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Péri Cochin et les coulisses de la télévision

Tony Cotte
Publié le 06/02/2009 à 14:57 Mis à jour le 04/06/2010 à 14:00

Depuis son arrivée au sein de la bande à Ruquier en 2001, Péri Cochin a fait du chemin. Architecte de formation, vendeuse de mobilier en Afrique et gérante de la société « La Tarte aux bonbons », la jeune femme se retrouve, à tout hasard, en radio, à la télévision puis, en 2005, derrière la caméra pour les adaptations, au Moyen-Orient, d’émissions phares comme Tout le monde en parle, Un gars, une fille ou encore Union libre. Chouchoute de Catherine Barma et Thierry Ardisson, cette jeune femme dynamique est aux commandes de Bien dans ma vie sur M6 depuis la rentrée dernière. Cinq mois après son arrivée à l’antenne de la chaîne privée, l’intéressée fait un premier bilan pour Toutelatele.com

Tony Cotte : Depuis vos débuts médiatiques en 2001 au sein de l’équipe de Laurent Ruquier, tout s’est enchaîné à une vitesse vertigineuse. Comment, à l’origine, une diplômée d’architecture vendeuse de mobilier en Afrique a-t-elle pu se retrouver dans une émission d’humour et d’actualité sur Europe 1 ?

Péri Cochin : Je ne sais pas moi-même, c’est arrivé par hasard. Jamais de ma vie je n’avais pensé faire un métier similaire à celui-là, ni de près ni de loin. En réalité, tout a commencé lors d’un dîner où Laurent Ruquier a fait part de sa volonté d’avoir des voix féminines pour son émission de radio. Ce soir-là, Sophie et Jacques Séguéla, des amis de très longue date, m’ont présentée comme une fille à mille lieues de cet univers, mais avec un franc-parler et un certain ton. Europe 1 m’a alors convoquée, il n’y a eu aucun entretien d’embauche et, sans être avertie, je me suis retrouvée en direct dans cette émission que je ne connaissais absolument pas. Ma seule consigne : ne pas parler en même temps que les autres.

Une telle expérience ne vous a-t-elle pas découragé de poursuivre dans ce milieu ?

Ça a été compliqué d’autant plus que ce jour-là, Laurent Ruquier a été remplacé, pour la première fois, par Gérard Miller. Il était très stressé, pris dans ses fiches et son fil conducteur. Nous n’avions parlé que deux minutes ensemble, de cul et de fantasmes. Laurent m’a téléphoné à la fin de l’émission pour me dire que ma voix passait bien. Il m’a invitée à passer un second essai et, de fil en aiguille, j’ai eu ma place.

A partir de quel moment vous a-t-on proposé d’intégrer l’équipe d’On a tout essayé sur France 2 ?

C’est en vacances avec toute l’équipe que Laurent Ruquier m’a invité à faire un essai à la télévision. Catherine Barma (la productrice, ndlr) a été enthousiaste et j’ai commencé à venir dans l’émission de plus en plus souvent. J’ai rapidement été adoptée par la bande.

Quels souvenirs gardez-vous de cette période ?

C’était des années incroyables. Il y a avait une vraie liberté de ton dans l’émission. La déconnade et la spontanéité à l’antenne étaient plutôt hallucinantes en télévision. Un jour, je me suis retrouvée aux côtés d’un célèbre animateur lors d’un dîner. Malgré sa grande expérience, il était persuadé que tout était préparé dans On a tout essayé. En réalité, quand on rentre en plateau, Laurent Ruquier ne sait absolument pas ce que nous allons dire. Cette liberté a fortement contribué, à mon sens, au succès de l’émission.

En 2005, vous créez votre société de production, Périscoop, pour adapter, dans un premier temps, Tout le monde en parle à l’étranger. D’où vous est venue l’idée ?

J’étais partie pour monter, au Moyen-Orient, un festival du rire, mais suite à l’assassinat de Rafiq Hariri, l’événement n’a pas eu lieu. Pour monter ce projet, j’ai eu l’opportunité de rencontrer du monde, dont de nombreuses personnes en télé. Un réalisateur m’a confié que son rêve était de faire Tout le monde en parle. De nature, je fonce sur tout et n’importe quoi. Grâce à Catherine Barma, j’ai acquis énormément de connaissances. Elle et Ardisson ont accepté de me vendre le format et j’ai pu tourner le pilote dans leurs studios à Paris. Ça a été un vrai plus pour présenter le programme aux chaînes étrangères...


A quel degré se mesure votre autonomie dans ce genre d’adaptation ?

Je reproduis les mêmes schémas appris en compagnie de Catherine Barma et Thierry Ardisson. Ils ont eu envie de travailler avec moi et m’ont fait confiance. A partir du moment que je respecte le principe de l’émission, j’ai une certaine liberté. Mais Tout le monde en parle est tellement formidable que je n’ai rien eu à changer. J’ai repris ce programme exactement comme il était en France, au point de faire les questions de l’interview à la façon d’Ardisson. Nous avons réussi à retrouver le même ton dans une autre langue.

Avez-vous été heurtée à des tabous culturels dans certains pays du Maghreb ?

