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La Ferme célébrités en Afrique : Chroniques d’un chaos

Aurélie Demarcy
Publié le 12/03/2010 à 12:55

Cinq ans après avoir fermé les portes de Visan, TF1 a pris le parti de planter sa nouvelle ferme en Afrique du Sud. L’exploitation allait donc accueillir seize nouveaux candidats, dès le 29 janvier. Retour sur un parcours tumultueux...

Nouveau contexte, nouveaux animateurs, nom de l’émission modifié, nul doute, la chaîne privée prépare dignement le retour de sa télé-réalité. Une renaissance annoncée, non sans une pluie de faire parts médiatiques : du casting énigmatique à l’hypothétique démission de Christophe Dechavanne, en passant par les cachets des participants, La Ferme célébrités en Afrique tient là une première victoire : celle d’avoir crée le buzz. Ce vif intérêt pour les changements de forme du concept est ensuite,alimenté par des promesses de fond. Ainsi, Angela Lorente, directrice des programmes de télé-réalité l’affirme : « Le concept du programme est gage de comédie. Si la base du jeu reste la même, toute une partie de la mécanique a été renouvelée, suscitant des situations encore plus drôles pour les célébrités et les téléspectateurs ! »

Jean-Pierre Foucault, lui, n’omet pas de souligner « la vocation pédagogique » du divertissement : « L’idée est de faire découvrir un pays, un peuple, des animaux » annonce Monsieur Qui veut gagner des millions -caution culturelle de l’émission ?- dans les colonnes de Télé Star, tandis que Benjamin Castaldi parle de programme « familial » moins trash de son habituel Secret Story. Face à un tel déploiement médiatique, les téléspectateurs curieux allaient permettre à TF1 de remplir son second objectif : celui d’un lancement des plus glorieux.

Sans transition, le 29 janvier, le public découvre Brigitte Nielsen, David Charvet, Jeane Manson, Kelly Bochenko, Mickaël Vendetta, Claudette Dion, Francky Vincent, Christophe Guillarmé, Velvet d’Amour, Aldo Maccione, Adeline Blondieau, Hermine de Clermont-Tonnerre, Grégory Basso, Farid Khider, Céline Durand et Surya Bonaly prêts à investir la réserve de Zulu Nyala. Un coup d’envoi suivi par près de 7 millions de Français, soit 30.8% du public présent devant son poste de télévision. Particulièrement plébiscitée par les enfants avec 45.4% de part de marché sur cette cible, et par les femmes de moins de 50 ans (42.1%) tout comme les 15/49 ans (39.4%), La Ferme célébrités vole alors la vedette aux enquêtes de NCIS sur M6.

S’ensuivent alors, les pérégrinations des fermiers, alimentés par bon nombres de conflits, de stratégies et une mise en exergue du trublion de la bande : Mickaël Vendetta. Le « bogosse », du haut de son ego démesuré, énerve, provoque, dépasse les bornes et TF1 aime ça. S’attirant les foudres de ses partenaires, ce dernier gagne la considération d’un public, hésitant entre fascination et répulsion face à l’attitude du provocateur.
Néanmoins, et si les débordements de l’intéressé prêtent à sourire, on est en droit de se demander où se niche le pendant « comique » du divertissement annoncé par Angela Lorente ? Car, force est de constater que l’ambiance n’est pas festive à Zulu Nyala. La zizanie est à son comble, et on ne compte plus les clashs entre les « célébrités » et l’abandon de certains comme Adeline ou Céline, contraintes d’effectuer un « retour au pays natal ».


Quant à « la vocation pédagogique » évoquée précédemment, elle prend des allures de caricature selon certains. En effet, le traitement de l’Afrique dans la real tv est vite catalogué de « stéréotype » comme l’explique Pap Ndiaye, chercheur à l’EHESS, dans les colonnes de Libération : « On insiste lourdement sur l’inconfort et un vague danger : la chaleur, les odeurs. Ce thème revient constamment dans la bouche des animateurs et des participants : l’Afrique pue. Les animaux « qui piquent » et les maladies. Bref, l’Afrique est présentée comme dangereuse, hostile, primitive. »

Ultime fausse note du programme, la relation entre les habitants de la réserve et les animaux. En effet, si les humains sont voués à se préoccuper du bien-être de ces derniers, Olivier « le ranger » semble émettre quelques réserves à ce sujet, et n’hésite pas à faire état d’individus davantage préoccupés par l’issue de l’aventure. Un nombrilisme aux antipodes de la philosophie de cet amoureux de la nature, qui, lors d’une interview accordée à Télé 7 jours, confiait son désintérêt de rempiler pour une nouvelle saison.

Des déconvenues qui ne cessent d’assombrir le ciel de Zulu Nyala et, par la même occasion, celui des primes. De fait, le second opus perd près de deux millions d’inconditionnels, tandis que le troisième revêt des allures de douche froide. En effet, le divertissement n’attire, ce soir-là, que 4.3 millions de Français, soit 18.3% du public présent devant son poste de télévision. Et ce qui devait arriver, arriva. Suite au quatrième prime suivi par 4.4 millions de téléspectateurs, pour 19.3% de part de marché, le duo Benjamin Castaldi / Jean-Pierre Foucault se voit relégué aux secondes parties de soirée, et les best-of dominicaux passent à la trappe. Seules, les quotidiennes sauvent la mise de l’émission et se placent en tête des audiences dans leur tranche de diffusion avec une moyenne de plus de 3 millions de fidèles, et des parts de marché au top auprès des cibles fétiches des annonceurs.

Finalement, la télé-réalité n’aura pas réussi à remplir son contrat originel, laissant le public sur sa faim. Il y a fort à parier que les dirigeants de la chaîne comptent désormais sur le divertissement phare de TF1, Koh-Lanta, pour rebooster ses vendredis. Le Choc des héros parviendra-t-il à panser les traumatismes des Fermiers ? Réponse dès le 26 mars...