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Didier Giraud (Les Grandes Gueules) : « L’amour est dans le pré représente ce qui a de plus abject dans la télé-réalité »

Joshua Daguenet
Par
Rédacteur TV & Séries
Publié le 28/03/2021 à 18:40

Avec son phrasé et sa saillante moustache, Didier Giraud se fait l’étendard du secteur agricole depuis plus de 15 ans dans Les Grandes Gueules, proposées du lundi au vendredi à 9 heures sur RMC Story. Aujourd’hui, il défend sa profession devant les attaques militantistes.

Joshua Daguenet : Il y a six ans, dans une émission à laquelle vous étiez présent, Alain Marschall lançait à Gilbert Collard : « Tu m’emmerdes, ta gueule où je te sors du studio ». Vous qui êtes présent depuis la première saison des Grandes Gueules, avez-vous le souvenir d’un moment plus marquant auquel vous ayez participé ?

Didier Giraud : C’est compliqué à dire, il y a différents types d’émotions. Celle qui m’a le plus marqué c’est le jour où on a reçu Elina Dumont qui présentait son livre [En 2012, ndlr], racontant son parcours de vie, de SDF, et qui est devenue depuis une Grande Gueule. Une chape de plomb est tombée sur le studio. Il y a aussi de bons moments qui marquent, les bonnes personnes que l’on rencontre.

Chaque année en France, un milliard d’animaux sont tués pour notre alimentation. Est-il possible, comme le réclament beaucoup d’associations, de réduire ce chiffre impressionnant en limitant l’impact sur le secteur agricole ?

L’alimentation est basée sur les protéines animales. Il y a des gens pour nous emmener vers la protéine végétale. Je ne crois pas que la cause animale ne soit pas le plus grand des enjeux. Ceux qui prônent le véganisme sont à la botte de normes végétales. Les agriculteurs ne sont pas dupes. Il y a un lobbying de la protéine végétale. Ce mode de production est loin d’être vertueux. Le steak de soja est fait à partir de la déforestation amazonienne. Qu’est-ce qu’il y’a d’écolo là-dedans ? La réalité parfois décrite par ces associations est loin d’être authentique.

« Le jour où Elina Dumont est venue présenter son livre... une chape de plomb est tombée sur le studio »

Vous avez défendu à l’antenne la vénerie, communément appelée « Chasse à courre » qui est cruelle pour les proies. N’est-elle pas une pratique d’un autre temps ?

Elle fait partie des traditions françaises. Des gens vont aux églises, d’autres vont au stade et d’autres chassent. J’entends les arguments contre la chasse, mais la majeure partie du temps, l’animal n’est pas mis à mort et il s’en sauve. Elle peut heurter une partie du public, mais comme la mort d’humains peut heurter.

Une agricultrice de l’émission des Mamans a confié à Toutelatele adorer l’émission L’amour est dans le pré pour son authenticité et la manière dont elle valorise le métier. Partagez-vous son avis ?

Je ne partage pas du tout cet avis. Je trouve que cette émission, qui au départ répondait à une vraie problématique agricole, est devenue une émission de télé-réalité. Elle représente ce qui a de plus abject dans la télé-réalité. Je connais des gens qui ont porté plainte contre la production de cette émission. Mettre en concurrence des jeunes filles chez un agriculteur est un concept qui me dépasse. Quand, autour de ça, on filme en continu pour en faire un talk-show de 20 minutes avec des protagonistes qui n’ont pas de droit de regard...

La crise sanitaire a entraîné la fermeture de nombreux marchés. Comment cela a pesé sur votre activité ?

Sur mon exploitation, j’ai une activité de vente directe, donc le contexte très local a eu une réaction favorable lors du premier confinement avec une augmentation du chiffre d’affaires. Mais le gros que je produis finit en grande surface. Les GMS [Grandes et moyennes surfaces, ndlr] tirent leur épingle du jeu, car elles n’ont jamais été fermées.

« Ceux qui prônent le véganisme sont à la botte du lobby végétal »

Carrefour a récemment proposé une côte de bœuf à moins de 10 euros. Estimez-vous cette pratique scandaleuse ?

Il n’y a pas que Carrefour qui le fait. Pour proposer le meilleur de la vache à moins de 10 euros, l’agriculteur reçoit au maximum 3 euros. La viande passe entre 4 et 5 mains, chacun prend sa marge. La seule doctrine est que le consommateur paie le moins cher possible. Comment ils font ? Ils font de l’équilibre de matière, cachent le prix sur certains morceaux pour faire de grosses marges sur d’autres.

Vous vous inquiétez du rapport inexistant aujourd’hui entre la laïcité et une jeunesse davantage préoccupée par les nouvelles technologies. Cela peut-il impacter l’avenir de l’agriculture ?

Non, je ne suis pas persuadé. Il y a aussi des jeunes passionnés d’agriculture qui sont connectés et vivent dans le monde de leur âge. C’est plutôt complémentaire. Aujourd’hui, les tracteurs sont connectés avec un satellite pour l’utilisation des pesticides, l’engrais... Ces pratiques sont méconnues, mais ont basculé l’agriculture dans le siècle suivant.

Clint Eastwood a émis la remarque suivante en 2020 : « Tout le monde se demande comment laisser une meilleure planète à nos enfants, mais on devrait plutôt penser à laisser de meilleurs enfants à notre planète ». Qu’en pensez-vous ?

C’est un peu le cas, je peux presque partager son avis même si dans l’histoire de l’humanité, il y a toujours des vieux cons de 50 ans qui disent à des gens de 20 ans comment ils doivent agir. Dire que nos enfants ne sont pas respectueux de l’environnement, ce n’est pas complètement exact, même s’il peut exister quelques incohérences. Des fans de Greta Thunberg sont militants de la 5G et veulent avoir du réseau partout...