Toutelatele

Jean-Pierre Pernaut

Joseph Agostini
Publié le 20/05/2005 à 00:48 Mis à jour le 09/05/2011 à 15:06

Avec ses petites lunettes, son sourire bienveillant et ses origines picardes, Jean-Pierre Pernaut est devenu une icône de l’information française. Son Journal de 13 heures explose la concurrence et Combien ça coûte termine son deuxième septennat. Rencontre avec une bête d’audience et de simplicité, qui aime la Ferme Célébrités.

Joseph Agostini : Etre l’idole des
ménagères et le mouton noir des intellectuels,
c’était une vocation ?

Jean-Pierre Pernaut : Je ne fais pas un
journal pour plaire à qui que ce soit. Il se
trouve que je suis le patron de mon édition
et que les téléspectateurs s’intéressent
à ce que nous leur proposons
chaque jour à 13 heures ! Le reste ne
compte pas. Si les intellos parisiens ne
m’aiment pas, c’est leur problème.

Joseph Agostini : Vous recevez des lettres d’amour de
ménagères transies quelquefois ?

Jean-Pierre Pernaut : (Rires) Des lettres d’amour, très peu finalement ! Je ne déclenche pas une attirance
sexuelle immédiate. C’est plutôt
un autre type de proximité qui semble
se dégager de ma personnalité. Les
gens m’écrivent pour me confier leurs
problèmes.

Joseph Agostini : Vous êtes arrivé au Journal de 13
heures
le 22 février 1988. Succéder à
Yves Mourousi, il fallait le faire ! Dans
quelle ambiance cela s’est-il déroulé ?

Jean-Pierre Pernaut : L’audience du JT d’Yves Mourousi baissait. Son journal était probablement
trop parisien. Ses directs du bout du
monde n’étaient plus vraiment originaux.
TF1 désirait trouver un nouveau
type d’écriture, plus proche des gens
qui regardent la télé à 13 heures, à savoir
les habitants des petites villes, les
retraités, les femmes au foyer et les
chômeurs pour la plupart. Nous avons
choisi de développer un réseau de correspondants
en régions, en association
avec la presse quotidienne régionale.

Joseph Agostini : A cette époque, TF1 souhaitait-elle déjà « muscler » son secteur de l’information ?

Jean-Pierre Pernaut : Francis Bouygues avait tout compris. Il savait qu’une chaîne privée ne pouvait
progresser qu’avec une information de
qualité, crédible, donc indépendante. Il a
dressé une sorte de cloche pour protéger
la chaîne des interventions extérieures,
politiques et économiques.


Joseph Agostini : Du coup, vous faites six minutes sur la
châtaigne corse...

Jean-Pierre Pernaut : Il faut quand même vous dire qu’avant mon arrivée, l’info nationale ne parlait
pas du tout de ce qui se passait au-delà
du périphérique ! C’était la « culture parisienne
 » qui régnait, exception faite de
Cannes et de Roland Garros, où les parisiens
se déplacent. J’habitais Amiens
et je râlais parce qu’on ne parlait jamais
de la Picardie ! Un journal doit être le reflet
de la société dans son ensemble. De
plus, on évoque aussi largement l’actu
nationale et internationale.

Joseph Agostini : Que répondez-vous à ceux qui vous
taxent de « national traditionaliste » ?

Jean-Pierre Pernaut : Entre sept et huit millions de téléspectateurs choisissent chaque jour de regarder le 13 heures de TF1. 15% des Français
ont encore la télé en noir et blanc !
Je m’adresse aussi à cette France-là, la
France des campagnes, des petites villes
 ! Je fais des sujets sur les métiers
anciens, l’amour des belles choses, et
ça hérisse le poil de mes camarades de
Télérama ! La différence avec certains,
c’est que je ne suis pas enfermé dans
une bulle journalistique. Je m’intéresse
à ce qui se passe autour de moi. En somme,
je vais voir au-delà du périph !

Joseph Agostini : En dix-sept ans, France 2 a changé 20
fois de formules à 13 heures et son
audience ne progresse toujours pas.
Honnêtement, ça vous fait rire ?

Jean-Pierre Pernaut : J’ai toujours respecté mes concurrents. Chêne, Holtz, Bilalian, Hondelatte, Duquesne...
Ils ne me mettent pas les plus
mauvais en face ! A chaque changement
de formule, je me dis qu’ils trouveront un
jour un moyen de nous battre. Je ne me
repose pas sur mes lauriers.

Joseph Agostini : Vous n’avez pourtant plus rien à craindre...

Jean-Pierre Pernaut : L’audience est la chose la plus fragile qui soit. Il n’y a pas écrit "Présentateur de
longue durée" sur mon contrat. Il faut
toujours se remettre en question. C’est
le secret de la longévité. Et puis, je peux
toujours commettre une erreur et disparaître
du jour au lendemain.


Joseph Agostini : A l’heure où les émissions sautent comme des fusibles, vous êtes à l’antenne
dans Combien ça coûte, en prime time,
depuis quatorze ans ! Là encore, une
longévité absolument exceptionnelle...

Jean-Pierre Pernaut : Combien ça coûte est le premier magazine d’« infotainment » de France. En
1991, on ne mélangeait pas encore l’info
et le divertissement ! C’était du jamais
vu. Etienne Mougeotte et Christophe
Dechavanne (le producteur de l’émission
ndlr) voulaient parler des impôts et du
prix de l’essence, avec une impertinence
amusée. L’argent en prime time, c’était
complètement tabou à l’époque.

Joseph Agostini : Pour doper une audience en perte de vitesse, vous avez même fait équipe avec
Evelyne Thomas, à la rentrée. Comment
s’est déroulée votre cohabitation ?

Jean-Pierre Pernaut : Très bien, et pas seulement pour tordre le cou aux rumeurs ! Je pense qu’Evelyne
est une bonne animatrice de divertissement
mais que l’émission n’était pas faite
pour elle. Elle a choisi de partir en cours
d’année et je respecte cette décision.

Joseph Agostini : On a le sentiment que vous défendriez
TF1 quoiqu’il arrive. Vous arrive-t-il de
ne pas aimer cette chaîne
 ?

Jean-Pierre Pernaut : Si j’avais honte d’un seul programme de TF1, je partirais sur le champ ! Je
regarde la télé avant tout pour me détendre.
Et d’ailleurs, je dois avouer que je
suis plus amateur des programmes de
divertissements que des soirées thématiques
d’Arte...

Joseph Agostini : Avec La Ferme, vous vous détendez cette année ! Vous avez fait rentrer votre
femme dedans pour l’avoir avec vous
24 heures sur 24 ?

Jean-Pierre Pernaut : Je ne suis pas un taliban, moi, Monsieur ! (Rires) Nathalie est rentrée dans La Ferme
pour se battre pour une association
qu’elle défend. J’adore ce programme.
Je le trouve vraiment bien fait, mignon...
Un bon programme familial et un casting
vraiment spectaculaire !