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De Dexter à Southland, les confessions de Shawn Hatosy

Robin Girard-Kromas
Publié le 03/11/2012 à 17:37 Mis à jour le 14/11/2012 à 10:22

A l’âge de 37 ans, Shawn Hatosy est l’une des stars de la série policière Southland, dans laquelle il interprète le détective Sammy Bryant. Série saluée par la critique mais injustement ignorée des cérémonies de récompenses, cette dernière met en scène une équipe de la police de Los Angeles plus réaliste que jamais, le tout sous la direction de John Wells (Urgences). Outre Southland, Shawn Hatosy s’est également glissé sous les traits d’un glaçant serial killer dans Dexter. A l’occasion du 52e festival de la télévision de Monte Carlo, l’acteur est revenu sur ces deux rôles qui ont marqué sa carrière. Entretien.

Robin Girard-Kromas : En quoi Southland se distingue-t-elle des autres séries policières américaines ?

Shawn Hatosy : Nous essayons de dépeindre le monde de la police de la manière la plus réaliste qu’il soit. Certaines séries à succès mettent en scène des héros presque cartoonesque, toujours parfaits, qui résolvent la moindre enquête en 42 minutes, soit tout juste le temps d’un épisode. Par ailleurs, l’esthétique de Southland est celle du réelle, montrer la vie comme elle est.

Vous étiez en plein tournage de la seconde saison quand NBC a brutalement décidé de mettre un terme à la série, avant même la diffusion de la saison 2. Comment avez-vous réagi ?

C’était très dur. Il faut bien comprendre qu’il est déjà très difficile pour qu’un projet devienne une série, et qu’un pilote donne lieu à la commande d’épisodes supplémentaires. Selon moi, l’écriture était très bonne sur Southland. J’étais très fier de faire partie de cette série. Quand j’ai appris que tout était fini, j’étais particulièrement dévasté, car j’étais très content du travail que nous avions accompli. Mais finalement, la joie n’en a été que plus importante lorsque nous avons appris que la série allait continuer sur le câble.

Comment avez-vous vécu l’arrivée de Southland sur la chaîne câblée TNT ?

Je pense que ce transfert sur le câble a permis à la série d’être de meilleure qualité. Nous étions limités chez NBC, car nous devions raconter le genre d’histoires qu’ils ont l’habitude de proposer avec de beaux paysages, des policiers sans défauts qui n’ont aucun souci à résoudre l’affaire de la semaine... TNT nous a laissé beaucoup plus de liberté et cela nous a permis de dépeindre la noirceur de la ville de Los Angeles avec plus de justesse.

« J’emm**rde NBC »

Avec le recul, avez-vous compris la décision de NBC ?

Non. J’étais tellement en colère contre la chaîne à l’époque. Les gens à NBC avaient perdu de vue ce qu’ils étaient avec l’arrivée de Jay Leno à 22 heures (chaque jour de la semaine, ndlr). Le concept de supprimer les séries à 22 heures était très déroutant et c’est ce qui a causé notre disparition. Je ne l’ai pas compris. Aujourd’hui, je dois avouer que j’ai une certaine satisfaction à constater que tout va bien pour Southland sur TNT alors que NBC connaît encore de grosses difficultés, particulièrement à 22 heures (L’interview a été réalisée avant le début de la saison 2012/2013, ndlr). Donc maintenant, j’emm**de NBC ! (rires)

Lors de la troisième saison, Southland n’a pas hésité à se débarrasser de l’un de ses personnages principaux. N’avez-vous jamais craint d’être à votre tour l’une des victimes des scénaristes ?

J’ai la sensation qui si nous étions restés sur NBC, j’aurais été tué rapidement ! (rires) C’est vrai que Kevin Alejandro était mon partenaire à l’écran. Je dois dire que je remercie les scénaristes, car sa mort a créé d’excellentes histoires à jouer pour mon personnage (rires). Quand des personnages aimés du public sont ainsi tués dans les séries, cela crée un environnement plein de tension. Un peu comme dans Game Of Thrones, où le personnage principal a été tué au détour d’un épisode ! Résultat, maintenant, je sais que tout le monde est en danger dans la série !

Suite à ce rebondissement, vous êtes désormais un officier en patrouille et formez désormais un nouveau binôme avec Ben Sherman (Ben McKenzie). En quoi est-il différent du précédent ?

