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Stéphane Rotenberg (Pékin Express) : « On n’a pas attendu Rendez-vous en Terre Inconnue pour faire des rencontres avec les gens »

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Directeur exécutif en charge des contenus
Publié le 16/04/2014 à 19:25

Pékin Express, Top Chef, Ice Show... Stéphane Rotenberg demeure l’animateur à la tête des divertissements phares de M6 en cumulant plus de trente primes par an. À l’occasion du nouveau Pékin Express et de la finale de Top Chef, rencontre avec un animateur qui affectionne particulièrement le mélange des genres.

Benjamin Lopes : Vous partez pour une dixième saison de Pékin Express. Quelles seront les nouveautés de cette année ?

Stéphane Rotenberg : C’est un retour aux sources, on va recommencer à se rendre dans des pays peu visités, qui étaient même fermés ou en guerre il y a quelques années seulement. C’est ce que nous avions fait dans les premières saisons. Nous avons traversé la Birmanie, le Sri Lanka qui était en guerre civile il y a encore quatre ans, et le Nagaland qui est un territoire totalement enclavé en Inde. Cet endroit n’est absolument pas visité par les touristes puisqu’il s’agit d’une région autonome. C’était l’occasion pour les candidats d’aller au contact avec des populations qui ne sont quasiment jamais en relation avec les Occidentaux.

La course qui est l’essence de Pékin Express ne limite-t-elle pas justement ces rapprochements ?

On a réduit le temps de la course des candidats sur la journée cette saison. Elle s’arrête plus tôt. Leur recherche de maison commence ainsi vers 15 heures, ce qui fait qu’ils ont beaucoup de temps. Les participants ont une après-midi, une soirée et une matinée pour profiter pleinement des gens qu’ils rencontrent sur la route, et ça nous donne forcément des séquences beaucoup plus riches comparées aux précédentes saisons.

M6 promet pour cette saison « un voyage au cœur des pays parmi les moins visités du monde et des rencontres exceptionnelles ». Un concept qui rappelle celui de Rendez-vous en terre inconnue sur France 2. Ne craignez-vous pas qu’on vous reproche de surfer sur le succès de ce programme ?

Pékin Express est très largement antérieur à Rendez-vous en Terre Inconnue. Notre jeu a toujours été basé sur la nécessité car, pour avancer, vous avez besoin des autres, les candidats n’ayant qu’un euro par jour et par personne pour dormir et manger. Pékin Express est pionnier dans le domaine. Nous avons été rencontrés des tribus mongoles en saison 1 du jeu. Cette année, on garde bien évidemment la notion de course, mais on n’a pas attendu Rendez-vous en Terre Inconnue pour faire des rencontres avec les gens. Et il n’est d’ailleurs pas impossible que cette émission ait vu en Pékin Express une source d’inspiration.

« Je souhaite à toutes les émissions de M6 de faire les mêmes audiences que Top Chef »

Vous avez traversé des régions parfois dangereuses au cours de cette saison. Comment s’organise en amont votre passage sur ces territoires ?

C’est évident que nous traversons des territoires qui souffrent de conflits internes extrêmement forts. On ne va pas dans les pays objectivement impossibles à visiter, comme dans ceux qui sont en guerre. Il y a une quarantaine de pays aujourd’hui qui ne peuvent pas être visités parce qu’ils sont trop instables ou en conflit. On pourrait d’ailleurs presque dire que l’insécurité en Floride est parfois plus complexe que celle que nous avons pu rencontrer dans certaines parties du Brésil ou du Mexique. Nous avons des équipes de sécurité qui veillent sur nous.

Quel impact a eu l’arrêt du tournage en Inde sur la compétition ?

On a dû annuler deux étapes en catastrophe. La production a alors réécrit deux étapes au Sri Lanka, il a fallu tout réorganiser et demander de nouvelles autorisations. Au total, nous avons pris quatre ou cinq de retard par rapport à ce qui était prévu au départ.

Ces difficultés seront-elles exposées aux téléspectateurs lors de la diffusion sur M6 ?

Oui tout à fait. Nous n’avons pas beaucoup d’images puisque nous avons attendu pendant cinq jours. Il n’y avait donc pas grand-chose à voir. Mais ça sera évidemment dans le programme puisqu’on annoncera quantité d’informations, notamment concernant Calcutta qu’on ne verra finalement pas.

Pékin Express reste une marque emblématique sur M6. Pourtant, la saison 9 avait réuni 2.69 millions de Français en recul de 20% sur un an. Comment expliquez-vous cette baisse ?

