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Explô > Laurent Bignolas, un journaliste qui aime le grand air

Claire Varin
Publié le 03/02/2012 à 13:22

Depuis la rentrée, Laurent Bignolas est aux commandes d’Explô, diffusée chaque mardi à 20h35, sur France Ô. Le journaliste expose l’ambition de ce magazine de découvertes et partages. Il parle également de sa participation à Thalassa et de ses départs de Faut pas rêver et du 19/20...

Claire Varin : Pouvez-vous nous parler du concept d’Explô ?

Laurent Bignolas  : Explô est une sorte de tribune. La France a des tentacules un peu partout dans le monde et nous sommes sans doute un des pays qui a le plus de voisins, grâce aux outremers. France Ô se veut être la fenêtre du temps qui passe, du monde qui tourne et qui prend la mesure de l’évolution de la société. L’émission permet d’ouvrir pour le téléspectateur non plus une lucarne, mais une baie vitrée sur le monde.

L’émission met en avant le gout de la jeunesse pour l’échange et le voyage. Est-il important pour vous de montrer cette jeunesse ?

Après dix de tour du monde, on s’aperçoit qu’on n’est pas seul, fort heureusement. On s’aperçoit qu’il y a des générations derrière qui arrivent et pour lesquels durant des années je n’ai rien pu faire, parce que le documentaire -ou la télévision- c’est un monde soi-disant très ouvert, mais qui est en réalité très fermé. Aujourd’hui, je veux dire le contraire, c’est-à-dire que l’on n’est pas seul à avoir envie de rencontres et de partages. Il y a pas que les journalistes et les humanitaires qui vont au bout du monde. Il y a des gens qui le font parce qu’ils ont simplement envie d’ailleurs. Ils sont de plus en plus nombreux à prendre leur bâton non pas de pèlerins, ni d’aventuriers, mais d’humanistes, avec leur propre naïveté et leur propre curiosité. Et ils m’intéressent. J’ai envie qu’on les aide à partager leurs émotions et leurs découvertes. C’est une nouvelle écriture et une nouvelle façon de raconter le monde.

Aimeriez-vous faire plus de terrain pour Explô  ?

Nous sommes sur une chaîne qui a sans doute moins de moyens que beaucoup d’autres. C’est la dernière née du groupe France Télévisions, son coût de grille est de 28 millions d’euros. À côté de 800 millions de France 2, ce n’est rien. Ce n’est pas pour autant qu’elle ne doit pas exister. Mais il faut être raisonnable. C’est comme si je disais bon sur les 28 millions, j’en prends la moitié rien que pour Explô. Ça serait ça aller au bout du monde. Aujourd’hui, le plus important est d’installer le programme, de montrer qu’on est là. Après on verra. Bien sûr, j’ai toujours envie d’aller galoper dans les dunes ou de prendre un bateau pour travers l’Atlantique, mais il faut savoir pour qui l’on travaille. Nous sommes d’abord une chaîne publique au service d’une idée.

Pouvez-vous évoquer quelques-unes des prochaines destinations d’Explô  ?

La première semaine de février, nous irons en Nouvelle-Calédonie avec le champion du monde de football, Christian Karembeu. Puis, nous aurons un très beau reportage sur le Vietnam. J’ai une relation particulière avec ce pays que j’adore. Tout comme Madagascar, où je suis allé tourner de multiple fois. Là, nous aurons un magnifique reportage de 52 minutes sur l’arbre Baobab. Ces arbres sont menacés, mais on verra qu’il y a des gens qui ne font pas n’importe quoi et qui travaillent à leur préservation.

La question de l’écologie est-elle importante pour l’émission ?

Au 21e siècle, on ne peut plus dissocier l’homme du territoire. À Explô, on essaie d’écouter, c’est aussi pour cela que l’on va vers ses jeunes aventuriers. On ne peut pas ne pas être à l’écouter de la génération qui arrive derrière, c’est à elle qu’appartient le monde. Mais on ne peut pas rester sur un état des lieux. Il faut continuer d’alerter les uns et les autres.


Explô est-elle pour vous un prolongement de votre expérience sur Faut pas rêver ?

C’est un peu un prolongement dans le sens où ce n’est plus moi qui suis sur le terrain, mais je regarde avec beaucoup d’attention tous les projets. Je sais que le téléspectateur a envie de changer de contrée, il n’a pas envie de rester deux heures planter sur le même désert ou la même dune. Je trouve que cette nouvelle génération de « documentaristes » fait bien ce boulot. Alors il faut les privilégier. Et cela va dans le sens de ce que je voulais que soit Faut pas rêver.

Pourquoi avoir quitté la présentation de Faut pas rêver  ?

On n’était pas d’accord sur l’orientation éditoriale qu’à l’époque, on voulait donner à l’émission. Je ne savais pas faire du divertissement dans la découverte du monde. Pour moi, ce n’est pas un divertissement que d’aller à la rencontre de l’autre. Le reste, c’est de la cuisine interne...

Actuellement, l’émission est présentée par Tania Young. L’avez-vous regardée depuis ?

Oui et j’ai partagé mon avis avec Tania. J’aime bien sa façon d’aller à la rencontre des autres. Mais, je sais comment fonctionne la machine et je lui dis chapeau parce qu’il y a beaucoup de contraintes techniques et ce n’est pas facile d’être obligée de refaire - pour des besoins d’image - des choses et de garder la même spontanéité. Je trouve qu’elle le fait très bien et que l’on sent qu’elle a envie de partager. Il y a un vrai potentiel pour aller de façon très décontractée à la rencontre des uns et des autres, nous faire découvrir des choses et faire que l’interlocuteur à l’autre bout du monde soit le héros du magazine.

Comment s’est passée votre arrivée sur Thalassa aux côtés de Georges Pernoud ?

Discrètement, mais plutôt bien. J’aime ce magazine depuis longtemps. Ce qui m’intéresse c’est de mettre encore un peu plus en valeur le travail des équipes qui partent à l’autre bout du monde. Ils ont une vraie signature. Ça me fait plaisir et mon rôle se cantonne à cela.

Thalassa change régulièrement de formule et son audience a baissé ces dernières années. Pensez-vous que l’émission a encore de beaux jours devant elle ?

Oui, tout n’a pas été exploité dans le travail de qualité qui peut être produit dans cette rédaction. Et lorsque l’on regarde la moyenne de téléspectateurs, on s’aperçoit qu’au dessus de 2 millions, ça reste un potentiel très honnête par rapport à la naissance ininterrompue des chaînes. Je pense que c’est un des magazines de France Télévisions qui doit exister et qui fait partie de l’ADN de la télévision du service public et de France 3.

Pouvez-vous revenir sur votre départ du 19/20 ?

Quand je ne me sens pas bien ou pas en accord avec moi-même, je m’en vais. Car je ne pense pas détenir la vérité, je respecte celle des autres. Et lorsque je ne suis pas d’accord avec une façon de faire sur le plan humain ou déontologique, je pars. J’ai claqué la porte deux fois. À un moment, je me suis demandé si je ne travaillais pas pour un Feydeau ou pour Lapeyre. À force de claquer des portes, on se demande si l’on ne fait pas du théâtre de boulevard. (Rire), Mais, j’accepte aussi les punitions. On prend des risques, puis on s’assume. Je ne me plains pas.