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Alex Fighter (Will.I.Am 2 Starck) : les ambitions internationales d’un producteur français

Tony Cotte
Publié le 15/12/2013 à 18:31 Mis à jour le 18/12/2013 à 14:33

Son visage est connu des téléspectateurs du groupe M6, mais depuis quelques années Alex Fighter s’est tourné vers la production. S’il reste toujours en contact avec son ancien acolyte Adrien Lemaître (« on se voit une fois par semaine à peu près »), le jeune homme a réussi, en 2011, le pari fou de réunir Lady Gaga et Jean-Paul Gaultier devant sa caméra. L’échange a été vu dans de nombreux pays, dont une grande chaîne nationale aux États-Unis. Depuis, via sa société Update Productions, il ambitionne de réunir des noms internationaux. Ce dimanche 15 décembre, NRJ12 diffuse Will.I.Am 2 Starck ou la rencontre entre l’ancien membre de Black Eyed Peas et le célèbre designer.

Tony Cotte : Avec du recul, quel bilan dressez-vous de l’expérience Gaga by Gaultier ?

Alex Fighter : Entre la théorie, le moment où je me suis dit que réunir ces deux personnalités pouvait donner naissance à un bel échange, et le résultat, je n’ai pas été déçu. En termes de qualité de programme, je suis même ravi. C’est l’émission qui me permet aujourd’hui de donner naissance à des projets de cette même envergure. Le bilan ne peut qu’être positif.

Le fait d’avoir été diffusé sur The CW aux États-Unis a-t-il facilité vos démarches professionnelles par la suite ?

C’est une belle chaîne avec une belle image. Quand j’ai appris que The CW allait diffuser Gaga by Gaultier, je me suis mis à sauter comme un dingue et quand on m’a dit qu’il allait être programmé en prime-time, j’ai fait des saltos arrière. [Rires.] C’est aujourd’hui une excellente carte de visite pour proposer d’autres projets à des artistes internationaux, d’autant plus quand les audiences ont été bonnes.

« Gaga by Gaultier est aujourd’hui une excellente carte de visite »

Will.I.Am et Philippe Starck ont-ils vu cette émission ?

Ces personnalités, à leur niveau, reçoivent d’innombrables propositions tous les mois. Forcément, ils n’acceptent pas un projet d’émission sans se renseigner sur les personnes. Ils ont naturellement vu l’émission et l’ont beaucoup aimée. Gaga by Gaultier a même plus ou moins influencé l’édito de Will.I.Am 2 Starck : Philippe Starck m’a dit qu’il ne se projetait pas à tenir le même rôle que Jean-Paul Gaultier. Il fallait que l’échange soit différent et optimisé.

Quelle a été la principale difficulté lors de la préparation de Will.I.Am 2 Starck ?

Trouver une date de tournage a été un casse-tête chinois. On est face à deux personnes qui sont désireuses de se rencontrer, mais qui ont des plannings que l’on a du mal à imaginer. Ils sont tous les jours dans des pays différents avec le décalage horaire dans les pattes. Le tournage nécessitait au moins quatre heures pendant lesquelles ils devaient être en forme. Sur la production, toutes les informations devaient également être communiquées. Je suis un peu un maniaque du détail : je prépare des dossiers avec l’articulation de l’édito et toutes les spécificités des effets spéciaux. Ça vous oblige à travailler en français et en anglais avec deux interlocuteurs de nationalités différentes. C’est donc le double de travail...

Comment parvenez-vous à ajuster les calendriers pour une telle rencontre ?

Je pourrais contacter directement Will.I.Am ou Philippe Starck sur leur portable pour leur proposer une date, mais ils n’en ont aucune idée ; ils ne gèrent pas ça. Il y a un protocole à respecter avec un interlocuteur spécifique pour ce genre de démarche : cet agent a pour but d’insérer les quatre heures de travail dans une journée.

Quid des problèmes d’égo ?

