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Pour AB, Pierre Bellemare change de registre et raconte Toute l’Histoire

Alexandre Raveleau
Publié le 25/02/2013 à 13:13 Mis à jour le 27/05/2022 à 00:43

En près de 60 ans de carrière à la télévision, Pierre Bellemare a successivement été animateur de jeux, raconteurs d’histoires extraordinaires ou vendeurs d’objets. Créateur, présentateur, producteur : il a occupé tous les postes depuis la création du petit écran. À partir de ce 25 février, il prend les commandes de Pierre Bellemare raconte sur Toute l’Histoire. En 13 épisodes, il remonte le fil de la grande Histoire, et commence par la Seconde Guerre mondiale.

Alexandre Raveleau : Auprès du public, vous êtes l’un des conteurs d’histoires et faits divers les plus populaires. Comment allez-vous aborder l’Histoire, avec un grand H, dans votre nouvelle émission ?

Pierre Bellemare : La grande Histoire, et plus précisément la Seconde Guerre mondiale, est ici racontée avec de magnifiques archives. Quant à moi, j’interviens entre les images pour parler de la guerre telle que je l’ai vécue. Le premier épisode commence par l’avènement d’Hitler. Il faut bien expliquer les choses. Pour un enfant, de nos jours, il totalement incompréhensible d’imaginer cette époque. On se dit « qu’est ce qu’il nous raconte ? » Quand on voit des Allemands aujourd’hui, on ne peut pas penser à l’Allemagne d’autrefois. L’Hitlérisme, c’est 11 ans. Et des millions de morts. Pendant ce temps-là, en France, on ne voulait pas la guerre. Tandis que les Allemands commençaient leurs horreurs, nous faisions les congés payés !

Dans cette collection diffusée sur Toute l’Histoire, il sera donc aussi question de vos souvenirs...

Il se trouve qu’à mon âge, 83 ans, j’ai donc vécu la guerre en France, plus précisément à Paris et en Normandie, entre 10 et 15 ans. Cette période m’a beaucoup marqué sur le plan de la vie quotidienne et de mon imagination. Nous crevions de faim. Aucun moral. Nous n’avions rien pour se chauffer. L’hiver 1940-1941 a été extrêmement rude. Nous avons brûlé les meubles qui se trouvaient dans la chambre de bonne. Nous nous serrions autour du poêle... Au début, jusqu’en 1942, les Allemands remportaient toutes les batailles. C’était absolument infernal. Par conséquent, je suis devenu nul à l’école. J’ai perdu deux ans de ma vie à cause de la défaite. Mon père avait fait la guerre de 1914. C’était un effondrement.

« Cette période m’a beaucoup marqué sur le plan de la vie quotidienne et de mon imagination. Nous crevions de faim. »

Comment avez-vous vécu la fin de l’Occupation ?

Pour nous, ça s’est terminé avec l’entrée du Général Leclerc. Après le déshonneur, le cauchemar était fini. Nous avons ressenti ce bonheur à partir du 24 août 1944, même s’il y avait toujours des miliciens dans Paris. Plus largement, mon opinion envers les Allemands a basculé lorsque Mitterrand et Kohl se sont pris la main. Jusque-là, j’étais très méfiant.

Peut-on comparer l’exercice auquel vous vous prêtez à celui d’Alain Decaux, autre figure incontournable de l’ORTF ?

La comparaison est impossible. C’est un monsieur qui improvise tout. Bien évidemment, il préparait son récit et ses illustrations pour son émission, mais il n’avait pas une ligne de texte. J’ai une admiration sans bornes pour lui. Formidable. Je peux improviser, mais je ne saurai pas faire comme lui.

Après la Seconde Guerre mondiale, quels autres sujets d’Histoire pourriez-vous développer dans le cadre de ce programme ?

Le conflit indochinois m’a aussi beaucoup marqué. À ce moment-là, je faisant mon service militaire. On m’a dit : « Allez donc en Indochine, vous allez voir, c’est formidable ! » (rires) Je n’étais pas très tenté... D’autre part, y avait aussi la menace des Russes... Un pays totalitaire assez chouette. Et la Corée de l’autre côté... Finalement, nous avons quitté nos bases pour aller vers Berlin, pour nous joindre aux armées américaine et anglaise. Je couchais chez l’habitant. Nous avons été cajolés par les Allemands, qui n’avaient qu’une hantise, que les Russes arrivent ! Ce sont des souvenirs, mais surtout des périodes terribles. On est passé très très près d’une autre guerre.