Toutelatele

Jean-Luc Lemoine, le trublion touche-à-tout

Emilie Lopez
Publié le 02/01/2009 à 13:35 Mis à jour le 04/06/2010 à 14:19

Radio, télévision, cinéma, théâtre, écriture : Jean-Luc Lemoine est un véritable « touche-à-tout » ! Révélé au grand public grâce à « La bande à Ruquier », et son rôle de médiateur, le jeune homme enchante à présent les foules sur les scènes de France. A l’occasion de la sortie de son dernier spectacle en DVD, l’humoriste revient, pour Toutelatele.com, sur son parcours atypique, avec toujours la pointe d’humour et d’autodérision ayant fait son succès...

Emilie Lopez : Votre carrière a débuté relativement jeune. Avez-vous toujours voulu être humoriste ?

Jean-Luc Lemoine : Je n’étais pas spécialement drôle quand j’étais gamin, j’étais plutôt bon élève, limite terne. Mais j’ai toujours été fasciné par l’humour, tout en étant persuadé que c’était plus pour quelqu’un d’autre que moi. Les premiers temps où j’ai commencé à faire rire, je me suis rendu compte que je faisais surtout rire les gens plus vieux que moi. Je m’y suis essayé, et cela a fonctionné. Je n’ai jamais fait ça par dépit, ou dans l’espoir que ce soit juste un tremplin vers autre chose.

Vous avez un humour grinçant, voire presque cassant. Pourquoi avoir opté pour cette forme d’humour ?

Je n’avais pas d’amis quand j’étais môme, les gens me jetaient des pierres (rires). Depuis toujours, je ne peux pas m’empêcher de voir le second degré. J’ai fait d’autres métiers pour vivre, et à chaque fois, j’étais spectateur, j’avais toujours du recul par rapport à tout, ce qui me permettait de voir les petites bassesses du quotidien. Ma source d’inspiration, c’est moi-même, j’exorcise sur scène des mauvaises pensées qui me passent par la tête : ça m’évite d’être une personne infréquentable. (rires)

Votre parcours est très éclectique : télévision, cinéma, écriture de scénarios... Cette diversité était-elle primordiale pour vous ?

C’était surtout une question d’opportunité et de la gourmandise, car je suis vraiment intéressé par tout ce qui touche à l’humour. Je faisais du café-théâtre lorsque Infos du monde, un journal parodique, m’a demandé d’écrire pour eux ; puis on m’a proposé de faire de la radio ; quant au scénario de film, j’y suis venu par hasard. On m’avait acheté une pièce, Mon colocataire est une merde, devenue un film. Par la suite, on m’a proposé d’autres films, mais au bout de deux ans je me suis aperçu qu’ils ne se montaient pas, je devenais fou ! Je me suis donc dit « Quitte à ce que ça ne se monte pas, autant en faire un vrai boulot alimentaire ! ». Et j’ai eu l’opportunité de travailler pour la télé, je faisais des questions et des textes décalés, toujours en rapport avec l’humour, pour des jeux. Ça a été une formidable école d’écriture. En réalité, toute ma carrière a été une question d’opportunité, jamais un calcul.

Tous ces domaines sont très différents. Comment êtes-vous parvenu à aller de l’un à l’autre avec aisance ?

J’essaye de cloisonner au maximum, ça me permet également de ne pas me mélanger les pinceaux. Je ne cherche pas à transposer ce que je fais dans d’autres univers. Par exemple, lorsque j’ai participé à On n’est pas couchés, je ne me suis jamais demandé si je pourrais faire quelque chose pour le décliner par la suite sur scène, je suis parti dans l’optique de faire vraiment une rubrique de télévision. Ça a été très contraignant pendant deux ans, mais j’avais l’impression de proposer un vrai projet télé.

Vous avez également participé à Tout schuss et Tout baigne, la mini-série créée par Arnaud Gidoin et Soren Prévost...

Ils m’ont dit « On a un rôle de gros con, est-ce que tu veux venir le faire ? » J’ai dit « Oui, ça, c’est pour moi ! » (rires) Ils ont fait appel à la fois aux gens qu’ils aimaient bien, et ceux qui pouvaient correspondre à leur univers. Ils m’ont appelé, ils m’ont bien chargé, mais c’était très amusant (rires)

Vous avez gagné un prix au festival du court-métrage d’Istres, pour l’un de vos scénarios...

