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Le destin brisé d’une M6 algérienne

Arthur Anthamatten
Publié le 15/07/2003 à 01:03

Lancée avec un grand tapage médiatique en septembre 2002 dans la villa de Cannes de l’homme d’affaires algérien Rafik Khalifa, la chaîne Khalifa TV, à dimension internationale, n’a pas résisté bien longtemps. Sans réelle surprise, le président du tribunal de commerce de Bobigny n’a pu que constater le 2 juillet dernier ce que beaucoup savaient « les engagements pris n’ont pas été tenus ». Celui-ci a donc décidé la fin de la chaîne de Rafik Khalifa. Dès le lendemain, Khalifa TV avait disparu avec une grande discrétion de l’offre de TPS.

La liquidation judiciaire de Khalifa TV sonne le glas d’une cascade de problèmes et difficultés rarement vécus lors du lancement d’une chaîne de télévision à dimension internationale en France.

Au départ, le CSA avait menacé Khalifa TV de poursuites judiciaires pour avoir émis sans autorisation de la mi-septembre à la fin octobre 2002. Conventionnée pour une durée limitée de deux ans par l’instance de régulation, Khalifa TV a été ensuite sommée plusieurs fois de tenir ses engagements. Mais rien ne fut réellement fait depuis les débuts de la chaîne par les directions successives de Khalifa TV.

Rarement une nouvelle chaîne a connu autant de nouvelles directions en si peu de temps. Ainsi, le premier PDG de la chaîne fut arrêté le 24 février dernier à l’aéroport d’Alger en possession d’une valise contenant deux millions d’euros qu’il tentait de faire sortir du pays accompagné de deux autres personnes.

Tout au long de ses quelques mois de survie, la chaîne a connu non seulement de nombreuses difficultés financières mais aussi éditoriales. Ainsi, le public n’a pas suivi une programmation décousue jouant entre clips et émissions multirediffusés de bas de gamme. Menacée par les problèmes financiers du groupe Khalifa qui est propriétaire de la chaîne, Khalifa TV se trouvait devant un destin brisé sans réel avenir.

Mais pour essayer de sauver Khalifa TV, un troisième PDG, Paul Agenauer, fut nommé au printemps dernier par Rafik Khalif. Paul Agenauer comptait d’abord faire oublier la mauvaise gestion des anciennes directions qui se plaignaient de ne pas avoir assez de moyens. Ce troisième PDG en quelques mois voulait balayer au passage la mauvaise image que n’a pu faire oublier la chaîne suite aux déboires financiers du groupe Khalifa. Cependant, les investissements ne suivaient plus et il n’y avait toujours pas de régie publicitaire sérieuse...

Le rêve de Rafik Khalifa, milliardaire algérien fondateur de Khalifa TV, était d’ajouter une chaîne de télévision à son empire. L’homme d’affaire avait pourtant l’ambition de créer une sorte de « M6 algérienne » à dimension internationale voulant non seulement être un trait d’union entre les deux rives de la Méditerranée mais aussi permettre d’améliorer l’image de l’Algérie en Europe. Pour cela, Rafik Khalifa avait approché des personnalités connues du PAF comme Jamel Debouze ou encore des sociétés de production reconnues, mais devant l’ampleur du manque de professionnalisme des directions successives sans oublier certaines difficultés financières, rien ne pouvait garantir la suite de Khalifa TV.

Devant les difficultés de la chaîne, Rafik Khalifa a longtemps songé à « déménager » sa chaîne à Londres qu’il trouve plus « libéral pour construire une chaîne ». Peut-être que l’homme d’affaires algérien a ainsi voulu faire mourir Khalifa TV par un simple dépôt de bilan pour la faire renaître dans la capitale anglaise ? Encore faut-il que le groupe Khalifa possède les moyens financiers suffisants pour entreprendre de faire redémarrer le rêve brisé de Rafik Khalifa d’une « M6 algérienne et internationale »...