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V : Les visiteurs ont envahi TF1

Tony Cotte
Publié le 15/12/2010 à 14:12 Mis à jour le 15/12/2010 à 15:19

Jamais une lettre de l’alphabet n’aura été à ce point empreinte de souvenirs pour des millions de nostalgiques à travers le monde. Il suffit ainsi d’une simple évocation de V pour plonger toute une génération dans l’ambiance inquiétante d’une Terre occupée par des extra-terrestres aux intentions officiellement pacifistes. Pour beaucoup, la fiction de Kenneth Johnson restera ainsi deux mini-séries et une saison de dix-neuf épisodes devenues cultes. Les plus jeunes sériephiles, en revanche, peuvent découvrir depuis le 3 novembre 2009 outre-Atlantique et le 1er décembre dernier en France, son remake. Pale resucée pour les uns, adaptation efficace pour les autres, les avis sur ce V 2009 divergent. Retour sur une œuvre qui divise.

Octobre 2008. Scott Peters, co-créateur et producteur des 4400, est chargé de développer le retour des aventures de Mike Donovan et Julie Parrish sur petit écran, ou du moins de leurs successeurs, dont il a déjà écrit spontanément un premier scénario. ABC annonce la commande d’un pilote en janvier 2009 et celui-ci est réalisé quelques mois plus tard par Yves Simoneau, également présent sur les 4400. Si Scott Wolf, vu dans La Vie à 5 ou encore The Nine, est le premier acteur à être signé, ce n’est que quelques semaines plus tard qu’Elisabeth Mitchell, pourtant toujours au générique de Lost, crée la surprise en étant annoncée sur V. L’actrice quitte, malgré elle, la fiction de J.J.Abrams et reçoit, cinq jours après son départ, la proposition pour incarner le personnage d’Erica Evans. Le projet devient plus que jamais d’envergure et les médias se montrent particulièrement curieux.

La presse américaine s’interroge alors : si l’œuvre originale fait officiellement référence à la Seconde Guerre Mondiale et l’occupation par les nazis, sa transposition dans les années 2000 parviendra-t-elle à s’adapter aux préoccupations de notre époque ? Pourra-t-elle ainsi offrir une dimension réelle tout en assumant son rôle de divertissement de science-fiction ? Tel est l’enjeu. Sur ce dernier point, le nouveau V attise, comme convenu, la curiosité : le 3 novembre 2009, plus de 14 millions d’Américains assistent ainsi au lancement de la série sur ABC.

En revanche, sur le fond, le remake est considéré par certains médias comme l’allégorie de la présidence de Barack Obama. Une réflexion stimulée par l’utilisation des mots « changements » et « espoir » dans les messages des visiteurs, utilisés à maintes reprises lors de la campagne présidentielle du camp démocrate. Les soins apportés aux humains par les extra-terrestres seraient, quant à eux, une prétendue référence au plan de réforme du système de santé du Président. De quoi satisfaire les détracteurs de ce dernier. Au cours d’un rassemblement du Tea Party, mouvement politique contestataire, V est même référencé explicitement en guise de protestation à l’administration Obama. Mais très vite, les producteurs de la série démentent vivement cette théorie.


Pas de réelle polémique, l’interprétation de l’adaptation de V ne permet guère d’attirer davantage la curiosité du grand public. Au fil des semaines, l’audience accuse une importante érosion. Les quatre premiers épisodes, diffusés au mois de novembre, précèdent une pause de quatre mois à l’antenne de ABC, officiellement pour éviter une confrontation avec les Jeux Olympiques d’hiver. À son retour au printemps, la fiction ne séduit plus que 7 millions de téléspectateurs et peine à enrayer sa chute au fil des semaines. En moyenne, la première salve de douze épisodes a pu compter sur l’attention de 7.5 millions de fidèles, changeant au passage de case horaire en cours de route, de 20 heures au créneau moins exposé de 22 heures. De quoi inquiéter les fans quant à l’avenir de la production à l’antenne. Le 13 mai, le network renouvelle la série pour une deuxième saison. Prévue à l’origine pour 13 épisodes, celle-ci n’en comprendra finalement que 10. En attendant les futures performances déterminantes, le public français a pu faire la connaissance d’Erica, Jack, Ryan et les autres, depuis le 1er décembre dernier à l’antenne de TF1.

Pour ce faire, la chaîne privée a dédié une place de choix à son acquisition : en suite du Mentalist, son mastodonte. Ce soir-là, dès 23h20, 3.4 millions de téléspectateurs sont au rendez-vous pour le premier épisode, soit 37.5% du public présent devant son poste. Sur l’ensemble de la soirée, la chaîne privée rassemble alors 2.9 millions de noctambules et enregistre une moyenne de 48% des femmes de moins de 50 ans, cible particulièrement convoitée par les annonceurs. Mais ce public va se montrer infidèle une semaine plus tard, à l’occasion de trois nouveaux épisodes. Le 8 décembre, en l’absence de la locomotive Patrick Jane, et avec en lieu et place une Ligue des champions peu encline à satisfaire la ménagère, V déçoit. De 22h50, à 23h40, l’épisode « Une ère nouvelle » enregistre même seulement 12% de part de marché sur l’ensemble du public et se fait très nettement devancer par la fin de la deuxième demi-finale d’Incroyable talent sur M6. La série américaine voit son nombre de fidèles chuter à 1.5 million.

Accueillie par des critiques françaises mitigées, V doit confirmer, dès ce mercredi 15 décembre, le bon taux de rétention réalisé lors de sa première semaine à l’antenne, en suite du Mentalist. Reste à savoir si le public parviendra à s’intéresser à une intrigue dont il n’a pas forcément suivi le développement une semaine auparavant. L’avenir de la série est en jeu, à l’heure où les places sont de plus en plus chères sur la grille pour les nombreuses acquisitions en matière de fictions américaines.