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Télé Réalité : quand les célébrités se prennent au jeu

Aurélie Demarcy
Publié le 26/03/2007 à 00:52 Mis à jour le 16/04/2009 à 16:32

Après avoir marqué un tournant dans l’histoire de la télévision, amorcé en France par l’émission Loft Story, la télé réalité fait, sans conteste, partie intégrante du panorama audiovisuel mondial. Néanmoins, à l’heure où la société est marquée du sceau de la surconsommation, la télévision, miroir des mœurs modernes, se doit d’être en phase avec les attentes de la cible, où autrement dit celles du téléspectateur. Les producteurs l’ont bien compris, un programme, aujourd’hui ne peut se suffire à lui-même ad vitam eternam, aussi faut-il faire preuve de renouvellement, afin de capter l’attention d’un auditoire qui, muni de sa télécommande, peut zapper à sa convenance.

En France, les faibles succès de Nice People et des Colocataires ont été représentatifs de cette lassitude rencontrée par le public à l’instar du concept de Big Brother ou autre Loft Story qui consistait à suivre le quotidien d’anonymes enfermés entre quatre murs. Bien que ces émissions fassent encore les beaux jours de certaines chaînes Outre Atlantique - en Grande Bretagne Big Brother en est à sa cinquième saison et l’on parle d’un prochain retour du programme sur les écrans français de TF1 - force est de constater que d’une manière générale, les caméras de la télé réalité font les yeux doux aux célébrités, invitées à se mettre en scène, dans des situations peu banales, voire même cocasses.

Terminée l’époque ou la personne publique faisait figure de symbole de perfection, aujourd’hui celle-ci écorne son image, se déleste de tout artifice et n’hésite pas à s’afficher à l’état brut. Au même titre que les anonymes qui dans Incroyable Talent ou autre Nouvelle Star doivent faire preuve de performance, les célébrités s’alignent et doivent à leur tour répondre à des défis, mais cette fois-ci, aux antipodes de leurs spécialités respectives.

D’ordre artistique, ces épreuves ont remporté un franc succès auprès des téléspectateurs. Ainsi, dans Skating with celebrities, des peoples totalement novices en matière de patinage, sont mis en compétition. C’est sous les conseils avisés de professionnels de la glace que ceux-ci suivent un entraînement musclé, au terme duquel ils sont amenés à faire partager leurs performances au public. Adapté du concept américain, ce programme, présenté par Flavie Flament, lors de sa diffusion française en juin 2006 sous le titre du Grand défi de la glace, a su séduire 5.6 millions de téléspectateurs et 35.1% de part d’audience auprès des 15/34 ans. Egalement, déclinée en version Allemande, Stars auf eis, diffusée sur le réseau Pro 7, utilise un format avoisinant le genre du feuilleton, car constitué de 7 épisodes. Ainsi, les figures de style sur glace se sont révélées fédératrices puisqu’elles ont, par ailleurs, généré la création de Dancing on ice, adaptée en version, australienne ; Torvill and dancing on ice sur la chaîne Network 9 en août 2006, espagnole ; Desafio bajo cero diffusée sur Tele 5, en septembre 2006, ou encore allemande, sous le titre éponyme, sur le réseau RTL, en octobre 2006.


« Et si l’on faisait chanter des acteurs ? » c’est autour de ce projet que se sont associées les producteurs américains Syci TV, Michael Levitt Productions, A. Smith & Co Productions et Fox Television Studios. En août 2006 sur le réseau américain Fox, huit comédiens formés respectivement par un coach vocal reconnu, se sont affrontés à coup de vocalises dans Celebrity Duets. Sur le modèle des académiciens de Dammarie Lès Lys, chaque semaine les chanteurs en herbe étaient mis en compétition au cours d’une émission qui se refermait sur l’élimination de l’un d’entre eux.

Le monde du cirque, à son tour fait l’objet de toutes les convoitises et c’est entre les trapèzes et autres acrobaties que douze people défendent leur place dans Celebrity circus, une émission sortie tout droit du chapeau magique d’Endemol. Diffusée en Italie sur Canal 5, courant septembre, elle parvient à réaliser une part d’audience de 21.8% sur le cœur de cible des 15/34 ans, et rejoint les écrans d’Outre Manche, un mois plus tard. Cependant, le british Reality Circus, occupant la case de l’avant prime de Sky One déçoit et se cantonne à une part de marché de 3.8% chez les 16/44 ans.

Mais attention ! Ces peoples sont également prêts à quitter leur luxueux train de vie pour emprunter celui de Péking express. Ainsi, dérivé de Pékin Express, connu à travers l’hexagone grâce à M6, Peking express vip, diffusée aux Pays Bas, en septembre 2006, répond aux mêmes règles du jeu, avec les strass en plus, ou en moins puisqu’en l’occurrence, douze célébrités sont mises au défi de parcourir 4000 kilomètres à travers l’Inde. Seul un euro par jour leur est octroyé, le bon déroulement de leur itinéraire ne devant résulter que de leur débrouillardise. Une traversée au terme de laquelle les gagnants ont été invités à participer au second opus du programme, trois mois plus tard, tourné en pleine jungle d’Afrique du Sud, dans Wildebeesten. Ce concept ne va pas sans rappeler celui d’émissions comme Je suis une célébrité, sortez- moi de là ! ou Première compagnie sur TF1, dans lesquelles les célébrités se montrent à l’état brut devant le regard amusé ou attendri d’un téléspectateur qui « re »découvre la personne publique dans toute sa gaucherie et son imperfection, bref son humanité.

