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Annelise Hesme (L’escalier de fer) : « Jouer la copine du héros qui est à poil, ce n’est pas possible »

Claire Varin
Publié le 02/11/2013 à 18:56 Mis à jour le 15/11/2013 à 12:02

Cette année, Annelise Hesme a tenu le rôle féminin principal dans la série Platane (Canal+). Elle est aussi Louise, l’épouse meurtrière, face à Laurent Gerra dans l’adaptation de L’escalier de fer, diffuse ce samedi 2 novembre sur France 3. Féministe et très lucide sur son métier, l’actrice évoque ici son personnage, ses choix et ses projets.

Claire Varin : Comment êtes-vous arrivée sur ce projet d’adaptation de L’escalier de fer ?

Annelise Hesme : J’ai passé un casting. On ne m’appelle pas comme ça pour dire « on veut Annelise Hesme ! » Je suis toujours obligée de faire mes preuves, même après quinze ans. Apparemment au casting, ça a été une évidence pour eux. Mais aussi une évidence pour moi. Il y avait plein de détails autour de personnage qui m’ont parlé, mon ex-mari s’appelle Guillaume et à l’époque, j’étais avec un homme qui s’appelait Étienne. Et ma grand-mère était commerçante. Une femme assez dure parce qu’à l’époque, une femme commerçante avait besoin de ça pour être respectée par les hommes. C’est encore vrai aujourd’hui. Donc ça m’intéressait de jouer cette femme.

Étiez-vous familière de la littérature de Georges Simenon ?

Contrairement à Laurent [Gerra], je n’avais aucune culture « simenonesque ». J’ai lu L’escalier de fer avant le tournage. J’ai eu de la chance parce que Simenon a écrit beaucoup de romans, mais il n’y en a que trois où les personnages féminins mènent l’intrigue. C’était riche à jouer.

Comment s’est passée votre collaboration avec Laurent Gerra ?

Laurent a beaucoup de talent et comme tous ceux qui sont bourrés de talent, il doute beaucoup. Ce doute m’a vraiment fait du bien. L’inverse aurait été dérangeant. Nous doutions tous les deux et on a été très bien soutenu. C’est un travail d’équipe. Laurent et moi sommes très différents. On n’a pas forcément les mêmes goûts et les mêmes références, mais c’est quelqu’un de très humain et de très gentil. La gentillesse a été trop galvaudée. Et dans ce métier, ce n’est pas si courant. Pour moi, c’était déjà énorme.

Comment décririez-vous Louise ?

Je l’ai aimé parce qu’elle est malade. Même si c’est une perverse narcissique, une manipulatrice, elle se retrouve elle-même piégée dans ce rôle et elle ne peut plus en sortir. Et même si c’est une petite fille à papa, la condition des femmes a été dure très longtemps. C’était intéressant de jouer cet ange exterminateur. C’est un visage et un caractère à l’opposé.

« Certains vont prendre Louise pour une salope extrême »

Comment avez-vous abordé ce personnage ?

Avec Sylvie Pensa, la costumière, on a trouvé cette silhouette. Cette chose très tenue qu’elle se doit d’avoir alors qu’à l’intérieur, elle est brisée en mille morceaux. Elle ne sait plus si elle doit continuer à être comme ça. C’est une pulsion qu’elle a de faire mal aux hommes. Je lui ai imaginé un passé, peut-être trop proche de son père, une haine viscérale pour les hommes, liée des traumatismes. Même des rapports saphiques avec la bonne. On peut l’imaginer en connivence avec elle. Après, les téléspectateurs y verront ce qu’ils ont envie. Lors d’une projection, à chaque fois que j’apparaissais à l’écran, il y avait un homme dans la salle qui ne pouvait pas s’empêcher de dire « salope » (rires). Certains vont la prendre pour une salope extrême. D’autres vont essayer de la comprendre comme je l’ai fait pour l’interpréter. Le poison, c’est l’arme des faibles et des lâches. À l’époque, c’est l’arme des femmes.

Partie 2 > Ses projets après L’escalier de fer


Vous dites avoir imaginé une relation saphique avec la bonne. Avez-vous travaillé ce point avec l’actrice Anaïs Beluze ?

On se l’est dit avec Anaïs. On se faisait des petits regards dans nos scènes ensemble. Avec Mariette [jouée par Audrey Beaulieu, ndlr.], sa meilleure amie, aussi. J’ai imaginé Louise profondément lesbienne. Sa beauté, elle s’en est servie pour empoisonner l’homme, qui lui-même a mis le poison à la base. C’est pour ça aussi que les scènes d’amour n’étaient pas, pour moi, beaucoup plus faciles à jouer que pour Laurent, parce qu’elle jouait elle-même à faire l’amour.

Elle court aussi après la jeunesse...

Elle est un peu comme la Comtesse Báthory. Elle choisit des amants toujours plus jeunes. Lors de mes scènes avec Jérémy Charbonnel, j’ai dit à Denis [Malleval, le réalisateur, ndlr.] « Il est vraiment très très jeune, c’est sale ! » (rires) Mais le personnage est comme ça.

On vous sent féministe et vous semblez choisir vos rôles avec attention...

Jouer la copine du héros qui est à poil, ce n’est pas possible pour moi. Avec mes soeurs [Elodie et Clothide Hesme, ndlr.], ça fait vingt ans qu’on est dans ce métier, on sait quels sont les hommes qui veulent avant tout te baiser avant de te faire tourner et on sait où aller aussi. On s’entre-aide parce que ça reste un milieu hyper macho.

« Avec mes sœurs, on s’entre-aide parce que ça reste un milieu hyper macho »

On vous verra prochainement dans une fiction aux côtés Bernard Le Coq...

Le Goût de la vie, toujours pour France 3. Ça a été vendu comme une comédie, mais c’est aussi émouvant que drôle. C’est un peu à l’anglaise, tu ris, tu pleures, tu ris, tu pleures... C’est assez fin. Il s’agit du premier téléfilm d’une jeune réalisatrice, Sandrine Cohen, qui était actrice avant. C’est une magnifique directrice d’acteurs. Je pense qu’on a fait un très beau téléfilm.

Avez-vous d’autres projets à venir ?

J’ai refusé des projets avec des rôles peu intéressants. J’espère qu’avec Platane et L’escalier de fer, des projets plus intéressants vont arriver. Mon agent m’a conseillé d’attendre un peu. Ça fait vingt ans que je vis comme ça, à espérer que j’aurais quelque chose après et jusqu’à présent, je l’ai toujours eu alors je m’accroche.