Tout le monde en parle a eu la chance d’être diffusée sur une chaîne plutôt moderne et ouverte d’esprit. Je connais très bien les mentalités de là-bas et j’ai toujours été borderline, sans jamais franchir les limites. Entre temps, j’ai adapté d’autres programmes, dont Un gars, une fille. Pour le coup, je me suis autocensurée, en prenant soin de ne pas reproduire, par exemple, les sketchs dans les sex shops. Contrairement aux idées reçues, beaucoup de choses que l’on peut penser interdites ont été diffusées, comme des plans de l’héroïne à poil dans un bain moussant.

Un gars, une fille, Union libre, Taratata, Tout le monde en parle... Laquelle de ces adaptations a eu le plus de succès en terme d’audience ?

Taratata a été élue « Meilleure émission de divertissement » au Moyen-Orient et reste un franc succès critique. Mais il n’existe pas le système de Médiamétrie là-bas, tout se fait par sondages mensuels. Cela permet aux émissions de rester plus de temps à l’antenne et de se faire connaître auprès des annonceurs. En tant que producteurs, on bénéficie d’une certaine liberté et le stress est bien moins présent qu’en France.

A l’été 2008, M6 vous a contacté pour animer Bien dans ma vie. À ce moment-là, quelle devait être votre place au beau milieu du mercato ?

J’avais fait un pilote avant l’été pour France 2 très similaire au Dîner presque parfait de M6. La chaîne a beaucoup aimé et souhaitait le mettre à l’antenne le samedi en access dès le mois de septembre. Catherine Barma et moi-même étions, chacune de notre côté, en vacances et il n’était pas possible de tout faire en précipitation. A nos retours respectifs, France 2 a connu de nombreux chamboulements et l’émission n’est jamais sortie. J’ai commencé à réfléchir à un projet sur l’art de vivre quand M6 m’a fait part de sa proposition pour Bien dans ma vie.

Ne craigniez-vous, lors de la présentation du concept, de voir un énième programme de « bien-être, beauté et mode » à l’antenne de M6 ?

J’ai émis quelques réserves, surtout à l’idée de me retrouver dans une émission de coaching dans une position où l’on donne des leçons au public. Quand Bibiane Godfroid, Thomas Valentin et Sylvia Kahn (directrice des magazines de la chaîne à l’époque, ndlr) m’ont présenté le concept plus en détail, j’ai aussitôt accepté. Le but était de proposer un magazine féminin en version télévisée. L’idée était d’être proche du quotidien des téléspectateurs, sans rien leur imposer ni donner un quelconque verdict.


Épluchez-vous l’ensemble de la presse féminine pour vous inspirer des sujets de l’émission ?

Il suffit simplement de se poser les questions du quotidien. Comme toute équipe de rédaction, nous nous inspirons de ce qui nous entoure, mais j’ai l’impression que nous sommes en phase avec ce type de presse. Il n’est pas rare de voir certains de nos sujets publiés peu après dans les magazines. Attention, je ne dis pas qu’on nous copie , mais il y a une tendance, un esprit général, en adéquation avec ce que l’on propose dans Bien dans ma vie...

La transition entre intervenante chez Laurent Ruquier et animatrice seule d’un programme a-t-elle été facile ?

L’exercice était inédit pour moi. J’ai eu l’habitude, pendant cinq ans, de parler uniquement à des gens assis autour d’une table et, pour la première fois de ma vie, je devais m’adresser à une caméra. Heureusement, je me suis habituée très vite. Les mises en scène dans ma baignoire ou sur un vélo ont été très drôles et, pour le coup, je n’ai eu aucun effort à faire. La majorité du temps, nous n’avons même pas besoin d’une seconde prise.

En tant que productrice dans l’âme, faites-vous particulièrement attention aux audiences du programme malgré votre statut de simple animatrice ?

Je ne suis pas angoissée par ça, il n’y a pas de vrais enjeux. Il est évident que ça fait plaisir quand on m’annonce que l’émission a séduit récemment 1.4 million de téléspectateurs. Au moins, on ne passe pas des heures à travailler sur un programme qui n’intéresse personne. Mais je comprends tout à fait que l’on retire de l’antenne les émissions à faibles audiences, on fait de la télévision avant tout pour que ça marche. Il y a une économie de marché à respecter.

Un mois après son lancement, l’émission a été déprogrammée du samedi matin pour l’après-midi à 17h10. Comment avez-vous réagi aux premiers scores d’audience ?

Ce n’était pas une déprogrammation, mais une reprogrammation. Notre émission n’était pas la seule concernée, M6 a procédé, à ce moment-là, à de nombreuses modifications dans sa grille. De toute façon, personne ne s’attendait à faire plus le samedi matin. Nos prédécesseurs ne réalisaient qu’entre 6 et 7% de part de marché.

Désormais votre moyenne se situe à 10.5% pour 1.2 million de téléspectateurs. À partir de quel seuil êtes-vous désormais tranquille ?

Je n’ai aucun seuil d’audience à atteindre dans mon contrat avec M6. Mais il ne faut pas rêver, j’ai parfaitement conscience que l’audience est très fluctuante. Le public de Bien dans ma vie n’attend pas l’émission avec impatience derrière son poste. Et oui, nous n’annonçons pas non plus le scoop du siècle !