Pas de poudre aux yeux donc, les peoples sont des monsieur et madame tout le monde et loin de les desservir, cette revendication est, de nos jours, interprétée comme une marque de sincérité. Des mises à l’épreuve qui font alors leurs preuves auprès du public en demande. Ainsi, en janvier 2007, la chaîne américaine BBC2 proposait de suivre les frasques de huit personnalités qui, l’espace de vingt épisodes, s’improvisaient comme rangers, dans Safari School, produite par Endemol. La première diffusion du programme, en fin d’après-midi, a réalisé une part d’audience de 8.9% chez les plus de 16 ans.


La télé réalité est un puits sans fond d’idées à faire proliférer et les célébrités, souvent en mal de reconnaissance, l’entendent également de cette oreille. Ainsi, les déclinaisons de ces compétitions du réel ne cessent de pulluler. En novembre 2006, les peoples anglais de The race troquaient leurs quatre roues citadines contre des bolides de Formule 1, tandis qu’un échantillon de célébrités, ayant rejoint la Police Academy, traquaient « le mal » et s’échinaient à faire respecter la loi dans Armed and famous sur CBS. Mieux ! Ce n’est plus le réel mais le surréel qui inquiètent les protagonistes de Celebrity Paranormal Project. Faisant écho au célèbre long-métrage Poltergeist, les protagonistes de ce jeu invitaient les téléspectateurs à les suivre dans une exploration des mondes parallèles.

Bien qu’avides d’aventures et d’émotions fortes, les peoples ne renient cependant pas, des préoccupations dignes de chaque citoyen, à savoir les tâches domestiques. Aussi, les célébrités endossent le rôle de nounou dans So you think you can nurse ?, un programme anglais, diffusé en janvier 2007, dans lequel six participants, sous l’œil avisé de professionnels, devaient s’adonner aux joies de la garderie. En août 2006, aux Pays-Bas, la chaîne Talpa voit ses peoples se confronter à une autre forme d’éducation ; celle des chiens, dans Woef ! Hoe word ik been beroemde hond ? Coachés par des dresseurs, l’enjeu pour les protagonistes était d’obtenir de leur animal de compagnie, un « comportement » irréprochable en toute circonstance, avec à la clé l’élection du chien idéal ! Manifestement ce concept, hormis peut-être un « traumatisme canin » pour les animaux en plateau, n’aura pas eu de conséquence fracassante en termes d’audience. Diffusé en prime time, son record aura été établi auprès des 20/34 ans, avec seulement 4.9% de part de marché. Sur M6, le concept a été adapté sous le titre Au secours, mon chien fait la loi !.

Mais qu’à cela ne tienne, la télé réalité persiste et signe dans les méandres des concepts en tous genres. Ainsi, les peoples anglais s’attèlent à la culture et retournent sur les bancs de l’école dans Excuse my French. Livrés à l’enseignement de trois professeurs venus de L’Institut français, un mois leur est accordé afin de maîtriser la langue de Molière. Là encore le public boude le programme qui, diffusé en prime sur BBC2, n’atteint qu’une part d’audience de 7.1% chez les plus de 16 ans. De son côté, le chanteur Gordon, célèbre aux Pays-Bas se lance dans une entreprise commerciale, en développant sa ligne de vêtements. Au cours de deux épisodes, diffusés sur le réseau Talpa, celui-ci va suivre l’itinéraire propre à toute nouvelle entreprise commerciale, avec ses embûches et ses réussites. Une quête initiatique des temps modernes qui se solde, à nouveau, par un résultat peu probant concernant l’assiduité du public.

Quoiqu’il en soit, ce bref tour du monde télévisuel confirme, une fois de plus que les programmes de télé réalité ont encore de beaux jours devant eux. Mettant en scène des célébrités, amenées à se surpasser et à faire preuve de modestie, ces émissions ont trouvé un angle différent pour captiver le téléspectateur. Car si l’anonyme de Loft Story agissait comme un double pour le citoyen lambda qui se reconnaissait en ce héros du quotidien. Ici, le people démystifie l’image sacrée de la « star » en se produisant dans des situations à contre emploi. Ainsi, hors de son contexte de prédilection que sont le chant, la comédie ou autre discipline considérée comme noble, il comparaît dans des activités qui de manière inévitable, le pousse à dévoiler ses travers, ses doutes et ses faiblesses. Des caractéristiques inhérentes à chaque être humain, dans lesquelles monsieur et madame tout le monde sont indirectement appelés à se reconnaître, s’identifier et, statistiquement parlant, s’intéresser.