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Tony Comiti (Les Routes de l’Impossible) : « Nous aimons aller là où on nous dit de ne pas aller »

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Rédacteur - Expert TV & Audiences
Publié le 25/07/2025 à 17:10

Ce vendredi 25 juillet 2025, Les routes de l’impossible sont diffusées dès 21 heures sur France 5. Cet épisode inédit emmène les téléspectateurs au Zimbabwe. Le producteur Tony Comiti a révélé à Toutelatele les difficultés rencontrées sur le tournage de cette saison.

Emmanuel Lassabe : Dans cette 19e saison des Routes de l’impossible sur France 5, vous allez vous rendre en Irak. Quelles difficultés avez-vous rencontrées lors du tournage dans ce pays ?

Tony Comiti : L’Irak est un pays entier qui a souffert d’une guerre terrible et c’est surtout dans ces situations de guerre ou d’après-guerre où tout le monde est très tendu. Il y a beaucoup d’espions. Alors lorsque des journalistes arrivent de France, c’est très compliqué. Au cours du tournage, nous ne restons pas à Bagdad, nous allons dans les déserts, nous partons chez les Kurdes. Ce sont plus des tribus au fin fond du pays. La première question qui se pose quand ils voient arriver des Français, c’est une énorme méfiance, une espionnite.

Les tournages au Nigéria étaient particulièrement éprouvants. Ces derniers étaient-ils plus difficiles qu’il y a 10 ans ?

L’équipe a dû avoir une escorte armée pendant une grande partie du tournage. Il a fallu être accompagné en raison du racket, à cause de ce qu’on appelle les coupeurs de route. L’équipe ne pouvait plus avancer. C’est ce que je n’aime pas du tout, parce que ça fausse un peu les conditions de tournage. C’était sur trois ou quatre jours. Ce qui est de plus en plus compliqué, c’est de leur expliquer que nous arrivons avec bienveillance, que nous venons s’intéresser à leur vie...

« Au Nigeria, l’équipe a dû avoir une escorte armée pendant une grande partie du tournage »

La méfiance est-elle encore plus forte qu’auparavant ?

Ils se demandent pourquoi on vient de France pour filmer leur vie « qui n’intéresse personne ». Il y a une mise en confiance, nos journalistes ne tournent pas tout de suite. Nous mangeons, nous partageons leurs repas, leurs conditions de vie... Et une fois qu’ils ont un peu compris cela, la glace se rompt. Après, ils sont plutôt fiers qu’on s’intéresse à eux au fin fond du Zimbabwe ou de l’Irak. C’est tout le talent, c’est une formidable mise en confiance.

Les routes de l’impossible se concentre également sur les peuples…

Les routes de l’impossible, c’était que du baroud auparavant. C’était vraiment le camion, la pirogue, le taxi-brousse et on ne sortait pas de là. Aujourd’hui, nous faisons des pas de côté sans faire de géopolitique, mais on montre ce qui se passe dans le pays. L’environnement compte beaucoup aujourd’hui sur Les routes de l’impossible parce que c’est mondial. Nous ne faisons pas de géopolitique.

« Je n’ai jamais renoncé à quoi que ce soit »

Entre tous ces incidents, vous ne vous êtes jamais dit « J’arrête » ?

Je n’ai jamais renoncé à quoi que ce soit parce que c’est notre boulot. Contrairement aux Anglo-Saxons ou d’autres pays, les reporters français sont ultra débrouillards. Je pense même qu’on a les meilleurs du monde ! Nous aimons aller là où on nous dit de ne pas aller parce que nous avons envie d’informer. Nous avons le droit de regarder et de montrer ce qui se passe dans le monde. C’est même un devoir. Nous n’allons pas laisser ça à Al-Jazeera ou à la BBC.

Au fil des années, quelle a été l’évolution de l’émission Les routes de l’impossible ?

Au début de l’émission, on s’est dit avec France Télévisions qu’on allait faire deux ou trois numéros pour tester. Finalement, il y a eu un grand succès d’audience, notamment sur le Qualimat auprès des téléspectateurs. France Télévisions avait envie de continuer et nous aussi. Une fois que nous avions fait un peu le tour du monde, nous avons évolué. Et cela passe par les qualités techniques et de réalisation.

Avec une chaîne YouTube à près de 1,1 million d’abonnés, avez-vous eu envie de changer de stratégie en arrêtant la primo-diffusion sur France Télévisions ?

France Télévisions a trois ans d’exclusivité de droit. Il n’est pas question de mettre le documentaire sur YouTube, même si une centaine de documentaires de 52 minutes est disponible. Nous sommes très contents, car France Télévisions nous donne un budget normal et le CNC nous aide également. Malgré ça, les coûts de production ont énormément augmenté, notamment le prix des fixeurs, essentiel pour nos tournages. Aujourd’hui, un fixeur demande 400 à 500 euros par jour.

Une nouvelle saison des Routes de l’impossible a-t-elle déjà été actée par France Télévisions ?

On va faire des tournages en Colombie, entre autres. Je n’ai pas encore la liste complète, mais on relance une saison. Et j’aimerais beaucoup aller au Nicaragua où par deux fois mes équipes se font faites expulser.