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Yoann Saillon (Directeur artistique de l’info de TF1) : « Dans Vie Politique, on retrouve des ambiances et des séquences qui font penser à l’infotainment »

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Directeur exécutif en charge des contenus
Publié le 10/06/2016 à 16:10 Mis à jour le 12/06/2016 à 11:30

Depuis plusieurs années, l’habillage de l’information chez TF1 est développé en interne. Yoann Saillon, Directeur artistique de l’information de TF1, est revenu pour Toutelatele sur les réflexions qui ont accompagné le développement de l’identité visuelle de Vie Politique, le nouveau magazine politique événementiel de la chaîne privée.

Benjamin Lopes : Comment s’articule le plateau de Vie Politique, une émission qui veut dépoussiérer le genre sur TF1 ?

Yoann Saillon : : On a voulu que ce plateau soit assez épuré. On ne veut pas que l’homme ou la femme politique se réfugie derrière un code classique qu’il connait, c’est-à-dire le débat habituel en triangulaire avec des grands bureaux. On a créé des ambiances et on s’appuie sur la forme, l’habillage afin de le mettre face à quelque chose en permanence. Du coup, on a travaillé sur un plateau assez simple de lecture, mais pour autant très produit et léché. Ce sera très graphique aussi. L’idée du logo et du générique de l’émission est un agrégat de puzzle et de facettes. Ça illustre les parcours et les trajectoires politiques. On ne veut pas non plus mettre nos invités debout, mais on a préféré éviter les éléments trop opaques et massifs. Je pense que l’on peut travailler le côté statutaire par d’autres moyens. Le plateau se voudra en toute transparence pour la sincérité et l’authenticité.

Allez-vous éviter le côté anxiogène souvent exploité sur les plateaux d’émissions politiques ?

C’est typiquement ce qu’on l’on veut éviter. Qui dit intimiste, ne veut pas forcément dire des lumières très chutées, avec une ambiance sombre. Si on prend l’exemple de 7 sur 7, c’est vrai que c’était un plateau noir avec deux écrans bleus. C’était très minimaliste et anxiogène pour le coup, mais c’était ce qu’il fallait pour l’époque. Aujourd’hui, nous voulons que ça soit lumineux et nous avons travaillé le côté facetté. Avec de tels curseurs, nous allons créer une ambiance intimiste sans parler de personnel, tout en gardant l’aspect du programme politique. On a joué sur cette dualité, à la fois scénographique et dans la réalisation.

L’idée est-elle de s’éloigner de la charte graphique de l’information sur TF1 ?

L’idée est d’évènementialiser le programme. On va donc sortir du code de l’information qui est puissant. Là, on est dans autre chose avec un magazine politique. Pour casser les codes, on a choisi une typographie et des formes géométriques différentes. Mis à part l’utilisation de la couleur bleue, on n’est pas du tout dans ce que l’on fait pour les JT. On ne sera pas dans la rupture, car on reste sur TF1 qui est une chaîne puissante, mais on a créé un format à part entière dans le graphisme et l’habillage.

Les late show américains où les politiques font souvent des sorties remarquées ont été cités par la direction de l’information comme inspiration. Mis à part la présence du public, des codes ont-ils été repris ?

On n’est pas là pour faire du plagiat. Il n’y aura pas l’effet late show avec le gros canapé, le bureau et cette réalisation à l’anglo-saxonne très frontale. On a nos codes à défendre et à respecter. Dans le dispositif scénique, c’est vrai que l’on va être dans quelque chose qui va faire penser par certaines ambiances et séquences à l’infotainment.

« il faut que l’habillage réponde à l’éditorial et la tonalité que l’on veut donner à l’émission »

La 3D sera-t-elle exploitée ?

C’est toujours une question de tendance. Quand on a fait « La minute pour comprendre » au sein du JT on avait exploité le flat design pour être « digital friendly » il y a deux ans. Aujourd’hui, on revient à l’extrude, à la 3D, pour donner du volume aux éléments. On est dans un entre-deux avec Vie Politique. Ce qui est certain c’est que la typographie du logo qui est très géométrique, très angulaire, et implique une mise en perspective sans pour autant être dans de la 3D. C’est un habillage très immersif avec une mise en abîme.

TF1 a-t-elle également créé l’habillage sonore de Vie Politique ?

Nous avons travaillé en étroite collaboration avec les équipes de Santi (Directeur de la musique de TF1, ndlr). Tout a été créé en interne, car on cherche à mutualiser nos compétences. À partir du visuel, de sa couleur, du ton, de sa tonalité, ou encore de la pertinence de l’émission, on a créé un habillage sonore durant plusieurs semaines.

La case de diffusion impose-t-elle des contraintes dans le développement de l’habillage de cette nouvelle émission politique ?

Pas véritablement. Après, il est certain que l’on ne va pas créer une ambiance orangée à 19 heures. Inconsciemment, on s’interdit certaines choses, car on sait que ça ne correspond pas forcément à la tranche horaire de diffusion. On est totalement libre dans la création et on a carte blanche pour assumer un parti pris de faire les choses comme on le sent, comme on veut qu’elles soient véhiculées et transmises aux téléspectateurs.

Un habillage trop sophistiqué ne peut-il pas par exemple exprimer trop de fioritures dans une émission politique qui cherche à aller aux sources ?

Oui, mais c’est très subjectif comme approche. Ça peut aussi, à l’inverse, être trop simpliste et trop cérébral. A contrario, le rendu peut être trop fourni et graphique. Quand c’est trop épuré, on dit que ça cache quelque chose, par exemple un manque de temps dans la création, et quand c’est trop chargé on peut avoir l’effet inverse. Au final, il faut que l’habillage réponde à l’éditorial et la tonalité que l’on veut donner à l’émission.