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La ruée vers « Les Années Dorothée »

Alexandre Raveleau
Publié le 11/11/2007 à 00:09 Mis à jour le 12/12/2007 à 15:23

Jacques Pessis et les Editions Chronique créent actuellement l’événement auprès des 25/35 ans avec la sortie du livre album les Années Dorothée. 1978-1997 : ces vingt années de succès y sont décrites sans détour comme les plus riches de la télévision pour la jeunesse et ses produits dérivés. Tantôt critiqués, tantôt adulés, « la grande sœur de millions de copains » et ses programmes phares ont créé une génération de téléspectateurs, aujourd’hui devenus adultes. A travers les modes, les jeux, les séries et les vedettes, retour sur les années 80 et 90.

1er juillet 1978 : Dorothée participait à son premier Récré A2. Appelée par Jacqueline Joubert pour animer les programmes pour enfants, Dorothée était alors notamment entourée par Willy (William Leymergie), Cabu, Ariane et Corbier. A cette époque, les dessins animés vedettes étaient Goldorak, Wattoo Wattoo, la Bataille des Planètes, Maya ou Candy. Groquik demeurait l’emblème du chocolat en poudre, Chantal Goya chantait pour des millions d’enfants en robe de princesse et Magnum s’offrait une place au soleil sur le petit écran.

Pendant près de dix ans, Patrick Simpson-Jones a ainsi présenté Sport Récré A2, Jean Lacroix les Anagrammes et William Leymergie Maraboud’ficelles ! Dorothée, quant à elle, vendait déjà des centaines de milliers de disques, parmi lesquelles Hou ! la Menteuse, Rox et Roucky, les Petits Ewoks et les Schtroumpfs... Et sur scène, sa comédie musicale Au Royaume des Diguedondaine s’offrait même le Champs de Mars !

Dans les rayons de jouets, le kiki, les Bisounours et les Puffalumps faisaient le bonheur des plus petits, les Barbie celui des filles et les figurines GI Joe, Star Wars, Big Jim et Transmformers celui des garçons. Pour les plus grands, l’Amstrad à 5990 francs, Donkey Kong ou la NES occupaient les salons. Sans oublier qu’avec Végétaline, « quand c’est jour de frites, c’est jour de fête » !

1987 et la privatisation de TF1, changement de chaîne pour Dorothée et tous ses héros. Le Club Dorothée apparaît le 2 septembre 1987 à 9h30. Ses nouveaux producteurs se nomment Azoulay et Berda (AB). Le contrat signé annonce 22 heures de programmes par semaine, le matin et l’après-midi, en direct et en différé.

Depuis la Plaine Saint Denis où ont été construits quelques dix plateaux de télévision, un studio d’enregistrement et une piscine pour tourner les programmes de l’été, le Club Dorothée débute alors son ascension fulgurante, contrecarré dix années plus tard pour raisons de concurrence industrielle.

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Ariane, Jacky, Corbier, Patrick et les Musclés ont accompagné Dorothée dans tous les délires : Pas de Pitié pour les Croissants, le Jacky Seau (en référence à l’émission musicale le Jacky Show du mercredi), les dromadaires parlants ou le face à face autour du monde. Les sentaïs (Bioman, Power Rangers...) faisaient leur entrée par la grande porte, tout comme les séries américaines (Huit ça suffit, Ricky ou la belle vie ou plus tard Parker Lewis). Dès 1989, c’est au tour de Dragon Ball et les Chevaliers du Zodiaque de rencontrer le succès. Absurdes et violents pour les uns, très vite cultes pour les autres, les deux séries amorçaient pourtant la levée de boucliers face à laquelle seront contraints de répliquer Dorothée et ses producteurs.

« Dorothée ne doit pas voler leur enfance aux tout-petits et se doit de diffuser de la tendresse et de la poésie » écrivait ainsi Ségolène Royal dans son livre intitulé Le Ras-le-bol des bébés zappeurs dès 1989. Tout au long de ces dix années, le Club Dorothée aura été la proie de nombreux journalistes et intellectuels pour la « violence » (Ken le Survivant, Dragon Ball Z...) et la « bêtise » (les sitcoms, les japoniaiseries, les chansons...) de ses programmes. A cela plusieurs réponses dont la fameuse chanson des Musclés la Valse des... : « Des gens qui en savent plus - Parce qu’ils ont Canal plus - Ceux qui croient que Libé - Ne peut pas se tromper - Qui s’font leur cinéma - Avec Télérama - Ces gens-là - Ces gens-là sont des... ».

Côté concurrence, ce sont les années où Antenne 2 a successivement dégainé des émissions comme Giga ou bien l’animatrice Maureen Dor, avec des séries telles que le Prince de Bel-Air, Seconde B, BCBG... Sur FR3, les héros se nommaient alors Denver, Boumbo et les Petits Malins, alors que sur Canal +, l’Ile au trésor, COPS ou T’as l’bonjour d’Albert amusaient les enfants munis du décodeur. Aujourd’hui disparue, la grande rivale de Dorothée aura été la Cinq avec Youpi ! l’Ecole est finie, entre 17 et 18 heures. Au programme : Olive et Tom, Princesse Sarah, Embrasse-moi Lucile ou Max et Compagnie.

A son point culminant, le Club Dorothée comptait quelques 700 000 membres (dont les noms défilaient au générique le jour de leur anniversaire) et des dizaines d’heures d’antenne hebdomadaires. La grande messe du mercredi attirait des millions de téléspectateurs avec le Docteur Klein (avec Terre Attention Danger !), Madame Soleil, Monsieur Cadeau, les choristes Martine et Francine, Gérard Majax et tous les copains ! Chansons, sitcoms, magazines, concerts à Bercy : Dorothée et ses équipes travaillaient alors de 7 à 22 heures !

C’était le temps où les autocollants Panini s’échangeaient dans les cours de récréation, dans lesquelles d’ailleurs il n’était question que des amours d’Hélène, Lola et les autres. Le dimanche, des Millions de Copains (tourné depuis la véritable maison de Jean-Luc Azoulay) proposait les premiers épisodes d’Alerte à Malibu en clôture du week-end. Giant Coucou s’amusaient avec Madame Eugénie dans le Miel et les Abeilles. Le Bébête Show rivalisait toujours avec les Guignols de l’info. Et Hugo Délires ? Il ne pouvait avancer que grâce aux touches de votre téléphone bien sûr !

La fin de la partie a sonné en 1997. AB et Dorothée ont été priés de quitté l’antenne de TF1. S’achevaient avec eux la période des années 80/90, les Années Dorothée. Au travers du livre de Jacques Pessis, ce sont tous ces événements qui reviennent en images, si proches et pourtant déjà bien lointains.