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Alain Chamfort > Rencontre avec le chanteur devenu narrateur

Alexandre Raveleau
Publié le 13/06/2011 à 00:52 Mis à jour le 13/06/2011 à 00:54

Dans le cadre de son rendez-vous « Un soir avec », France 5 diffusera le 16 juin « Une Vie Saint Laurent ». Signé par Gérard Pont et Morgane Productions, le documentaire dresse un portrait original du plus célèbre des couturiers français. Réalisé à partir du concept-album d’Alain Chamfort et Pierre-Dominique Burgaud sorti en 2010, le film est un objet télévisuel sans précédent, une biographie atypique. Le célèbre chanteur revient sur la genèse du projet.

Alexandre Raveleau : En 2010 sortait votre album intitulé « Une Vie Saint Laurent ». Un an plus tard, France 5 diffuse le portrait du couturier, construit d’après vos chansons. Vous en êtes également le narrateur, présent à l’image. Êtes-vous devenu un « intime » d’Yves Saint-Laurent ?

Alain Chamfort : Il nous accompagne en tout cas depuis deux ans maintenant. J’ai une réelle affection pour lui, même si nous ne nous sommes jamais rencontrés. Il faut dire que je ne me suis jamais autant intéressé à un personnage de ma vie.

Comment est née l’idée de ce documentaire ?

Après la sortie du disque, plusieurs sociétés de productions sont venues nous « renifler » pour voir ce qu’ils pouvaient en tirer pour la télévision. La meilleure idée, le plus intelligente et la plus simple, est revenue à Morgane Productions. Nous avions déjà créé des séquences par le biais de notre travail d’écriture. Il a ensuite fallu trouver les liens, et travailler. D’autres projets ont failli voir le jour. Les premiers qui ont voulu faire vivre l’album étaient Gérard Montalvo et Dominique Hervieu, qui dirigent le Palais de Chaillot. Ils souhaitaient faire un spectacle chorégraphié avec archives et projections, comme ils savent très bien le faire. Tout cela a été abandonné.

Le documentaire, avec ses nombreuses archives, correspond-il aux images que vous vous étiez faites de la vie d’Yves Saint Laurent ?

Nous avions déjà consulté de nombreuses archives pour la préparation du disque. Mais les avoir aujourd’hui toutes assemblées, ça prend une tout autre ampleur.

Qu’apporte le documentaire de plus que le disque ?

Nous sommes dans une période où les gens de la filière musicale, reprochent aux télévisions - et je les accompagne dans ce reproche - de ne pas aider beaucoup la musique. Là, nous arrivons à trouver un biais original pour défendre un album. Ce n’est pas toujours facile de trouver des manières nouvelles de présenter la musique à la télévision. Évidemment, ce n’est pas un concept qu’il est possible de reproduire indéfiniment. Il va falloir trouver d’autres solutions.


Écrire un album sur la vie d’Yves Saint Laurent était pour vous une évidence ?

Au départ, je n’ai pas complètement adhéré au concept de Pierre-Dominique Burgaud (auteur des textes de l’album ndlr). Il me semblait qu’une chanson doit être faite pour le plus grand nombre, même si nous ne sommes pas dans une recherche de populisme. Elle se devait de toucher le plus de gens possible, par le biais de sujets et des thèmes universels. Saint-Laurent ne me paraissait pas correspondre à cette catégorie parce que je ne le connaissais pas bien. Finalement, j’ai eu envie de mettre en musique les premiers textes parce qu’ils étaient très bien écrits. Et de fil en aiguille, j’ai commencé à m’intéresser au personnage et découvert un homme au destin hors normes, une vie romanesque et dramatique. Sa vie a une dramaturgie réelle. Tout m’a semblé d’un seul coup évident.

Votre album a t-il été conçu avant la disparition du couturier ?

Oui. Nous souhaitions d’ailleurs lui faire écouter les morceaux définitifs, mais il était déjà trop fatigué. Nous avions bien sûr rencontré Pierre Bergé au préalable. Sans son aval, nous aurions renoncé tout de suite. Et son accord est intervenu rapidement, dès notre premier rendez-vous. Il était extrêmement ému, avec les larmes qui lui montaient aux yeux, en écoutant nos premiers essais. À la fin de la production, nous sommes retournés le voir avec l’album. Il nous a alors annoncé qu’Yves Saint Laurent était très malade.

Comment appréhendiez-vous la mode d’Yves Saint Laurent avant de lui consacrer un album ?

J’ai une anecdote à ce sujet. Quand nous avons commencé à travailler, Pierre Bergé nous a accueillis dans les ateliers de la maison. Il nous a ouvert toutes les portes. Nous avons été très enrichis par ces visites, car ils ont tout conservé. Il y a un travail d’archivage énorme, avec les dessins, les esquisses, le tout trié par date. Toutes les pièces de tissus, le prix... Tout est rangé par modèle en ce qui concerne la haute couture. Ce qui est impressionnant chez les créateurs de mode, et plus particulièrement chez Yves Saint-Laurent, c’est la force de travail. Ces gens doivent présenter deux collections par an. Tout s’enchaîne très vite. Lui ne laissait à personne le soin de dessiner un bouton. Tout était sous contrôle. Une somme de travail incroyable, avec une volonté folle ! Derrière tout ça, Yves Saint-Laurent souffrait beaucoup et était dans l’impossibilité de se détacher de ses addictions.

Après cet album et ce documentaire, sur quel projet allez-vous travailler ?

Je prépare un nouveau disque pour Universal. Le label Mercury m’a demandé d’enregistrer des reprises de mes classiques, en duo avec des filles. Il devrait sortir à la rentrée prochaine, avec une douzaine de titres.