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Musique électro, Miami et Loft Story, rencontre avec Jean-Edouard Lipa

Claire Varin
Publié le 28/05/2012 à 20:00 Mis à jour le 27/05/2022 à 00:43

Jean-Edouard Lipa, DJ, est au coeur d’un Docs de choc, spécial « Miami : la folie électro de la Winter Music Conference ». Pour l’occasion, le jeune homme de 32 ans revient sur son parcours musical, son album électro « God father is not dead » - aux influences variées (la House des années 90, ou encore Avicii et des groupes comme Daft Punk et Justice) - sorti début mai. L’ex-Lofteur évoque également la télé-réalité et ses expériences de comédien...

Claire Varin : Pourquoi avoir accepté d’être suivi dans ce Docs de choc à Miami ?

Jean-Edouard Lipa : On ne me voit pas souvent à la télé, parce que je n’ai pas envie qu’on me voie pour tout et n’importe quoi, si ce n’est pour mon travail, et en l’occurrence là, je trouvais l’approche plutôt sympathique. J’y ai aussi vu mon intérêt. Je partais dans une ville où je connaissais que très peu de monde et parfois avoir une caméra derrière soi, ça peut ouvrir quelques portes. Surtout dans les soirées de Miami.

La Grosse Équipe vous a donc proposé d’aller à Miami pour essayer d’intégrer la Winter Music Conference ?

J’avais plus ou moins prévu d’y aller et les personnes qui m’ont suivi le savaient puisque ce sont des amis. Lorsqu’ils m’ont proposé de le faire, je me suis dit que ce serait une plus-value pour moi. C’est un doc plutôt rigolo sur l’univers de la musique.

Est-ce une forme de promotion pour votre album « God father is not dead » ?

Oui. L’album vient de sortir, je l’ai autoproduit. Et lorsqu’on fait tout, tout seul, la promotion est très compliquée. Même si je n’ai pas fait le doc dans cette optique-là, je me suis dit que ça pourrait m’aider.

Autoproduire cet album a-t-il été difficile ?

J’ai passé près de deux ans dans mon studio à faire l’album. C’est difficile, comme tout le monde, de composer, d’avoir des idées le lundi et le mardi, il n’y a plus rien. Mais le plus difficile pour moi, c’est d’en faire la promotion. Je prends plus de plaisir enfermé chez moi à faire de la musique que d’aller traîner sur des plateaux de télé à essayer de le vendre. Avec les années, je deviens vachement maladroit. Je n’ai pas peur de prendre des mauvaises critiques - ça, j’y suis préparé depuis longtemps - mais, je suis mal à l’aise dans ce travail de promotion qui ne me ressemble pas.

L’expérience Miami a-t-elle concluante ?

J’ai fait de très belles rencontres là-bas. Les gens ont apprécié mon travail. Le manager et les chanteurs que j’ai rencontrés ont écouté l’album avant qu’il ne sorte et ils m’ont dit qu’ils aimeraient beaucoup qu’on travaille ensemble. Donc, je rentre à Paris avec des contacts. Si pour beaucoup de gens, ce n’est pas grand-chose, pour moi, c’est vraiment pas mal.


Pouvez-vous en dire un peu plus sur la Winter Music Conference de Miami ?

C’est l’équivalent en France du MIDEM principalement pour la musique électronique. Les plus grands DJ au monde se retrouvent là-bas pour présenter leur album ou plus simplement pour faire la promotion de la musique électro. Quand David Guetta prend 300 000 dollars pour une soirée, il n’est pas vraiment demandeur (rires). C’est des clubs qui l’appellent. C’est un grand marché de la musique électronique. Et les plus petits, comme moi, y vont pour rencontrer les DJ et qu’ils jouent notre disque. On peut aussi rencontrer des managers, des organisateurs de soirée ou des labels, mais il ne faut pas se voiler la face, on ne mixe, principalement, que quand on a sorti des disques et que ces disques sont connus dans le milieu.

Dans le document, vous mentionnez avoir travaillé plusieurs années avec David Guetta...

Quand je suis sorti du Loft, David Guetta m’avait récupéré. Je ne suis pas sûr qu’il m’ait pris pour mon talent. À l’époque, je n’avais encore rien prouvé si ce n’est que j’étais DJ en Province et que j’avais fait le Loft. Je me souviens de plusieurs soirées où on rentrait à 6 heures du matin à l’hôtel, il avait fait 300 personnes. Aujourd’hui, on voit le résultat. Lui partait pour promouvoir un disque et moi, je partais pour promouvoir du « vent ». Mais ça m’a permis de sortir une compilation de mix que David a produit et que j’ai réalisé. On a travaillé cinq ans ensemble et après j’ai vogué de mon côté.

David Guetta était également à la Winter Music Conference. Ce n’est pas un contact que vous pouvez utiliser aujourd’hui ?

J’ai vite appris dans ce métier que ce n’est pas parce que vous avez travaillé dix ans avec quelqu’un que demain vous pouvez l’appeler. Je garde de bons contacts avec lui quand on se croise. Mais on ne peut pas dire qu’on s’appelle tous les jours au téléphone. Après, j’aime bien travailler dans mon coin. Ça permet de faire ce que l’on a envie de faire et de ne pas se laisser imposer ce que les autres aimeraient que vous fassiez.

Dix ans après Loft Story, vous sentez-vous chanceux au regard de votre parcours ?

