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Sarkozy / Bayrou / Le Pen : TF1 dans la tourmente

Tony Cotte
Publié le 12/02/2007 à 00:24

A l’heure où débute la campagne présidentielle, TF1 a décidé de mettre en place un « important dispositif » pour couvrir l’événement. Ainsi tout le mois de février, la chaîne privée propose chaque lundi J’ai une question à vous poser, prime-time présenté par Patrick Poivre d’Arvor, au cours duquel les candidats déclarés doivent faire face à un panel de 100 français représentant la population française. Pour débuter ce rendez-vous, TF1 a convié, le 5 février dernier, Nicolas Sarkozy pour répondre aux questions du public présent sur le plateau. Alors que l’exercice du président de l’UMP a été jugé par une majorité de français comme réussi selon un sondage paru dans le quotidien Le Figaro, ses différents adversaires pointent du doigt l’impartialité de l’émission. Et chaque jour, la polémique s’est amplifiée. Retour sur une semaine qui a bouleversé les médias et la course à la présidentielle.

Mardi 6 février. Au lendemain de la diffusion de J’ai une question à vous poser, François Bayrou s’interroge sur sa participation à l’émission initialement prévue pour le 26 février prochain. Ainsi, le candidat UDF déclare lors d’un déplacement à Bordeaux : « Je tiens à réfléchir, car je suis tombé de ma chaise en découvrant les conditions d’organisation de ce débat (...) J’avais dit oui spontanément, malgré l’injustice » qui consiste à donner deux heures à Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, et « seulement une heure aux autres ». Mais François Bayrou ne s’arrête pas là et va jusqu’à remettre en cause la production de l’émission : « L’organisation de ce débat a été confiée à une société de production qui appartient à Dominique Ambiel, ex-conseiller de Jean-Pierre Raffarin et partisan de Nicolas Sarkozy, c’est extrêmement choquant et peu déontologique. (...) C’est en réalité l’UMP qui est aux commandes, presque directement, de ce type d’émissions », s’indigne t-il.

Mercredi 7 février. Suite à ses propos, la société de production, A Prime Group, annonce son intention de porter plainte contre le candidat de l’UDF. Selon un communiqué de la société les propos de ce dernier « portent gravement atteinte à l’honneur et à la considération de la société A Prime Group et du diffuseur ». La participation de François Bayrou à J’ai une question à vous poser semble compromise. Un choix que pourrait regretter TF1, puisque la présence du candidat à la présidentielle a fait battre, la veille, le record historique d’audience du Grand Journal sur Canal + avec 2.1 millions de téléspectateurs au rendez-vous, soit 7.7% de part de marché.

Jeudi 8 février. Marine Le Pen prend le relais. La vice-présidente du Front National indique sur BFM TV que Jean-Marie Le Pen réfléchirait, à son tour, s’il devait ou non participer à la prochaine émission de J’ai une question à vous poser le 12 février sur TF1. Selon celle-ci, « les Français n’ont pas été informés réellement de la manière dont l’émission a été organisée (...) Mais c’est un homme combatif, il a l’habitude des choses pas très claires, un peu manipulées et des panels peu représentatifs ». Le soir même, Jean-Marie Le Pen répond alors aux questions d’Arlette Chabot dans A vous de juger devant plus de 4 millions de français.

Les critiques à l’encontre de l’émission politique J’ai une question à vous poser et les accusations de manipulation irritent quelque peu la direction de la chaîne privée. Robert Namias, directeur de l’information de TF1, souhaite que les médias « ne soient pas pris en otage » par les candidats : « Quand plusieurs dizaines de personnes sont impliquées » dans l’organisation d’une émission, « comment voulez-vous qu’elle ne soit pas transparente ? », répond t-il à l’AFP.

Le jour même, c’est au tour du CSA de dénoncer la « persistance d’un déséquilibre » dans le temps d’antenne des candidats à la présidence. Sur la période étudiée, du 1er décembre 2006 au 2 février 2007 - J’ai une question à vous poser n’est donc pas prise en compte - le Conseil supérieur de l’audiovisuel estime que « les temps de parole (...) accordés à certains candidats restent insuffisants au regard des critères d’équité ». De plus, l’institut publie sur son site internet un relevé des temps de parole des différents politiciens. Pour le cas de TF1, ceux de Nicolas Sarkozy ou de ses soutiens s’élèvent à 59 minutes et 15 secondes, soit 23.4% du temps total, contre 1 heure, 9 minutes et 42 secondes pour Ségolène Royal, représentant 27.5%. Quant à François Bayrou, il a dû se contenter de 29 minutes et 23 secondes. Un schéma quelque peu identique sur les cinq grandes chaînes généralistes où UMP et PS se partagent la tête du podium.

Dimanche 11 février. Après 48 heures de « silence », la polémique est ravivée pendant l’émission Dimanche +. En invitant François Bayrou, Laurence Ferrari fait revenir le candidat UDF sur l’équité des politiciens dans les médias. Pourtant, le magazine dominical devait à l’origine donner la parole à Rachida Dati, porte-parole du candidat Nicolas Sarkozy puis au président de l’UDF. Conséquence de la polémique ou pour pouvoir aborder le sujet des temps de paroles des politiques, force est de constater que François Bayrou a eu droit au même privilège que Ségolène Royal le 21 janvier dernier : être l’unique invité de l’émission de Canal +. A la question s’il est toujours « en guerre » contre TF1, le présidentiable affirme qu’il est « pour le respect des principes républicains » et n’hésite pas à le dire quand ceux-ci « ne sont pas respectés ». Quant à sa participation à J’ai une question à vous poser, François Bayrou se contente de répondre : « Si c’est une grande émission honnête, et transparente, j’irais (...) J’attends que tout s’éclaircisse ».

En attendant, pour son second numéro de J’ai une question à vous poser, TF1 donnera la parole à Jean-Marie Le Pen, Marie-George Buffet, Olivier Besancenot et Philippe de Villiers. Les quatre candidats des extrêmes devraient obtenir 30 minutes de paroles chacun pour répondre aux questions des 100 français présents sur le plateau. Après avoir réuni 8.2 millions de téléspectateurs lundi dernier, TF1 réalisera t-elle un score supérieur après une semaine où les langues se sont déliées ?