Toutelatele

M.Pokora met carte sur table

Tony Cotte
Publié le 26/05/2008 à 12:23 Mis à jour le 27/05/2022 à 00:41

Il y a encore quatre ans, M Pokora était considéré comme un simple phénomène de mode destiné à encaisser l’argent de poche d’un public féminin versatile. Au fil des années, le jeune homme a prouvé par sa détermination qu’il pouvait être autre chose que l’objet des fantasmes des collégiennes. Après avoir vécu son rêve américain, l’artiste est de retour sur la scène musicale depuis le début de l’année avec un nouvel opus aux collaborations prestigieuses. Toutelatele.com a été le seul support français à rencontrer M Pokora lors de sa courte escale à Paris au milieu d’un marathon promotion entre la Suède et le Mexique. L’occasion pour l’interprète de Dangerous de s’exprimer, entre autres, sur ses ventes de disques jugées à tort comme « décevantes » par les médias...

Tony Cotte : On vous retrouve le 11 juin prochain sur Nickelodeon pour commenter la cérémonie des Kids’ choice awards. Pourquoi avoir accepté cette proposition ?

M Pokora : J’ai toujours kiffé les cérémonies américaines : il y a du show, c’est marrant et tous les artistes répondent présents. J’adore regarder ce genre de programmes même si certains considèrent les Kids’ choice awards comme une soirée pour gamins. Usher, Chris Brown ou encore Rihanna s’y rendent et c’est une véritable marque de respect pour leur public. En France, seuls les NRJ Music Awards s’apparentent à une cérémonie américaine : il n’y a pas de discrimination, et tant mieux, c’est celle que je préfère.

Aimeriez-vous voir davantage de cérémonie de cette envergure se développer en France ?

C’est sûr ! Si on prend les Victoires de la Musique, c’est emmerdant au possible ! Dans la catégorie rap, ceux que l’on considère comme les meilleurs ne sont jamais nommés. C’est vraiment du « washi washa » entre les maisons de disques et les gens du métier.

Si un jour le comité artistique des Victoires s’intéresse à votre musique, refuseriez-vous de vous y rendre ?

Ce n’est pas du tout pour moi. La reconnaissance du métier ne m’intéresse pas, seul le public m’importe. Les maisons de disques votent entre elles, les salariés de Polydor vont forcément soutenir un artiste d’Universal, ceux de EMI vont choisir dans le catalogue de Virgin, Capitol et d’autres labels du groupe. C’est de la connerie...

En sortant votre album à l’international, allez-vous participer à ce genre d’événements à l’étranger ?

Je l’ai fait récemment en Allemagne lors des BRAVO Supershow 2008. Je n’étais pas nommé, mais j’ai eu la chance de « performer » mon single sur scène. Peut-être, y aura-t-il les MTV Europe Music Awards à la fin de l’année ?

Votre collaboration avec Timbaland vous permet-elle d’assurer une promotion digne de ce nom à l’étranger ?

Je reviens d’une tournée promotion en Suède et Finlande (l’interview a été réalisée le 16 mai dernier, ndlr). J’ai été interviewé par MTV Scandinavie, je suis passé sur Voice TV, la première chaîne musicale dans les pays du nord. En Finlande, je suis dans Cosmopolitan et je fais prochainement un photoshoot pour Rolling Stone au Mexique. Dans les autres pays, le regard sur moi est différent, les journalistes n’ont aucun préjugé. En France, on refuse d’accepter mon évolution, on me voit toujours comme un gamin de 17 ans et au bout de cinq ans c’est un peu chiant. L’ouverture d’esprit est plus agréable à l’étranger, c’est un véritable bol d’air en tant qu’artiste.


Popstars est un concept international, les journalistes étrangers évoquent-ils souvent votre participation à l’émission ?

Oui car c’est indiqué dans ma biographie, et je le revendique complètement. Faire de la télé réalité n’est un préjudice que dans très peu de pays. En France, la situation commence à évoluer grâce à des Christophe Willem et Julien Doré. C’est encourageant...

Vous avez déclaré au quotidien 20 Minutes : « Avec Timbaland, il n’a pas été question de chéquier, mais d’amitié ». Pourtant, selon Paris Match, votre collaboration aurait coûté à EMI la modique somme de 800 000 dollars !

Je n’ai même pas ce budget-là pour l’ensemble de mon album, déplacements et production compris ! Pour donner une idée, un bon album français coûte environ 100 000 euros. 800 000 dollars c’est le budget d’un album de Madonna ! Jamais, nous n’aurions investi une telle somme surtout que je n’étais même pas signé à l’époque. Si Timbaland avait besoin d’oseille avec M Pokora, je lui souhaite alors bon courage...

Comment sans maison de disque peut-on convaincre le producteur le plus en vogue de la planète de collaborer avec soi ?

Les gens ont du mal à concevoir que j’ai fait un duo avec Nelly Furtado lors des NRJ Music Awards. Le feeling est très bien passé entre nous et son staff a beaucoup aimé ce que je faisais. Ils avaient connaissance de mes envies d’un album en anglais et m’ont proposé leur aide. J’ai ensuite été mis en relation avec le manager de Timbaland. Je me suis présenté, j’ai montré le DVD de ma tournée et les publicités que j’ai faites. Ils étaient impressionnés et ne pensaient pas qu’un petit français pouvait faire ça.

