Toutelatele

L’île de la tentation renaît de ses cendres

Aurélie Demarcy
Publié le 20/11/2009 à 13:20 Mis à jour le 27/04/2010 à 21:02

« Le meilleur moyen de résister à la tentation c’est d’y céder  » Le poncif d’Oscar Wilde, quelque peu modifié par TF1, n’aura jamais fait autant parler de lui que durant l’été 2002. La période estivale est propice à la légèreté, TF1 le sait et lâche ses tentatrices sur les plages de Koh Samui, toutes vêtues de bikinis... légèreté oblige.

L’île de la tentation fait ainsi une entrée des plus controversée, le principe du programme étant de mettre la solidité de 4 couples à dure épreuve. En effet, les protagonistes séparés de leurs moitiés durant une dizaine de jours vont devoir contrecarrer les charmes déployés par un panel d’hommes et de femmes, bien déterminés à les faire succomber. Un jeu dangereux entraînant déchirures, suspicion et larmes sur fond de vacances paradisiaques, auxquels les téléspectateurs sont vivement conviés. Et bien que le concept dérange et repousse un peu plus les frontières des codes cathodiques, peu à peu les langues se taisent et les yeux se braquent chaque semaine... vers le petit écran.

Lors de sa première saison, L’île de la tentation frappe fort et réunit une moyenne de 4.6 millions de fidèles, férus des incartades du sulfureux duo phare Brandon et Diana. Un succès donnant inéluctablement lieu à une seconde édition. Hors, il s’avère que l’année 2002 sera moins productive, et moins de 3 millions d’assidus se rassembleront finalement autour de Stéphane Bouillaud et des feux de camps, lieu de toutes les catharsis pour des candidats émotionnellement perturbés.

Perte de fidèles oblige, Glem, la société de production, tente alors quelques changements et les nouveaux couples et leurs tentateurs(rices) atterrissent, cette-fois, sur l’île de Tulum au Mexique. Le domaine des femmes emprunte le nom d’Esmeralda, tandis que celui des hommes répond à celui de Diamante K. Côté casting, Stéphane Bouillaud le confirme : « Le casting est excellent, avec des histoires d’amours très fortes. Les quatre couples s’interrogent vraiment sur eux-mêmes... Et puis les années précédentes, ce sont surtout des filles qui insistaient pour participer. Cette année, c’est du 50-50. C’est riche en personnages comme en rebondissements ! » Les propos du maître de cérémonie ne sont pas démentis, L’île de la tentation fédère alors 3.5 millions de téléspectateurs.

Remise sur les rails, la saga estivale continue sur sa lancée et affiche, chaque année, son lot de naïades et de testostérone, point noeudal des drames amoureux. Même le changement d’animateur, Céline Géraud étant désormais chargée de calmer (ou d’échauffer ?) les esprits ne perturbe pas le rythme de croisière. Ainsi, le programme estival phare de TF1 atteint les 4 millions de fidèles, lors de la quatrième saison, et coule des jours heureux aux rythmes des pérégrinations amoureuses. Néanmoins, le ciel commence à s’assombrir lorsque certains participants se plaignent des conditions de tournage peu reluisantes, et s’engagent dans la brèche les tentateurs dénonçant des propos dénaturés, suite aux montages des émissions.


Qu’importe, les polémiques élargissent la sphère du programme, lequel ne se cantonne plus au seul espace télévisuel. De ce fait, les saisons s’enchaînent et continuent, jusqu’en 2008. Et malgré une légère érosion d’audience avec 3.3 millions de téléspectateurs lors de l’ultime volet, la saga préserve les faveurs de ses cibles phares avec une moyenne de 56% de part d’audience sur les 15/24 ans, 50% auprès des 15/34 ans et plus de 40% auprès des femmes de moins de 50 ans.

La clé d’un tel engouement se trouve sûrement dans un casting savamment concocté. Au fil des saisons, les couples triés sur le volet se sont révélés totalement décomplexés et n’ont pas hésité à s’engouffrer, sans fards, dans les méandres du mélodrame de la tentation. De Nicolas qui multipliaient les crises de larmes et malaises ne supportant pas la séparation avec l’être aimé (saison 4) en passant par Bérangère et Daniel n’ayant pas hésité à quitter l’aventure (saison 5), Anthony, qui au bout de 3 jours tombe fou amoureux de la tentatrice Julia (saison 6) ou encore Ben charmé par la tentatrice Stéphanie déplore le manque de combativité déployé par sa compagne Fiona pour le récupérer. Pour sûr les participants avaient été passés au crible afin d’assurer de multiples rebondissements à l’émission.

Néanmoins, l’année 2008 signe l’arrêt de cette traversée fantastique. Une volonté de Nonce Paolini, d’abord conciliant dans les pages de Télérama (« L’île de la tentation est un aimable marivaudage »), avant de vouloir moraliser l’antenne et mettre fin à un programme coûteux, comme le rapporte Le Point. Le format, abandonné par TF1, est aussitôt racheté à la Fox par Endemol.

Sans transition, l’aventure des candidats se poursuit, cette-fois, devant les tribunaux. En effet, après une première condamnation discrète en 2005, deux formations des conseils de prud’hommes ont reconnu la qualité de travailleurs aux candidats de l’émission. Glem, la filiale de production de TF1, est ainsi condamnée, au mois d’avril dernier, à verser entre 820 à 865 euros à chacun des treize plaignants issus des troisième et quatrième saisons, au titre des « salaires non versés et des congés payés », en plus des 100€ de dommages et intérêts. Une légère peine loin des 450 à 600 000 € réclamés par l’avocat Jérémie Assous.

Triste bilan, mais tel le Phénix, L’île de la tentation renaît de ses cendres avec un coup de pouce de la part d’Endemol et s’apprête à réinvestir les écrans de Virgin 17 pour une saison 8, en 2010. Et puisque le genre « sea, sex and sun » séduit, la chaîne de la TNT n’hésite pas à faire patienter les fidèles avec une rediffusion du programme à partir de la saison 4 ainsi que sa version américaine.

Avec à ses commandes, Laurent Fontaine, il reste à savoir si les passions estivales séduiront à nouveau le public. Rendez-vous pris autour du feu...