C’est le lot des formats qui ont une très longue durée, donc forcément leurs audiences sont variables. Il n’y a pas beaucoup d’émissions qui ont la longévité de Pékin Express. Quand on regarde Fort Boyard, la courbe du programme sur 25 ans monte et redescend par exemple. L’année dernière, nous avions également une concurrence plus forte avec des matchs de football de la coupe d’Europe en face. Autre élément possible également, la route aux États-Unis, qui était plus connue du grand public. C’est toujours très difficile à priori de savoir pourquoi une saison a rassemblé moins que la précédente. La saison 8 avait connu une belle augmentation par rapport à la saison 7. Nous sommes encore à des niveaux très satisfaisants avec ce programme structural de la chaîne.

Partie 2 > Top Chef, son bilan sur Ice Show et son avenir sur M6


Pékin Express, produite par Studio89, bénéficie-t-elle d’une exposition auprès des diffuseurs dans le monde ?

Effectivement, c’est la version française de Pékin Express qui sert de référence. Elle a servi de modèle aux Espagnols et aux Italiens. L’Espagne a eu un peu de mal, car ils avaient moins de moyens, tandis que le format a bien fonctionné sur la RAI, en Italie, car la chaîne publique a mis autant, sinon plus, d’argent que M6 dans cette compétition. La version transalpine se positionne beaucoup plus sur l’humour. Les équipes de Studio89 bossent super bien, mais il n’est jamais évident de convaincre le possesseur d’un format de modifier le contenu d’un programme, les équipes de M6 y sont pourtant parvenues avec succès.

Vous êtes également à la tête de Top Chef sur M6. Ne craignez-vous pas la surexposition ?

C’est vrai qu’à l’arrivée ça me fait une trentaine de prime time par an, ce qui est énorme. Mais les animateurs de quotidiennes, comme Nagui ou Cyril Hanouna, sont beaucoup plus exposés et font beaucoup plus d’antenne que moi, avec au moins 220 numéros par an, ce qui n’est pas mon cas. Alors c’est vrai qu’il existe un risque, mais il reste moindre. Et puis, ca va se calmer ensuite, avec toute la période d’été par exemple où je ne suis pas à l’antenne.

Sur les onze premiers numéros diffusés, Top Chef est en baisse de 20% avec une perte de 660 000 fidèles. Le retour des anciens était-il finalement une mauvaise stratégie ?

On peut toujours se poser la question, mais il est difficile d’expliquer pourquoi une audience baisse. Top Chef était à des niveaux stratosphériques la saison dernière. C’était la deuxième marque la plus puissante de M6. C’est encore un programme qui est largement au dessus de la moyenne de la chaîne sur la cible stratégique des ménagères de moins de 50 ans. Au bout de cinq ans, est-ce qu’on aurait dû faire autre chose ? C’est peut-être l’une des explications vraisemblables, mais il est encore une fois compliqué d’identifier à coup sûr la cause d’une baisse des performances d’un programme. Je souhaite à toutes les émissions de M6 de faire les mêmes audiences que Top Chef.

Quels candidats se démarquent du programme cette année d’après vous ?

Thibault et Steven se sont démarqués, soit par leur technique, soit par leur personnalité. Noémie est également une candidate très charismatique, pétillante, qui a une envie de gagner absolument incroyable. On pourrait en citer d’autres, mais ces trois candidats-là sont véritablement singuliers.

« Top Chef sur M6 est aujourd’hui considéré comme une référence »

La version française de Top Chef est l’une des plus regardées dans le monde. Avez-vous des retours des productions à l’international ?

Le format français a ses spécificités. La durée est plus longue que la version américaine par exemple. Top Chef sur M6 est aujourd’hui considéré comme une référence. Ce n’était pas évident. Lorsque vous disposez d’un format étranger, vous avez habituellement l’auteur qui vous enferme dans un carcan. S’agissant de la cuisine, ils nous ont fait confiance et accepté qu’on modifie très sensiblement la mécanique du programme. Par exemple, on parle beaucoup plus de cuisine que dans les autres versions internationales de Top Chef. La version française est beaucoup montrée, c’est celle qui sert à la vente.

À la fin de l’année 2013, vous avez présenté Ice Show, le nouveau programme évènement de M6. Que retenez-vous de ce challenge ?

J’aime personnellement l’idée de faire à la fois une émission d’aventure, des grands divertissements en plateau et un show culinaire. Le concept de ne pas être tout le temps au même endroit et faire la même chose est l’une des richesses de ce métier. M6 me donne la chance de me mettre sur plusieurs genres. J’ai été très content de faire Ice Show. C’est un concept français, et ce n’est pas banal, car la plupart des émissions que j’anime sont des formats étrangers. C’est vrai qu’il y a eu tous les inconvénients des premières, surtout en direct, et nous avons du procéder à des réajustements au fur et à mesure. J’espère que nous allons transformer l’essai en saison 2.

Où en est le développement de cette seconde saison ?