Je ne parlerai pas de chance. La chance serait d’avoir fait le Loft. Mais, ce n’est pas le Loft qui m’a permis de faire de la musique ou du théâtre, j’en faisais avant. Ce n’est pas le Loft qui m’a permis de m’enfermer trois ans chez moi et de composer mon album. Tout ça, c’est juste du travail. Après, j’ai juste la présence d’esprit de me dire « Ne va pas à la télévision pour ne rien dire comme font beaucoup d’autres ». J’ai eu le recul de me dire : « Attention, si tu brûles les étapes autant reprendre tout à zéro et essaie d’être le plus discret possible ».

Êtes-vous un téléspectateur des émissions de télé-réalité ?

Pas du tout. Quand je vois des trucs, c’est au zapping. Je n’ai jamais vraiment suivi. Mais je crois qu’il y a une grande différence entre le premier et la suite. Pour nous, il n’y avait aucune ambition personnelle à faire ce truc-là (Loft Story, ndlr). Quand j’ai passé le casting, j’ai cru que ça durait un jour et en fait, ça en durait 80. On n’a pas fait ça pour être connu, même si on nous l’a longtemps reproché. Aujourd’hui, j’ai le sentiment que c’est le cas. Mais chacun fait ce qu’il veut.

La Grosse Équipe qui a produit Miami : la folie électro de la WMC, produit également Les Anges de la télé-réalité. Vous ont-ils proposé d’y participer ?

Non jamais. Jérémy Michalak me disait encore l’autre jour qu’il n’y avait aucun intérêt à me le proposer. Il a considéré qu’aux vues de tout ce que j’avais fait, j’étais vraiment passé à autres choses. Et s’il me l’avait proposé, j’aurais surement dit non.


Votre ambition se tourne principalement vers la musique ou bien fait-elle jeu également avec la comédie ?

J’aime autant l’un et l’autre. Ce sont deux approches différentes. La musique est un partage indirect, vous la faites et vous attendez que les gens l’écoutent. Au théâtre, c’est un partage direct et quand vous êtes dans une série, c’est presque aussi un partage instantané parce que vous avez des partenaires en face de vous, une équipe technique et la diffusion suit le tournage. Mais j’ai plus ou moins la même approche de ces deux choses. Je mets la même énergie à faire de la musique qu’à jouer la comédie.

On vous a vu dans Section de recherches et Aicha. Est-ce une histoire de rencontre avec la productrice Dominique Lancelot ?

Non, pas du tout. J’avais déjà beaucoup de contacts au théâtre, des amis me faisaient jouer et j’avais vraiment envie de commencer à tourner sur de l’image. Et j’avais peur qu’on puisse me juger aux castings sur la personne que j’étais avant de juger mon travail. Je suis arrivé sur le casting de Section de recherches en disant : « Bonjour, je m’appelle Jean Lupa ». Je passe les essais et le cast me dit « Je te connais... Mais dans quel film, je t’ai vu ? » Je l’ai joué au bluff et quinze jours plus tard, on me dit que la prod a sélectionné mes images et qu’elles vont être soumises à TF1. C’est seulement au milieu du tournage que Dominique Lancelot m’a dit « Jean, comment je dois t’appeler Jean ou Jean-Edouard ? » TF1 venait de lui apprendre qui j’étais et la chaîne l’avait appris la veille. Mais personne au casting n’avait fait le rapprochement.

Dominique Lancelot vous a-t-elle, par la suite, proposé un rôle dans Aïcha ?

Je connaissais déjà Yamina Benguigui. Mais c’est par l’intermédiaire d’une de ses filles, qui était sur le tournage de Section de recherches, que j’ai obtenu le rôle. Elle m’a dit « C’est marrant, je t’aurais bien vu dans un des rôles d’un épisode d’il y a trois ans. » Il s’avère que j’avais fait le casting. Je m’étais même rasé la tête pour ce rôle. Elle a pris mon numéro en disant qu’elle me tiendrait au courant si jamais il y avait un rôle pour moi dans un autre épisode. Huit mois après, elle a rappelé et j’ai passé les essais.

Vous avez également tourné dans Le jour où tout a basculé...

Là aussi, on a raconté que Julien Courbet m’avait appelé alors que pas du tout. C’est la casting director que je connaissais très bien qui m’a téléphoné. J’ai passé quatre ou cinq essais sur quatre ou cinq épisodes différents. Et sur le dernier, la directrice artistique a beaucoup aimé. Une fois que Julien Courbet a vu les images, on s’en est servi. Mais, personne n’est venu me dire : « Bonjour Jean-Edouard, on aimerait que tu viennes tourner dans Le jour où tout a basculé. »

C’est une économie un peu spéciale, quelle expérience était-ce pour vous en terme de jeu ?

Je n’ai pas du tout réussi à me regarder. Vous tournez vingt-six minutes en deux jours. Vous avez une caméra, un projecteur et vous avez le droit de balancer votre réplique une fois et pas deux parce qu’on n’a pas l’argent. Ce qui fait qu’on va surjouer. Dans ces conditions, c’est difficile d’être bon. À côté Section de recherches c’est du cinquante-deux minutes et on a un mois de tournage. Après, toutes les expériences sont bonnes à prendre. Beaucoup de mes potes comédiens ont joué dans Le jour où tout a basculé et ils m’ont dit « Fais-le ». À un moment, il faut aussi gagner sa vie et c’est en tournant un maximum de choses qu’on vous voit.