Toutelatele

Elodie Frégé

Tony Cotte
Publié le 27/09/2006 à 00:53 Mis à jour le 14/03/2010 à 18:14

Il est loin le temps où Elodie entonnait « Eye of the Tiger » sur le plateau en feu de la Star Academy. La victoire en poche, la Nivernaise a su faire preuve de détermination et de talent pour faire entendre sa voix. Après un premier album passé plus ou moins inaperçu, aujourd’hui Elodie Frégé ne laisse pas la critique frigide. Avec le soutien de son mentor Benjamin Biolay, celle qui pleurait au château de
Dammaries-lès-Lys devient en 2006 une égérie sixties. Entretien en plein coeur du 5eme arrondissement parisien avec la nouvelle Bardot/Hardy.

Tony Cotte : Vous voilà de retour après un an et demi de silence. Dans quel état d’esprit êtes-vous ?

Elodie Frégé : Je me sens bien. J’enchaîne la promotion. Je parle beaucoup, je m’use mais ça me fait plaisir. Apparemment cet album intrigue et il semble plaire plus qu’il ne déplait. On peut dire que j’ai réussi mon pari tout en étant moi-même. Je suis bien dans mes baskets, enfin dans mes talons (elle sourit), et les gens ont l’air d’apprécier...

La sortie de ce second album a été maintes fois repoussée. Vous sentez-vous prête à affronter de nouveau les médias ?

Je me sens beaucoup plus prête qu’il y a deux ans. Mais je n’en suis pas au point de me mettre la pression, car je me suis énormément investie pour ce disque. Bien entendu, il y a une part de peur puisque c’est de mon travail de musicienne, d’auteur et d’interprète dont il s’agit.

Certains journalistes ont écrit des choses peu agréables à votre égard, notamment sur les ventes de votre premier album. Cela vous a-t-il déjà affecté ?

Vendre 250 000 exemplaires est loin d’être mauvais. Si j’en avais vendu plus, on m’aurait imposé les mêmes réalisations pour Le jeu des 7 erreurs (son nouvel opus, ndlr) et j’aurais été donc étiquetée...

En même temps, le flop de Magalie Vaé a permis de faire relativiser les mauvaises langues sur votre soi-disant « échec »...

On peut vraiment parler de « soi-disant échec ». Je ne renie pas mon premier album, mais je ne m’étais pas complètement lâchée. Pour Le jeu des 7 erreurs, j’ai voulu prendre les choses en main. J’ai pu revenir à mes racines. On peut dire que je suis assez désuète dans mes goûts musicaux (rires). J’ai été bercée sur du Gainsbourg, Brassens et du Jean Ferrat. C’est ce qui m’a donné goût à l’écriture. Une fois la tournée Star Academy terminée, j’ai recommencé à écrire. J’ai fait des textes qui me parlaient. Mes huit années de guitare classique m’ont permis de composer des choses loin des mélodies ennuyeuses que l’on a déjà entendues. En vendant un million d’exemplaires de mon premier album, je n’aurais jamais eu cette liberté.

En dehors de la production de Benjamin Biolay, Gilles Verlant signe votre dossier de presse, Jaco Van Dormael réalise votre clip, vous êtes passée sous l’objectif de Stratis & Beva et Dominique Blanc Francard a mixé la majorité des titres de cet opus qui contient le dernier texte de Jacques Lanzmann ! Vous n’avez jamais douté de votre légitimité à pouvoir bénéficier de toutes ces collaborations prestigieuses à ce stade de votre carrière ?

Tous les gens qui ont collaboré avec moi ont pris le temps de respecter la personne que j’étais sans me juger. Ils ont attentivement écouté mes maquettes, sans a priori. Comme ce que j’avais fait leur a plu, ils ont voulu participer à cette aventure.

Les 7 et 8 décembre prochains, vous serez sur la scène du Café de la danse. Comment appréhendez-vous les deux premiers concerts de votre carrière ?

J’appréhende bien plus que la sortie du Jeu des 7 erreurs (l’interview a été réalisée le 15 septembre, ndlr). Je n’ai jamais fait de scène toute seule. Je ne sais pas si je serai très à l’aise pour cet exercice. Après le premier album, il devait y avoir une tournée avec Thierry Suc mais cela ne m’intéressait pas de défendre sur scène des chansons qui n’étaient pas complètement de moi. Je me suis rendue au Café de la danse pour voir Brisa Roché. C’est une salle intimiste avec une très bonne acoustique : c’est un élément important pour le spectateur.