M6 n’est pas encore en phase de production. Les équipes de la chaîne sont actuellement sur Rising Star. Ice Show arrivera beaucoup plus tard dans la saison. Il y a déjà eu des rencontres avec les coachs. Nous sommes encore dans le debrief, plus que dans la construction de la deuxième saison. Pour moi, il y aura vraisemblablement le tournage de Top Chef 6 avant.

Vous êtes donc assuré de revenir sur M6 la saison prochaine ?

Les négociations pour mon contrat n’ont pas encore commencé. Je ne suis pas encore assuré de revenir. Vous faites bien de le rappeler (rires). Rien n’est signé à ce jour. Au moment où on se parle, au 30 juin prochain, je suis sans emploi, maintenant ça fait quatorze ans que ça dure.

Partie 3> Ice Show et ses projets sur M6


Après un démarrage devant 3.34 millions de Français et 22% des ménagères, Ice Show s’achevait en compagnie de 2.7 millions de curieux et 12.3% des ménagères. Pourquoi le programme n’est-il pas parvenu à retenir le public ?

On est resté dans une fourchette très satisfaisante pour M6. On n’a pas réalisé le carton du siècle, mais on est loin d’être dans des chiffres qui ne permettent pas d’amortir le programme, ou de ne pas avoir d’annonceurs. Lorsqu’on fait un nouveau programme, il faut le construire. La première saison de Top Chef avait réuni 2.8 millions de téléspectateurs et on est ensuite monté à plus de 5 millions. Danse avec les stars s’est, par exemple, amélioré en saison 2, puis en saison 3 en termes d’audiences. Il y a une accélération sur les quatre premières saisons, puis une stabilisation des performances, et c’est vrai pour tous les formats, partout dans le monde. Pour un socle de démarrage, les scores d’Ice Show sont très satisfaisants.

Autre divertissement à votre arc, La Meilleure danse qui s’est conclue devant 1.03 million de curieux en juin 2012, soit 5% des 4+ et 6.8% auprès des moins de 50 ans. Pourquoi une troisième saison n’a-t-elle pas vu le jour ?

Il faut le demander à Frédéric De Vincelles, le directeur de W9 (rires). C’était, hors cinéma et fiction, le meilleur score de la chaîne. Mais c’est un programme coûteux. Je ne sais pas si ce facteur a dissuadé la commande d’une nouvelle saison.

« Ma volonté, au-delà d’un case ou d’un rythme particulier, c’est vraiment le mélange des genres »

BBC travaille actuellement sur l’adaptation de Top Gear pour une chaîne française. Seriez-vous intéressé par son animation ?

J’ignorais que Top Gear pourrait être adapté en France. J’adore cette émission. C’est pour moi le programme automobile de référence dans le monde. Mais il faut savoir qu’elle a un budget considérable et qu’elle dispose également d’une liberté de ton incroyable vis-à-vis des constructeurs et des annonceurs. C’est donc le service public qui diffuse le programme en Angleterre, mais j’ai du mal à imaginer que France Télévisions ait autant d’argent, mais pourquoi pas. Si on parle d’une version exacte de Top Gear, je ne vois pas vraiment qui pourrait l’adapter en France. Si on en fait une version adaptée aux moyens et au contexte français, j’adorerai le faire, mais je ne peux pas me couper en huit (rires).

Avez-vous des envies particulières à la télévision, comme un talk-show ou un rendez-vous hebdomadaire dans une case moins exposée ?

Quand vous partez pour 50 jours pour Pékin Express, et 45 jours pour Top Chef, il est impossible de faire de la radio par exemple, même si j’ai eu des propositions. Je me positionne donc sur des émissions de flux et tant que j’aurais toujours ces grosses machines de prime, il sera très difficile pour moi de basculer. Maintenant ma volonté, au-delà d’un case ou d’un rythme particulier, c’est vraiment le mélange des genres. Je vois à quel point il faut batailler pour obtenir cet avantage. Je veux continuer à être sur différents univers plus que d’avoir un créneau particulier. C’est un véritable privilège et peu d’animateurs ont cette chance.

M6 lancera prochainement Rising Star, son télé-crochet évènement. Aimeriez-vous le présenter ?

Ce programme est formidable. Ce sont les mêmes équipes qui font Top Chef et Pékin Express [ndlr : Studio89]. C’est un projet qui monopolise beaucoup d’énergie chez M6. Tous les gens du numérique et du second écran sont à fond, tout comme la régie. Rising Star fédère beaucoup de gens au sein de la chaîne, comme j’ai rarement vu. Alors bien évidemment, ça fait envie quand on est animateur d’être aux commandes d’un engin pareil. Maintenant, il faut regarder la réalité. Top Chef, Ice Show, Pékin Express, ça fait déjà beaucoup...