C’était un court-métrage que j’avais écrit, parti d’un sketch dans lequel je jouais déjà un psychopathe ! (rires) Ca s’appelle « Le rendez-vous », il est en bonus sur mon premier DVD. C’est drôle, car il y avait deux rôles : celui d’un gentil, et celui d’un malade mental. Le producteur ne me trouvait pas du tout crédible en fou, mais le réalisateur m’a imposé. Au final, tout le monde était d’accord avec lui, ce qui m’a fait me poser des questions sur ma santé mentale ! (rires)


Auriez-vous envie d’écrire à nouveau pour le cinéma ?

C’est justement en cours ! Pathé m’a appelé en septembre pour savoir si j’avais des projets au cinéma. Je leur ai présenté une idée, et ils ont été emballés. Là je viens de rendre une première version, et je suis toujours en phase d’écriture.

Est-ce un film humoristique ?

Oui ! Malheureusement, je ne sais faire que ça ! J’adorerais écrire des drames, mais je crois que j’en suis complètement incapable. J’ai toujours tendance à mettre un truc qui dérape à un moment donné !

Hormis Bienvenue chez les Ch’tis, les comédies françaises connaissent souvent difficultés au box-office. Cela ne vous effraie-t-il pas ?

Certaines autres ont marché, telles que Disco, ou le film d’Isabelle Mergaux, que je n’aimais pas trop d’ailleurs (Enfin Veuve, ndlr). Sincèrement, je ne me suis pas posé la question. Pendant longtemps, je me prenais la tête et me torturais l’esprit avec toutes les questions possibles. Au bout d’un moment, je me suis dit « concentre-toi sur ce que tu sais faire, à savoir écrire des bêtises, et fais confiance aux autres ». Si quelqu’un me commande un film, il doit bien savoir pourquoi. Après, ce n’est plus de mon ressort !

Vous avez avoué avoir pensé à arrêter à cause de toutes ces questions qui vous « parasitaient ». A présent, vous « foncez » donc sans trop de réflexion...

Non, je réfléchis toujours beaucoup malheureusement, parce que parfois il faut être insouciant pour faire ce métier. Mais ce ne sont plus des réflexions paralysantes, je me remets juste en question, et essaye de faire le meilleur boulot possible. Je ne fais pas le mariole, je n’ai pas l’impression d’avoir le monopole du savoir, donc je suis toujours à l’écoute de ce qui se dit, et de ce qui se passe. J’essaye juste d’être vigilant et d’anticiper, et j’espère que je partirai avant que les gens en aient marre de moi !

Avez-vous des regrets par rapport à votre carrière ?

Honnêtement, non, il y a des trucs lamentables que j’ai fait, mais j’aime tout ! (rires) J’ai l’impression que tout s’est fait à mon rythme, pas comme un sprinteur, mais plutôt comme un marathonien, j’ai une progression régulière. J’aurai juste essayé de trouver un rôle plus marqué d’humoriste plutôt que de chroniqueur dans On a tout essayé. Mais ce n’est même pas un regret, parce que je me dis que ça devait se faire comme ça. De plus, j’ai rectifié le tir après, dans On n’est pas couchés.

En cette période de fêtes de fin d’année, de nombreux comiques ont sorti leurs DVDs. Pour quelle raison acheter le votre ?

Parce que je suis le seul DVD sur lequel il y a un sapin sur la jaquette, il y a l’esprit de noël, donc c’est celui qu’il faut acheter ! De plus, les gens qui achèteront mes DVDs seront heureux toute l’année ! (rires)

Pierre Palmade, avec son spectacle Le comique, fait monter sur scène de jeunes comiques inconnus du grand public. Vous imagineriez-vous également en mentor, si l’occasion vous était donnée ?

C’est difficile, car je n’ai pas l’assise de Pierre Palmade. J’ai l’impression qu’il est à un stade où il peut passer le relais. Moi, je m’imagine toujours en construction, je n’ai pas l’impression d’être installé. Par contre, j’ai très envie de partager la scène avec d’autres gens. Je l’ai déjà fait, car la notion de partage est très importante pour moi. Mais ce serait très prétentieux de ma part de dire que je suis assez un cador pour donner la main à des jeunes découvertes.

Ce serait néanmoins une façon de leur faire profiter de votre notoriété...

Ça, c’est possible. J’ai, par exemple, un projet télé avec des gens que le grand public ne connaît pas. J’espère les faire découvrir, et qu’on me les volera, parce que ça voudra dire que j’ai eu raison de les prendre !