« Le bonheur est dans la pente, entre le sol et le ventre », « le goût amer du dernier coup de rein », ... Plusieurs vers sur votre album sont explicitement voluptueux. Y a t-il une volonté de votre part de se diriger vers une image lubrique ?

Pas du tout (rires). Je ne cultive pas la lubricité. J’ai inspiré le texte de La Ceinture (premier extrait de l’album, ndlr) à Benjamin. Peut-être est-ce quelque chose qui ressort de moi ? Je parle beaucoup des relations affectives. Elles sont souvent associées aux relations charnelles. Finalement, quand on traite de l’amour, on est obligé de parler de la peau (elle sourit).

Dans votre album, vous reprenez Le velours des vierges de Serge Gainsbourg, c’est un choix plutôt inattendu !

Un jour, Benjamin est venu au studio avec l’album Ex-fan des sixties de Jane Birkin, où figurait Le velours des vierges. Je ne connaissais quasiment pas cette chanson, mais il m’a demandé de bien l’écouter car elle lui faisait penser à moi. Je suis presque femme mais encore dans l’adolescence et même à 24 ans, j’ai toujours ce côté neuf que je pense conserver éternellement. Le thème m’a beaucoup touchée. La chanson traite des hommes dont le fantasme suprême est d’avoir des relations sexuelles avec des filles mineures et vierges. Cela peut même évoquer l’inceste....

Avez-vous conscience que les médias vont rapidement vous assimiler, vous et Benjamin Biolay au couple Bardot/Gainsbourg....

Nous interprétons un duo qui s’intitule Le jeu des 7 erreurs. Ce titre a une connotation un peu dans l’esprit de Bonnie & Clyde. C’est un hommage que Benjamin a voulu rendre. Il a le talent de faire des chansons qui peuvent ressembler au style de Gainsbourg, tout en étant actuel et élégant. A l’instar de ce couple, je considère Benjamin comme mon pygmalion. Il m’a aidée à me découvrir. Il m’a forcée à jouer de la guitare sur l’album. Il m’a encouragée tout en me laissant énormément de liberté. Grâce à lui, je n’ai jamais été aussi épanouie depuis que je fais ce métier. C’est la première fois que je prenais un tel plaisir à être derrière un micro.

Le jeu des 7 erreurs est également le titre de votre album. Pouvez-vous nous expliquer sa signification ?

Dans les remerciements, j’ai énuméré mes failles, mes erreurs. J’ai cité la peur, le doute et même l’aspérité. Au final j’en ai relevé sept...

... et parmi elles la Star Academy ?

Non, pas du tout (rires). Ce n’est pas une erreur. Mais ce sont toutes mes failles qui font la personne que je suis aujourd’hui et je les remercie. Elles m’ont formée. A la base, j’ai intitulé ainsi ce disque parce qu’il représente le mariage de Benjamin et moi. Je ne vois pas quel autre nom il aurait pu avoir. Il représente parfaitement cette fusion de nos deux univers.

Benjamin Biolay a écrit au sujet de la Star Academy et de vous-même que « cette émission de merde était une formidable machine à gâcher le talent des gens, s’ils en ont ». Êtes-vous d’accord avec ses propos ?

C’est ce qu’il m’a dit après notre première rencontre. Il m’avait envoyé un texto « Je ne savais pas que ces gens pouvaient cacher un talent pareil ». Selon lui, je n’aurais pas été obligée de participer à la Star Ac’ pour me faire remarquer. Cela aurait pris sans doute plus de temps, mais j’estime que pour ma part cela m’a permis d’avoir une maison de disque, et j’ai pu le rencontrer plus vite. J’ai profité de cette émission et c’est un sacré tremplin.

Ne risque t-il pas d’être déçu de votre future apparition sur le plateau pour faire de la promotion ?

Il s’en fout complètement. Je pense qu’il a conscience que c’est un moyen de promotion comme un autre. C’est une exposition devant 10 millions de téléspec... enfin moins maintenant (rires) ! A partir du moment où je reste intègre au niveau artistique, il n’y a pas de problème. Je ne vais pas y aller pour lécher les pieds de Nikos, mais pour présenter ma chanson au public.

L’an dernier vous n’avez pas caché votre préférence pour Pascal. Vers quel élève se porte votre choix cette année ?

(gênée) Je n’ai pas encore regardé. Je le ferai une semaine avant ma participation pour savoir avec qui je veux chanter. Je n’aime pas que l’on m’impose des choses. En même temps, j’aimerais pouvoir interpréter La Ceinture seule. C’est un texte tellement intime, il ne se prête pas au duo. Après cela ne me gène pas de faire des reprises en compagnie d’autres élèves.