans certaines catégories par le biais d’un appel ou d’un sms surtaxé. Une opération contestée par certains puisque les maisons de disques pourraient, à ce moment là, investir dans les votes. Hypothèse d’autant plus plausible aux vues des « effets Victoires » sur les ventes d’albums. Autre action pour rajeunir l’événement : un habillage futuriste, la présence d’une voix-off, un temps de parole limité à une minute pour les différents intervenants et un nouveau décor. Cette version « new look », comme se plaît à l’appeler Patrick de Carolis, fera son apparition samedi 10 mars prochain à 20h50 sur France 2.
Les NRJ Music Awards sont, quant à eux, l’ « anti-Victoires de la Musique ». Si ces dernières ont pour objectif de mettre en avant l’éclectisme de la scène musicale française, la remise des prix de TF1 accorde exclusivement le choix aux téléspectateurs d’élire leurs préférés parmi un panel d’artistes plus accessibles au grand public et que l’on peut entendre sur NRJ. Diffusée environ un mois avant la célèbre remise des prix du service public, cette cérémonie permet à la chaîne privée d’attirer en masse les cibles jeunes. Le 20 janvier dernier, TF1 rassemblait 6.5 millions de téléspectateurs, soit 62.6% de part de marché auprès des 15/24 ans, et 54.4% sur les 15/34 ans. Face à ce succès, le groupe NRJ décline en 2004 une version cinématographique, intitulée les NRJ Ciné Awards. Mais l’événement doit se contenter d’une exposition moindre n’étant diffusée que sur la TNT via NRJ12. Avec des catégories ciblées pour un public jeune (« Meilleure fin qui tue », « Meilleur film qui fait rire » ou encore « Meilleure zic de film »), les lauréats de cette cérémonie restent exclusivement les longs métrages ayant atteint les sommets du box-office. Là encore NRJ lance son offensive face à une cérémonie historique, à savoir les César.
Ainsi, les films plus confidentiels boudés par les médias populaires, sont souvent distingués par l’académie des César. Exemple, en 2005, le film l’Esquive de Abdellatif Kechiche (moins de 150 000 entrées en salle) a collecté quatre récompenses dont celle du « Meilleur Film » face aux mastodontes 36 Quai des Orfèvres, Les Choristes ou encore Un long dimanche de fiançailles ! Pour sa 32ème édition, la nuit des César sera diffusée samedi 24 février en clair sur Canal +. L’an dernier, près de 2.5 millions de cinéphiles étaient au rendez-vous, soit 13.6% du public présent devant leur petit écran. Ce soir là, la chaîne avait même réalisé une part de marché identique à celle de TF1 et son Royaume. Pour cette nouvelle cérémonie, Valérie Lemercier endosse à nouveau ses habits de maîtresse de soirée en direct du Théâtre du Châtelet. Quant à Laurent Weil, il aura la tâche de présenter l’avant et après César, avant de s’envoler pour Los Angeles et commenter en direct la 79ème cérémonie des Oscars.
Loin de ces institutions, les chaînes du câble, du satellite et de la TNT ont, elles aussi, voulu surfer sur la vague des remises de prix. Nés l’an dernier sous les auspices du Sénat, les Globes de Cristal permettent à plus de 3000 journalistes de la presse culturelle de désigner leurs œuvres favorites dans des domaines aussi variés que le théâtre, la danse, la mode ou encore les arts platiques. Diffusée le lundi 5 février dernier en direct du Lido et sur Paris Première, la soirée a été présentée par le duo Elisabeth Quin / André Manoukian. Le même soir, Europe2 TV dégaînait sa première Année du Hip-Hop en direct de l’Olympia. La cérémonie, confiée à Yassine Belattar, a ainsi récompensé les différentes productions en matière de musiques urbaines. Une version française des BET Awards, retransmis une semaine auparavant sur MTV.
Jamais les remises de prix n’auront été aussi nombreuses. A quelques jours des César et Oscars, ont lieu ce soir, jeudi 22 février, les Gérard du Cinéma qui vont décerner les prix, sur fond de satire, aux réalisations les plus mauvaises du grand écran cette année. Privée de diffuseur, la manifestation se tiendra au Réservoir mais pourra compter sur un écho important dans la presse étant donné que les membres du jury sont composés, entre autres, de journalistes de Technikart, Têtu, Voici, Closer ou encore Marianne. Et le phénomène cérémonie ne s’arrête pas là : les Jeunes Talents, récompensent, comme le nom l’indique, les espoirs dans diverses catégories culturelles. Quant aux Filles TV - Jeune & Jolie Awards ils permettront aux téléspectatrices de Filles TV et aux lectrices de Jeune & Jolie de plébisciter, le 8 mars prochain, les différentes artistes féminines.
L’ensemble de ces remises de prix - longtemps qualifiées de désuètes - semblent bel et bien revenues au goût du jour. Si bien que les chaînes de télévision n’hésitent pas à les multiplier et les décliner à toutes les sauces sur leurs antennes. Malgré tout, certaines ne résistent pas aux différents conflits entre chaines ou personnes. Ainsi, les rituels 7 d’or sont enterrés depuis maintenant 2003. Mais qui sait, peut-être vont-ils prochainement renaître de leurs cendres...