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Dynastie/Dallas : les deux soeurs ennemies de la télé

Cécile Raigne
Publié le 18/04/2006 à 00:42 Mis à jour le 27/05/2022 à 00:41

Pro Carrington ou pro Colby ? Dès aujourd’hui, la bataille va faire rage entre les deux familles milliardaires de l’autre soap des années 80. Alors que les Ewing de Dallas ont établi leur QG sur Jimmy depuis 2003, et que France 3 rediffuse à son tour les frasques des texans, c’est du côté de Denver que se tourne Teva, la Télévision d’Emotions, pour confier elle aussi son antenne à des magnats du pétrole. Avec ses 9 saisons et ses 220 épisodes, la furie Dynastie nous rejoue son intégrale et prend la succession du medical drama Chicago Hope tous les jours à 15h25 et 16h20. Pour l’occasion, la chaîne ne fait pas les choses à moitié. Elle a préparé cette entrée en grandes pompes en diffusant Dynastie : les coulisses du mythe, une fiction satirique inédite sur la série, ses guerres intestines, et ses multiples rebondissements. A l’image des bombes de laque jointes aux communiqués de presse, Teva donne donc le ton : soap à savourer au 10ème degré ! Surtout vingt ans après.

Ils sont riches, beaux, et prêts à tout pour parvenir à leurs fins. Querelles familiales, magouilles, chantage, meurtre, combat dans la boue, rien ne les arrête lorsqu’il s’agit de pouvoir et d’argent. D’un côté les Carrington, autour de Blake (John Forsythe), le patriarche. Et de l’autre les Blaisdel, bientôt évincés par les Colby. Au programme : des mariages, des divorces, des procès, des aliens... entre cuillères de caviar et coupes de champagne. Pour l’heure, Blake épouse Kristle, Fallon doit s’unir à Jeff alors qu’elle craque pour Cecil et entretient une liaison avec le chauffeur. Steven a lui choisi Ted. Quant à la machiavélique Alexis (Joan Collins), véritable pendant féminin de JR, elle n’entrera dans l’arène qu’avec la deuxième saison, pour se voir sacrée reine des pestes du petit écran...

Dynastie réunit tous les classiques du genre. Et pire, cultive la démesure avec jouissance. Lancée en 1981 par ABC face au raz de marée Dallas, sa finalité est claire : surpasser en tous points le modèle des prime time soap operas pour faire malmener la rivale CBS. Aaron Spelling, qui a déjà commis moult productions télévisées parmi lesquelles les séries Starsky et Hutch, Drôles de Dames, La croisière s’amuse ou L’île Fantastique, se voit confier le projet pour faire toujours plus impitoyable que le théâtre de Southfork. Plus beau, plus fastueux, plus scandaleux, plus indécent... quitte à déshabiller ses acteurs pour captiver l’audience.

Et le soap finit par rencontrer son public, surtout après l’arrivée d’Alexis qui renouvelle son potentiel d’ignominies. En 1983, Dynastie est 5ème du top des audiences. En 1984, elle prend la 3eme place La cinquième saison est celle de l’apogée. Les personnages frayent avec des jet-setteurs du monde entier entre l’Orient, l’Europe et les Etats-Unis, bien loin du réalisme terrien de Dallas. Mais la sixième amorce le déclin. Face au succès grandissant de Côte Ouest, la dérivée de son ennemie, Dynastie donne à son tour naissance à un spin off, Les Colby, avec notamment Charlton Heston (Ben Hur). Mais il sera annulé deux ans plus tard, sans avoir réussi à intégrer le top 20 des programmes. La recette ne fonctionne plus, Dynastie voit ses audiences s’effondrer. Ses acteurs quittent le navire en 1989 et signent sa fin deux ans avant que Dallas ne rende à son tour l’antenne. En 1991, le public lui rendra toutefois un dernier hommage en saluant la mini-série La Réunion qui viendra définitivement sceller le sort des protagonistes.

Dynastie n’est parvenue qu’un bref moment, en 1985, à devancer Dallas dans la course aux audiences. Mais le secret de sa longévité, elle le doit avant tout à un zeste de subversion qui l’a préservée du ridicule de ses intrigues rocambolesques (un crash en pleine cérémonie de mariage quand même). Derrière le bal des brushings, des gros cailloux et des tenues haute couture lamées or, derrière le mythe du self-made man enflé par l’ère Reagan, les scénaristes Richard et Esther Shapiro ont choisi d’assumer la carte du kitch et du too much pour teinter leur show d’une étincelle d’ironie. Et ont introduit dans ce bulldozer de faste et de passion mélo quelques grammes d’engagement, juste assez pour y positionner un homosexuel assumé et des personnages noirs intéressants...

Quinze ans après la fin de sa production, Dynastie pourrait bel et bien à nouveau rivaliser avec Dallas mais cette fois-ci sur grand écran. En effet, si les Ewing sont assurés d’envahir prochainement les salles obscures, Dynastie serait également pressentie pour rejoindre le cercle du 7ème Art. Et les noms de Victoria Beckham et Bruce Willis auraient circulé pour intégrer le casting... La guerre des clans aura t-elle à nouveau lieu ?