Je pense que la série est à son meilleur niveau lorsque l’on suit les officiers en patrouille. J’ai vraiment eu de la chance de pouvoir désormais me glisser dans la peau de l’un d’entre eux. Et tourner les scènes dans une voiture, cela donne lieu à plus de spontanéité. Car résoudre des affaires, si ça peut parfois être excitant, c’est surtout beaucoup de paperasse, de récolte d’indices et d’attente. Chasser les « méchants » dans une voiture, avec beaucoup de scènes d’action, c’est plus amusant !

Comment vous êtes vous préparé pour ces nouvelles fonctions aux côtés de Ben McKenzie ?

Avant chaque saison, nous passons beaucoup de temps avec les conseillers techniques de la série. Nous avons des cours de base, sur la façon de menotter les gens et autres actions effectuées par les policiers. Lorsque nous tournons, nous faisons tout cela de la bonne manière et cela contribue au sentiment de réalisme que l’on essaye de faire ressortir. Nous devons être bien préparés, car lorsque nous filmons, nous devons être focalisés sur notre jeu d’acteur et ne pas nous laisser déconcentrer par des détails techniques.


Que réserve la cinquième saison de Southland, prévue en 2013 sur TNT ?

Le personnage de Lucy Liu, introduit dans la saison 4, ne devrait pas être de retour, car elle a désormais une nouvelle série (Elementary, ndlr). Elle a fait en tout cas un boulot fantastique l’année dernière. À mon avis, un nouveau personnage va faire son apparition dans la saison 5. Je pense que c’est excitant pour les acteurs de participer à Southland car il y a une réelle noirceur, la série a une vraie identité. Dans tous les cas, j’ai hâte de voir ce que les scénaristes nous ont réservé.

Lors de la première saison de Southland, une polémique a éclaté après la censure d’un passage mettant en scène John Cooper (Michael Cudlitz) dans un bar gay. Qu’en avez-vous pensé ?

Ce n’était pas vraiment problématique pour moi. Je pense que l’on pouvait déjà comprendre qu’il était homosexuel sans cette scène, de façon plus subtile. Mais la série s’est bien rattrapée par la suite, avec une scène où on le voit se réveiller avec un autre homme. Tout cela donne plus d’épaisseur au personnage. J’espère que nous allons explorer un peu cet aspect de la série d’ailleurs. Encore une fois Southland se veut proche de la réalité et il y a bien entendu des homosexuels dans la police.

Quelle facette de votre personnage aimeriez-vous explorer plus en profondeur dans les prochaines saisons ?

Quelque chose que l’on n’a pas vraiment vu jusque-là. J’ai un enfant que j’aime, et j’ai une relation très dysfonctionnelle avec mon ex-femme. Développer la vie privée de Sammy et son rôle de père pourrait être intéressant. Mais je dis peut-être ça, car je suis moi même papa et que je connais ce genre de sentiments : élever un enfant à Los Angeles, c’est spécial, le système scolaire est un peu fou ! (rires)

Vivant à Los Angeles, quelles différences notez-vous entre la ville que vous connaissez en tant qu’acteur et celle dépeinte dans Southland ?

C’est vraiment la même chose. Je ne vis pas très loin de là où on tourne. On ne construit pas de décors imaginaires, tout est tourné dans la ville. Les éléments de danger sont aussi présents dans la réalité. On voit à Los Angeles les plus pauvres et les plus riches, avec peu de policiers pour gérer les tensions. Southland m’aura en tout cas ouvert les yeux sur la police et le dur métier qu’ils font.

« Dexter est un génie »

Vous êtes apparu dans la cinquième saison de Dexter dans le rôle de Boyd Fowler. Quelle comparaison pourriez-vous faire entre vos deux expériences ?

Dexter n’est pas vraiment une série réaliste, contrairement à Southland. Mais c’est un drama fascinant et le personnage principal est très bien écrit. Le personnage que j’interprétais était un vrai fou, à collectionner les jeunes femmes dans son placard avant de les électrocuter ! En tant qu’acteur, c’est assez incroyable de pouvoir jouer de tels rôles.

Après Dexter, le regard des gens a-t-il changé sur vous ?

(rires) Non et heureusement ! Ce qui m’a surtout impressionné avec Dexter, c’est la popularité de la série, notamment à Los Angeles. Il faut dire qu’ils font un boulot formidable.

La mise en valeur d’un tueur en série ne vous gène-t-elle pas d’un point de vue moral ?

J’adore Dexter, c’est un vrai génie. Le fait qu’il se soit créé tout un ensemble de règles qui lui permettent de tuer, qu’il ne puisse pas ressentir d’émotion et soit obligé de demander « comment ressentir », c’est fantastique. Cet aspect psychologique du personnage est finalement plus important que son statut de serial killer.