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Alban Etienne : « Ce prime de Nos chers voisins est un cadeau pour les téléspectateurs »

Claire Varin
Publié le 16/12/2013 à 19:27 Mis à jour le 20/12/2013 à 15:53

Pour ce second prime événement, intitulé « Avis de tempête » sur TF1, Nos chers voisins s’offre une ribambelle de guest-stars. La shortcom à succès, produite par la société Ango Productions, s’étire dans une aventure de 100 minutes. Rencontre avec son producteur Alban Etienne.

Claire Varin : Que réserve ce prime time hivernal de Nos chers voisins ?

Alban Etienne : En pleine tempête de neige, un homme, joué par Jean-Marie Bigard, va prendre en otages l’ensemble des habitants du 28 rue de la source. Il s’agit du fil rouge de ce prime, avec des cliffhangers... Au milieu de tout ça, nous avons placé des sketchs de guests, avec Roselyne Bachelot, La Fouine ou bien encore Francis Huster. C’est un travail très différent de la quotidienne. Ce n’est pas un assemblage de sketchs mis au hasard. Il y a un vrai fil rouge autour d’une question : que va-t-il advenir de nos personnages ? Tout ça reste évidemment sur le ton de la comédie.

Faire appel à des guests est-il un passage obligé pour un 20h50 ?

Il y a énormément de téléspectateurs qui nous suivent tous les jours à l’antenne. On a un peu l’impression de leur faire un cadeau spécial. En gros, c’est pour remercier tous les téléspectateurs présents depuis un an et demi.

Vous avez un panel d’invités très large, allant de comédiens à des sportifs en passant par une ex-femme politique. Pourquoi aller chercher Roselyne Bachelot ?

On a pris contact avec Roselyne Bachelot et elle connaissait Nos chers voisins. Elle a souhaité qu’on lui envoie les sketchs avant d’accepter. Les textes lui ont plu et elle est venue avec plaisir. On essaie d’avoir des personnalités de tous milieux. C’est pour ça qu’on a des comédiens, des animateurs, des sportifs et des chanteurs. On ne veut pas s’enfermer. Pour le prochain prime, on pensera à d’autres personnalités politiques parce que ça nous fait marrer. En général, les hommes ou les femmes politiques ont pas mal d’aisance et de gouaille. Ce sont des bons clients et ils n’ont pas peur des caméras, car ils ont l’habitude. Et Roselyne Bachelot, « elle envoie sévère » comme on dit.

Francis Huster a participé à l’écriture de son personnage. Quelle en est la raison ?

C’est un fou de théâtre et on a énormément de comédiens de théâtre dans Nos chers voisins : Martin Lamotte, Christelle Reboul... Il avait envie de jouer avec eux et nous a dit « N’hésitez pas si vous avez envie d’écrire sur moi en tant que Francis Huster, ça pourrait être drôle ». Nous l’avons écouté. Il joue son propre rôle. Et les sketchs sont vraiment énormes.

« Pour le prochain prime, on pensera à d’autres personnalités politiques parce que ça nous fait marrer »

Nos chers voisins est née d’une anecdote qui vous est personnelle. À partir de cette idée, le format shortcom s’est-il imposé de lui-même ?

À l’époque, il n’y avait pas de créneau sur TF1. Mais la scène que j’ai vécue était très shortcom. Mes voisins sont venus dîner un dimanche soir et ils se sont enfermés dehors. Ce sont des férus d’alpinisme. L’un est descendu en rappel du cinquième au troisième étage et a cassé sa fenêtre. La scène a duré deux heures, mais quand vous la raconter, c’est assez court. Quand on a créé le pôle d’auteurs, ça parlait à tout le monde. Tous avaient plus ou moins eu des problèmes ou connaissaient leurs voisins... C’est un sujet « universel ». Cela explique aussi les succès d’audiences. Tout le monde s’y reconnait.

Pep’s est également une de vos idées...

J’ai deux filles de sept et trois ans. Il y a deux ans, je faisais la réunion avec les parents d’élèves de ma grande. Un père a fait un scandale parce que la salle de classe n’est pas équipée en Mac, mais en PC. La situation était marrante de mon point de vue, pas forcément pour l’institutrice. J’ai demandé à deux auteurs, Céline et Martin Guyot, si ça les intéressait d’écrire une bible, que l’on a ensuite envoyée à TF1. Ça s’est fait très rapidement, en un mois. Ca a été la même mécanique que pour Nos chers voisins. La chaîne a donné son accord et on a tourné un pilote. Deux mois après, TF1 donnait le feu vert pour une série.

Partie 2 > Les coulisses de la fabrication de la shortcom et ses limites


Le pilote est un procédé de vente qui semble se développer en France...

À l’étranger, tout le monde fait des pilotes. C’est génial parce que ça vous permet de caler l’écriture, la production et de voir toutes les problématiques sur la lumière, le casting, sur la réalisation… C’est un énorme avantage. Je suis un pro-pilote.

Peut-on parler de fonctionnement industriel concernant la shortcom ?

Totalement. Ça se rapproche de la dynamique des séries américaines. On a trois directeurs de collection qui s’occupent chacun de dix auteurs. Chez Ango productions, on reçoit environ 150 sketchs par semaine. Les directeurs de collection font un premier tri au sein de leur pôle. Ensuite, la directrice littéraire de chez Ango, Sarah Farahmand, lit les textes des trois pôles. Puis, on les envoie à TF1. C’est après la validation de la chaîne que l’on part sur le plateau de tournage.

Quelles sont les limites imposées par TF1 ?

Il n’y a pas vraiment de sujets interdits. Quand on écrit, on sait très bien que ça passe avant ou après le JT, donc ça reste de l’access. On ne peut pas faire de sketch sur le porno. C’est assez logique. On ne peut pas avoir des sketchs interdits aux moins de 12 ans, donc il ne peut pas y avoir de sang et des gens découpés. À part ça, on n’a pas trop de problème. Actuellement, on est à environ 2800 sketchs validés.

« Les auteurs français sont très bons dans la shortcom »

La shortcom est-elle en train de « sauver » la création française ?

On s’aperçoit que l’on a des auteurs français qui sont très bons dans la shortcom. C’est vraiment à mettre au profit des auteurs. Il y a une bonne maîtrise. Et surtout, ça plaît au public. D’ici les trois ou quatre ans à venir, la shortcom a de beaux jours devant elle. Après, on évoluera sûrement vers un autre format. Mais ce succès en France commence à intriguer les diffuseurs et producteurs à l’étranger. Nos chers voisins est, par exemple, diffusée au Brésil.

Reconnaissez-vous que le succès de Scènes de ménages a été un tournant ?

Honnêtement, je crois que c’est plutôt Un gars, une fille qui a donné le la à ce genre de fiction en France. La série est arrêtée depuis plusieurs années et elle est toujours diffusée. Et puis, il y a le focus sur Jean Dujardin et Alexandra Lamy. Il a quand même remporté un Oscar et un César.

À l’origine, Un gars, une fille était une sitcom québécoise. Selon vous, pourquoi les comédies de 26 minutes n’ont jamais pris en France ?

Il y a une technicité d’écriture différente. Les Américains maîtrisent totalement le genre. Et il y a un truc qui a dû faire peur à tout le monde pendant pas mal de temps, c’est une série comme Friends. C’est difficile de passer derrière sur des projets comme ça. On souffre forcément de la comparaison.