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Guy Lagache (Les Grands Entretiens de LCP) : « Je veux comprendre une personnalité par son parcours et ses points de bascule »

Joshua Daguenet
Par
Rédacteur TV & Séries
Publié le 17/05/2020 à 16:07

Après s’être entretenue avec cinq personnalités, Maïtena Biraben a cédé sa place à Guy Lagache, désormais aux commandes des Grands Entretiens de LCP, chaque dimanche à 23 heures. L’ancien animateur de Capital est revenu sur sa nouvelle expérience

Joshua Daguenet : Vos premiers invités, Xavier Niel, Mercedes Erra et Serge Papin, ont un profil économiste et différent des derniers invités de Maïtena Biraben. Avez-vous cherché à vous démarquer d’entrée de votre prédécesseuse ?

Guy Lagache : L’histoire s’est passée de la façon suivante. Bertrand Delais [PDG de LCP] et Guilaine Chenu [directrice des contenus, ndlr] m’ont proposé de participer à cette aventure. Ils m’ont dit « On veut développer une collection de grands entretiens sur la longueur. Tu peux nous proposer des noms selon l’angle qui t’intéresse ». Mon intérêt est de savoir comment se sont construits des gens qui ont eu un impact sur notre vie à tous, nous ont influencé à travers des actes, des idées, des marques. Je souhaitais comprendre comment ces individus, dotés d’une vraie singularité, ont pu incarner ce qu’ils sont devenus.

Le rêve américain, mythe ou réalité, divise les esprits. À travers vos premiers grands entretiens, cherchez-vous à convaincre de l’existence d’un rêve français ?

Non (rires). Je suis intéressé par la résilience, la capacité d’être dans la rupture avec le système pour avancer et construire. De ce fait là, construire des choses qui auront un impact sur nous. Ces gens ont pensé, agi différemment en faisant preuve d’audience, de détermination. Ils ont inventé un univers qui nous ont influencés.

« Mes invités ont pensé, agi différemment en faisant preuve d’audience, de détermination »

Ces personnalités sont très peu en vue dans les médias. La France a-t-elle un problème avec les gens qui réussissent ?

On a beaucoup évolué sur ce point-là. Je prends l’exemple de Mercedes Erra [fondatrice de BETC groupe, ndlr]. Son parcours est exemplaire. C’est d’abord une jeune femme issue de l’immigration qui arrive et ne parle pas un mot de français. À la force du travail, elle a suivi son propre chemin pour devenir professeure de français. Après être allée dans la publicité, elle a su devenir l’une des femmes les plus puissantes dans le domaine des affaires. J’ai voulu ainsi retracer des points dans son univers, dans son histoire. On a tous cela en nous. Quelqu’un comme Xavier Niel n’est pas issu d’une grande école, d’un grand corps. Il a commencé par bidouiller des ordinateurs et s’est nourri d’une passion et d’une envie de créer sa propre richesse. Ils n’ont pas été dans un moule et c’est peut-être ça qui fait la singularité de ces individus. Ils ont moins de censure que tout un chacun.

Ces entretiens vont-ils s’ouvrir à des personnalités issues de tous les domaines ?

Oui, pourquoi pas. L’intérêt est d’avoir toutes sortes de personnalités influentes sur la vie quotidienne et le domaine dans lequel ils ont agi. Serge Papin est devenu Président de la quatrième grande enseigne de distribution en France : Système U. Très tôt dans sa vie, bien avant de faire de la grande distribution, il s’est doté d’une forte sensibilité écologique, libertaire. Or, il s’est à priori éloigné de cette fibre écologique. Simplement, il a été l’un des premiers à parler de consommation responsable, plus vertueuse avec des produits bons pour notre santé et notre environnement. Dix ans auparavant, cela pouvait paraître saugrenu quand il a commencé à parler de ça. Dans un contexte de crise sanitaire, ce sujet est devenu central.

« Je souhaite créer une sorte d’intensité dans la narration et l’expression des gens »

Le plateau est crépusculaire et se veut intimiste. A-t-il été facile d’adopter cette ambiance assez rare en télévision ?

Le plateau, très bien réalisé, est très adapté à l’exercice. Il a permis d’avoir cette intimité avec l’interlocuteur. Le positionnement de l’espace est assez ténu. Je suis près de la personne que je reçois pour être dans une proximité forte et créer une sorte d’intensité dans la narration et l’expression des gens. Il ne s’agit pas de faire une biographie, mais d’essayer de comprendre une personnalité par son parcours et ses points de bascule.

Expert en économie en tant qu’animateur de Capital pendant huit ans, quelle analyse faites-vous de la situation en France et dans le Monde ?

La crise économique est celle qui suit la crise sanitaire. La question est de savoir comment elle va être amortie. Il y a un gros point d’interrogation quant à l’ampleur et la durée des dégâts économiques. La planète est prise dans cette crise et il est difficile de voir une issue. Aujourd’hui, l’activité reprend, mais il va falloir faire preuve d’une grande résilience. Il est délicat de faire la moindre projection.