C’est typique le problème invisible aux yeux des téléspectateurs et de nombreux professionnels. C’est aussi une grande difficulté dans mon travail. Will.I.Am a d’ailleurs décalé à deux reprises le tournage, dont une fois après le piratage de son album. Il a dû retourner en studio pour le refaire. Pendant ce temps-là, je suis obligé de maintenir le truc en ébullition auprès de l’autre camp. J’ai pris du temps pour tout expliquer. Ma grande frayeur a été, à ce moment-là, de perdre Philippe Starck. Mais dans ce genre de situations, il faut toujours dire la vérité…

Partie 2 > Le travail avec NRJ12 et la réalité du marché pour un producteur indépendant


Ont-ils eu des exigences quant à l’aspect visuel du programme ?

Quand vous posez Will.I.Am et Philippe Starck devant un fond vert pour réaliser des effets spéciaux, ils veulent naturellement savoir ce que ça donner. Ils le font à l’aveuglette. Il faut donc travailler avec un moodboard et décrire en détails la texture de l’effet et évoquer les différentes références visuelles. Ils doivent pouvoir se projeter dans l’univers dans lequel ils vont évoluer à l’écran. Heureusement tout a été validé. Ils m’ont laissé aller au bout de mon truc et ça a été une grande satisfaction.

Vous êtes une nouvelle fois l’auteur de l’émission. En termes de narration, sortir des codes de l’interview traditionnelle rebute-t-il les diffuseurs généralement attachés à un cahier des charges strict ?

NRJ12 m’a laissé carte blanche pour l’écriture du documentaire. La ligne éditoriale de la chaîne ne ressemble en rien à Will.I.Am 2 Starck ; c’est une vraie prise de risques. Je dirais que ce n’est pas possible de proposer ce genre de programmes à ces deux artistes avec une écriture qui ne correspond pas à leur image.

« Will.I.Am 2 Starck est une vraie prise de risques pour NRJ12 »

Après Gaga by Gaultier, vous avez affirmé à Toutelatele.com vouloir créer un rendez-vous récurent de rencontres entre deux artistes. Ce projet est-il toujours d’actualité ?

La récurrence peut prendre du temps. Je n’ai pas pour vocation de proposer une hebdo, une mensuelle ou même une trimestrielle ; je veux garder un caractère événementiel. Je pourrais faire du Star 2 star (le nom de la collection, ndlr) plus régulièrement mais je ne peux pas garantir une programmation comme celle que je vise. Mon idée n’est pas de redescendre d’un cran. Si c’est pour faire Baptiste Giabiconni et ...

...Clara Morgan ?

ou Lorie ! Je pourrais alors faire un truc sympa, mais j’ai d’autres ambitions. Je suis en mesure d’assurer un ou deux numéro par an, mais toujours avec une programmation étonnante. Je n’ai aucune envie d’industrialiser ce concept. On a signé avec NRJ12 parce que Stéphane Joffre (directeur des programmes, ndlr) a compris cette idée. Il m’a dit que seule la qualité comptait. Je n’ai contractuellement aucune date de livraison. En tant que producteur, un contrat avec une chaîne peut vite devenir un cauchemar si vous ne parvenez pas à respecter la périodicité sur laquelle vous vous êtes engagé. Je suis en mesure de dire aujourd’hui que les prochains numéros de la collection Star 2 star seront de plus en plus surprenants. Et je n’ai pas de clause d’audience. On a juste signé sur le nombre d’émissions à fournir, mais je ne suis pas autorisé à le communiquer.

Vous préparez aujourd’hui On the road with Will.I.Am que vous venez de vendre à Shine International. Savez-vous quelles chaînes étrangères vont acquérir le programme ?

On le présente à un salon aux Etats-Unis en janvier. Il sera prêt en février et je sais que les commerciaux des chaînes internationales ont sondé le marché. Ils ont eu de très bons retours. Aujourd’hui, je n’ai aucune commande ferme puisqu’il n’y a rien eu de plus qu’un communiqué de presse, mais je suis confiant…

Au vu de l’état du marché, est-il facile d’être un producteur indépendant avec de fortes ambitions comme vous en avez ?

Si mes ambitions étaient franco-françaises, ce serait extrêmement compliqué. Le marché est difficile, les budgets sont clairement aux ras des pâquerettes. Mais j’ai toujours été fasciné par le marché international. Avec une vision plus élargie, les perspectives peuvent s’envoler très vite.