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Les polars du vendredi : des séries à succès signées France 2

Cécile Raigne
Publié le 24/02/2006 à 01:36

Depuis plus de huit ans, les vendredis soirs de France 2 riment avec polar, dans une formule qui remporte tant de succès qu’en face, lorsque la Star Academy s’achève, TF1 est gênée aux entournures. En pariant en 1997 sur ce rendez-vous, la chaîne publique a réussi à ancrer dans le paysage audiovisuel français les héros récurrents de ses fictions novatrices. Sa « Soirée de polars » n’a, en effet, rien en commun avec les policiers triomphants du jeudi de TF1. Première adepte du format de 52 minutes, des intrigues feuilletonnantes, et des équipes soudées, bien avant l’arrivée de R.I.S : Police Scientifique, France 2 est devenue experte dans la programmation de fictions françaises réalistes, n’ayant pas peur d’être pessimistes. De P.J à Groupe Flag, en passant par La Crim’, Avocats et Associés, ou Central Nuit, retour sur l’engagement de la télévision publique dans des fictions où l’on se distrait avec conscience.

Quelle que soit la série diffusée, les chiffres d’audience des vendredis soirs de France 2 restent stables : 23% de part de marché en moyenne pour le premier épisode, 20% pour le second, et 18% pour le dernier. Certes, la rentrée venue, ces scores se trouvent écorchés par les prime time de la Star Academy. Certes, depuis plus d’un an, M6 est entrée dans la course, en programmant le vendredi des séries américaines qui ont entamé le bassin d’audience de France 2. Certes, « La Soirée de Polars » vit sur ses acquis et ne semble plus prioritaire en ce qui concerne les créations de la chaîne. Mais malgré tout, la franchise tient bon, signe que les téléspectateurs en redemandent.

Le public français raffole des polars, au cinéma comme à la télévision, pour peu que suspens et noirceur n’excluent pas une pointe d’humour. Depuis Les Cinq Dernières Minutes, où officiaient le commissaire Bourrel et l’inspecteur Dupuis, il y eut Maigret adapté de Simenon, interprété par Jean Richard puis par Bruno Cremer, qui surgit régulièrement en prime dans la soirée polars de France 2. Et d’innombrables 90 minutes dont Nestor Burma, Quai N°1, Boulevard du Palais ou Les Enquêtes d’Eloïse Rome, crées respectivement en 1991, 1996, 1999 et 2001, refont aussi des apparitions ponctuelles. Mais avec sa « Soirée de Polars », et l’installation à l’instar de TF1 d’un rendez-vous hebdomadaire pour téléspectateurs en mal d’intrigue, France 2 a révolutionné le genre et créé de nouvelles fictions policières ou judiciaires : P.J, en 1997, Avocats et associés, en 1998, La Crim’, en 1999, dont l’ultime saison est diffusée dès ce soir juste après les inédits de P.J, Central Nuit, en 2001, et Groupe Flag, en 2002.

Le choix du format de 52 minutes représente à lui seul un coup gagnant. Ses avantages sont multiples, à commencer par ses répercussions sur la structure de la grille. Par opposition aux 90 minutes dont il n’est possible de tourner que six épisodes par an, ce format en autorise douze et donc une récurrence hebdomadaire avec moins de rediffusions. Il permettait aussi à France 2 d’enchaîner, jusqu’à cette année, trois programmes au lieu de deux et de gagner ainsi une coupure publicitaire, et un potentiel d’audience plus long puisque sa seconde partie de soirée commence à 21h50 et non plus à 22h30. Enfin, financièrement, en plus d’être moins onéreuses, ces productions sont plus appropriées à l’exportation, puisque ce format est utilisé par la majorité des chaînes dans le monde.

Conformément à son cahier des charges, la chaîne publique a choisi parallèlement d’ambitionner le réalisme, pour que ces séries deviennent un miroir social. Contrairement à Julie Lescaut ou Navarro, héros positifs, moralisateurs et victorieux de TF1, ceux de France 2 sont souvent plus collectifs, plus ambigus et en proie à une société plus sombre, même si on a affaire à des polars peu violents. Mais le 52 minutes a aussi entraîné des évolutions artistiques qui expliquent le succès de ces fictions. Nombreux sont les fidèles de France 2 qui au-delà du polar sont passionnés par ce que vont devenir leurs alter egos dans la lucarne. La récurrence des épisodes a permis de développer une dimension feuilletonnante, et de s’attacher à plusieurs personnages.

Bientôt les mercredis soirs vont imiter leurs cousins du vendredi, mais dans un genre tout différent. Suite au succès de Clara Sheller, France 2 a en effet décidé de poursuivre l’aventure des 52 minutes en donnant leur chance à de nouvelles productions parmi lesquelles on devrait compter deux séries médicales, une série sur la famille et une autre dans laquelle un certain David Nolande (Frédéric Diefenthal) serait frappé d’une malédiction et condamné à sauver des vies pour protéger les siens... Tout un programme.