On le dit peu souvent mais votre album MP3 comprend également les participations de J.R Rotem, Jim Beanz (Britney Spears) ou encore Guy Chambers (Kylie Minogue, Robbie Williams). Avez-vous pu atteindre ces producteurs uniquement grâce à votre collaboration avec Timbaland ?

Ryan Leslie a été, en réalité, le premier producteur que j’ai rencontré. J’ai vu également J.R Rotem avant Timbaland lorsque j’étais à Los Angeles. Je rencontre de nombreux producteurs en me présentant de la même façon, je n’ai pas besoin d’évoquer mes autres collaborations pour les convaincre de travailler avec moi.

Faire de la musique avec tout ce beau monde ne rend-il pas un artiste très exigeant pour ses futures collaborations ?

Je travaille avec les Bionix (producteurs belges, ndlr) depuis quelque temps et je continuerai. Pour beaucoup de connaisseurs, la ballade que nous avons faite (Climax, ndlr) est le meilleur titre de mon album. J’ai toujours été pointilleux dans mes choix artistiques. Quand on réalise son premier opus avec Kore & Scalp, les meilleurs producteurs de hip-hop et r&b en France, forcément on démarre à un certain niveau. Récemment, j’ai fait un featuring avec le rappeur LaZee pour son prochain album avec des prods suédoises. La barre est haute dans les pays du nord, on y trouve les auteurs des plus grands tubes de Britney Spears. En voyageant là-bas, j’ai vu plein de choses intéressantes pour la suite de ma carrière...


Les comparaisons avec Justin Timberlake sont inhérentes à votre parcours. Depuis vos débuts, les médias font souvent le rapprochement et plus particulièrement depuis la sortie de votre dernier opus. Si le parallèle n’a souvent pas lieu d’être, vous donnez en revanche de la matière avec votre clip Dangerous...

L’histoire de ce vidéoclip est compliquée. Nous avons eu des problèmes avec la société de production américaine d’origine. Le concept initial était inspiré d’un sport publicitaire pour la compagnie Boost Mobile avec Jermaine Dupri. Nous nous sommes fait arnaquer par la boite de prod et avons dû, en seulement quatre jours, recommencer tous les fonds verts. C’est une vidéo qui a coûté très cher avec de nombreux déplacements à Miami, Los Angeles et Paris. Puis, nous avions voulu nous inspirer des publicités de l’Ipod pour la deuxième version. Tout ça a été fait vraiment dans le speed. Je le dis partout : je déteste cette vidéo, c’est la pire de ma vie ! Ma seule satisfaction est d’être dans un clip avec Timbaland et la « Dangerous Girl », une ancienne danseuse de Usher sur qui je bavais quand j’étais plus jeune (rires).

On parle souvent de vos ventes de disques décevantes même s’il est encore trop tôt pour faire un bilan ...

... (il coupe) les médias oublient que j’ai vendu plus de 80 000 téléphones avec mon album à l’intérieur. À ce stade, plus de gens possèdent mon disque légalement que mon premier opus. Je ne considère pas cela comme un échec. À part Elle me contrôle, aucun de mes titres n’a été autant diffusé en radio et en télévision. Dangerous figure même dans le top 50 de l’airplay européen (titres les plus joués sur les ondes, ndlr), dans les 10 premiers au Mexique et dans le top 5 en Finlande. Mais je savais pertinemment qu’en chantant en anglais l’engouement serait différent en France...

Vous attendiez-vous à un effet Carla Bruni ?

M Pokora : Honnêtement, je ne me focalise pas là-dessus. La seule chose qui me préoccupe c’est de savoir si je vais bien dormir ce soir et pour cela je dois être fier de ce que je fais. Je suis bien plus heureux aujourd’hui avec 30 000 ventes physiques qu’il y a deux ans où j’en avais vendu le double à la même heure. J’estime avoir franchi une étape artistiquement parlant. Dans quelques jours (l’interview a été réalisée le 16 mai dernier, ndlr), je vais faire les plus gros talk-shows du Mexique ! Les gens vont-ils être, pour une fois, fiers qu’un français traverse les frontières et figure dans les titres les plus diffusés à l’étranger ? Pourquoi tout le temps enlever du mérite à ce que l’on fait ? Même si c’est tendance de cracher sur moi, je n’ai jamais autant suscité l’intérêt du public. Je vis le kiff total et ma tournée sera même européenne.

Là encore, certains supports évoquent des dates françaises annulées comme Saint-Étienne, Rennes, Le Mans et Orléans...

C’est vrai mais ce sont les villes déjà annulées sur la première tournée. Il reste 25 autres dates et elles se vendent bien. À sept mois du concert belge, le Forest National, salle de 8000 places, est presque « sold-out » (complet, ndlr). Qui n’a pas de souci aujourd’hui pour remplir l’ensemble de ses concerts ? Je n’ai jamais vendu un million de disques et je suis encore loin du compte. Mon concept de tournée n’est peut-être pas prédisposé à plaire aux Français pour le moment. Aujourd’hui, les gens se précipitent aux concerts acoustiques de Maé, Willem et d’autres artistes issus de la nouvelle scène française. Pour ma part, je voyage dans le monde entier, je réalise mes rêves de gamins et, surtout, je suis heureux !