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Liz Trubridge (Downton Abbey) : « Nous souhaitons arrêter avant que la qualité ne se détériore »

Claire Varin
Publié le 19/09/2013 à 20:24 Mis à jour le 30/10/2013 à 22:49

En juillet 2013, Liz Trubridge était en France pour présenter la saison 3 de Downton Abbey à l’occasion du Festival Série Series. La productrice a répondu aux questions de Toutelatele, évoquant le succès mondial de la série, mais aussi les moments forts qui ont traversé cette saison. Rencontre.

Attention, cette interview comporte des spoilers sur la saison 3 de Downton Abbey

Claire Varin : Comment décririez-vous la tonalité de cette saison 3 de Downton Abbey ?

Liz Trubridge : Nous avions toujours espéré pouvoir faire trois saisons. Avant, pendant et après la Première Guerre mondiale pour voir comme la vie a changé durant cette période. Cette saison 3 ressemble beaucoup à la première, car l’histoire se ressert sur la famille Crawley et les domestiques. La saison 2 étant assez sombre, nous voulions commencer celle-ci sur une sensation différente et plus légère. Le mariage de Mary et Matthew était une bonne manière de le faire. On s’est aussi concentré sur les problèmes autour de la maison, l’augmentation des taxes, etc. On pouvait ainsi mettre en résonance la situation de l’après-guerre et l’impact sur la vie des gens à travers toute l’Europe avec ce qu’il se passe aujourd’hui.

Dans cette saison 3, il a eu deux départs marquants. Le public a beaucoup commenté la disparition de Matthew, mais assez peu celle de Sybil…

Je crois que le couple formé par Mary et Matthew était très iconique. Ils étaient la romance de la série. Ce qui est arrivé était impensable pour le public, d’autant plus qu’ils venaient d’avoir un bébé. En Grande-Bretagne, cet événement a été diffusé à Noël. Ce n’était pas une bonne chose. Mais nous savions que nous devions le faire. Tous les acteurs avaient signé des contrats pour trois saisons et nous savions que Dan Stevens (qui incarne Matthew, ndlr) voulait partir travailler aux États-Unis. Nous avons donc eu un an pour penser à ce départ. Nous ne pouvions pas le faire revenir en début de saison 4, car il joue une pièce de théâtre aux États-Unis. Donc s’il devait partir nous devions le faire dans le dernier épisode. Tuer quelqu’un à Noël est vraiment déprimant. Il nous a fallu beaucoup d’audace.

Vous a-t-il semblé difficile de trouver un autre comédien pour le « remplacer » ?

La saison 4 débutera six mois après l’accident. Nous ne voulions pas le remplacer immédiatement parce que les gens ne remplacent pas comme ça l’amour de leur vie. Ça n’aurait pas été acceptable pour le public. Ça va prendre du temps avant que Mary parvienne à se reconstruire. Et en même temps, les hommes ne cessent pas d’être intéressés par elle. Mais honnêtement, le « ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants » ne fait pas une histoire intéressante. Pour faire une bonne histoire, il faut du tragique et de l’inattendu.

« Le couple formé par Mary et Matthew était très iconique »

Concernant le départ de Jessica Brown Findlay (Sybil), qu’en est-il ?

Jessica est une très jolie femme. L’Amérique la voulait pour beaucoup de gros films. Nous n’avons pas voulu la retenir et l’empêcher d’accomplir d’autres projets.

Le succès vous fait perdre vos acteurs…

Effectivement, c’est le problème avec le succès (rires). Mais heureusement, la plupart des comédiens tiennent à rester dans Downton Abbey. Pour les plus jeunes d’entre eux, l’ascension est gigantesque. Et pour les plus âgés, c’est aussi une jolie plateforme pour exprimer leur talent. L’écriture de Julian Fellowes est tellement riche. Vous n’avez pas si souvent l’opportunité de travailler avec une matière comme celle-ci.

Partie 2 > La saison 4 et les projets


Vous, Britanniques, ne semblez jamais avoir peur de tuer vos personnages…

Nous voulons être réalistes. Ce genre de chose arrive dans la vie. Les gens meurent. Et nous souhaitons aussi avoir des références historiques. À l’époque, donner naissance à un enfant était dangereux. Des femmes mourraient. Et en termes d’histoire, on emmène le public dans un voyage. On ne peut qu’espérer qu’ils restent avec nous (rires).

Avoir des guests comme Shirley McLaine fait partie des bons côtés du succès de la série. Reviendra-t-elle dans la saison 4 ?

Oui, elle revient pour un épisode. C’est merveilleux de l’avoir. Downton Abbey est aussi un grand succès aux États-Unis. Je crois qu’on peut l’expliquer par l’histoire commune entre nos deux pays. Cora est Américaine et elle a épousé un riche Anglais pour sauver la maison. Et c’est quelque chose qui se faisait à cette époque. C’est même arrivé dans la maison (Highclere Castle, ndlr) dans laquelle nous tournons. Les Américains vivent aussi leur Histoire à travers la série.

Avez-vous une idée du nombre de saisons que vous aimeriez encore faire ?

On ne veut pas continuer pour continuer. Nous souhaitons nous arrêter avant que la qualité de la série ne se détériore. Et d’un point de vue narratif, nous n’irons pas jusqu’aux années 30. Ce serait stupide vu l’âge de nos personnages. Nous devons rester crédibles. Il s’est produit tellement de choses durant les années 20 qu’il y a encore beaucoup d’histoires à raconter. La grève générale, tous ces mouvements de musique et de danse, l’époque a été très intéressante pour les femmes. La mode a énormément changé durant cette période. Nous nous amusons beaucoup à tourner cette saison 4 parce que la jupe fait son apparition.

« Le succès va au-delà de tout ce que nous avions pu imaginer »

Avez-vous personnellement du temps pour développer d’autres projets ?

Je développe un autre projet de série avec Julian. Nous produisons onze heures de télévision par an. C’est beaucoup et ça ne laisse pas vraiment de temps pour autre chose. Mais c’est merveilleux à faire. Je ne me plains pas.

Peut-on dire que la période est heureuse pour la production britannique ?

Ça l’est ! Principalement parce que les lois sur les taxes ont changé. Cela amène beaucoup de productions américaines en Grande-Bretagne. Bien sûr, les périodes sont variables. Parfois, c’est le cinéma, et d’autres, la télévision.

Combien de pays ont acheté Downton Abbey à ce jour ?

Downton Abbey est vue dans plus de 200 territoires à travers le monde. Un de mes amis est allé dans le Cercle polaire arctique avant Noël et il m’a envoyé un mail pour me dire que Downton Abbey avait beaucoup de succès là-bas. La série touche le public aux quatre coins du monde. C’est incroyable. C’est au-delà de tout ce que nous avions pu imaginer.