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Dexter ou la délicate transfusion de Canal+ à TF1

Tony Cotte
Publié le 17/02/2010 à 13:14 Mis à jour le 13/09/2013 à 11:47

« Cette nuit, c’est la bonne, mais ça va recommencer encore et encore, ça doit recommencer. Quelle douce nuit. J’adore vivre à Miami. J’adore la cuisine cubaine, leurs sandwichs au porc épicé. Mais ce soir, c’est un autre appétit que je veux assouvir...  » Le 17 mai 2007, les abonnés de Canal+ faisaient connaissance avec Dexter Morgan. Flic, ou du moins expert dans l’analyse de prélèvements sanguins du service médico-légal de la police de Miami, le jour et tueur en série la nuit, cet anti-héros par excellence fait enfin son arrivée sur TF1 ce jeudi 18 février dès 23h25, soit près de deux ans après l’annonce de son acquisition par la chaîne privée. Outre son arrivée à l’antenne de la Une, le personnage incarné par Michael C.Hall a le droit à une double actualité en débutant, le même soir, sa quatrième salve d’épisodes inédite sur Canal+...

Lancée sur Showtime en octobre 2006, Dexter attire, pour la diffusion de son pilote, quelque 600 000 curieux. Au fil des aventures, l’audience ne cesse d’augmenter, à l’instar de la sympathie du public pour le personnage principal. La fiction, développée par James Manos, Jr., co-producteur sur les Soprano et The Shield, compte sur plus de 2 millions de fidèles pour les derniers épisodes de la saison 4, proposés au mois de décembre dernier outre-Atlantique. Deux millions de téléspectateurs avertis acceptant le postulat suivant : le héros d’une série télévisée est un serial-killer et exerce ses tortures sur ceux qui le méritent, selon lui. Parmi le panel des victimes, on retrouve ainsi assassins, violeurs et autres pédophiles. Le public, lui, apprécie, cautionne, culpabilise parfois, mais craint surtout pour la peau dudit héros quand son secret est menacé. Par goût pour les missions du vengeur non masqué, le téléspectateur deviendrait-il partisan de la loi du talion ?

C’est, entre autres, une crainte de certaines associations américaines. La plus connue, le Parents Television Council, a pour objectif de proposer une télévision plus « saine » pour le jeune public. Nous sommes en février 2008, touché par la grève des scénaristes, le network CBS doit malgré tout combler sa grille des programmes et propose, en lieu et place de nombreuses rediffusions de ses shows habituels, Dexter sur son antenne. Le passage de la fiction d’une chaîne câblée payante (Showtime, filiale de CBS) à un réseau public à une heure de grande écoute n’est ainsi pas du tout au goût de la PTC. Au point où son Président demande, solennellement, au diffuseur de ne pas proposer la série, persuadé que malgré plusieurs coupes au montage, le message principal délivré ne peut être censuré, soulignant également le lien de causalité entre la hausse de la violence dans la société et le pouvoir des médias. Le 17 février 2008, Dexter fait, malgré tout, son apparition à l’antenne de CBS, déconseillé aux moins de 14 ans et avec le retrait de certaines scènes explicitement violentes et celles des rapports sexuels.

Un avant-goût du résultat final proposé par TF1 ? En effet, ces dernières années, certaines séquences de House, Heroes, Lost ou encore Grey’s Anatomy sont passées entre les ciseaux de la Une, sans évoquer 24, autre série de Canal+, diffusée plus tard sur la chaîne privée. Celle-ci a vu maintes fois ses scènes de tortures largement écourtées. Aujourd’hui, les aventures de Jack Bauer ne sont plus diffusées à l’antenne de TF1.

Alors qu’en sera-t-il de Dexter Morgan ? Avec une diffusion près de trois ans après celle de Canal+ et ses 900 000 fidèles, des centaines de milliers de DVD vendus dans l’Hexagone et bien plus de visionnages en streaming sur la toile, Dexter a-t-il ses chances de s’imposer en seconde partie de soirée ? Notre expert a de quoi se faire du mauvais sang...