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Thierry Lachkar (Shine France) : « The Voice a chamboulé tous les paysages audiovisuels à travers le monde »

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Directeur exécutif en charge des contenus
Publié le 01/03/2014 à 13:29 Mis à jour le 07/03/2014 à 15:22

Ces dernières années, Shine a pris de l’ampleur dans le paysage audiovisuel français. Grâce à des marques fortes telles que Masterchef, The Best, La meilleure boulangerie de France mais surtout The Voice, cette société de production s’est imposée comme un des acteurs incontournables de la télévision. Thierry Lachkar, PDG de Shine France est revenu pour Toutelatele sur le succès de ses formats.

Benjamin Lopes : En 2013, The Voice s’est affirmée comme la marque la plus puissante en réunissant 15.6 millions aux Etats-Unis, 9.5 millions en Angleterre et 64% de part d’audience au Québec. Finalement, ne bénéficiez-vous pas d’une marque imbattable ?

Thierry Lachkar : Shine bénéficie effectivement d’un très beau format qui a connu un succès comme rarement la télévision en connait. Il s’agit d’un phénomène mondial. Maintenant, si vous deviez comparer les performances de la version française et son développement, vous verrez que Shine France a apporté sa patte à cette adaptation. Le succès français de The Voice, comme nous le souligne le producteur hollandais (Talpa, détenteur du format, ndlr), n’a pas d’équivalent à l’échelle internationale puisque la version française demeure la plus puissante d’Europe en nombre de téléspectateurs.

À quels aménagements Shine a-t-elle procédé pour l’adaptation de la version française ?

En France, The Voice est plus dans la recherche de l’excellence des candidats, nous avons le niveau de talent le plus élevé de toutes les versions. Par cela, nous avons intégré au sein des équipes de Shine des personnalités qui n’étaient pas à la base des casteurs de concours de chant mais des professionnels reconnus qui ont un œil et surtout une oreille pour déceler les nouveaux talents. Nous sommes donc allés dans les festivals, sur les réseaux sociaux, dans les cabarets, sur Myspace, à Paris et en province. Cette stratégie est, bien entendu, très onéreuse et a nécessité un lourd investissement de la part de Shine.

TF1 se démarque-t-elle des autres versions avec sa sélection musicale souvent éclectique ?

Nous avons procédé à beaucoup d’adaptations sur le choix des registres musicaux. The Voice France est la seule version à avoir en tournage un ratio de 50/50 entre les chansons françaises et les chansons internationales. TF1 et Shine sont ouverts à tous les styles de musique, nous avons eu du fado, des musiques du monde, Luc Arbogast, un chanteur d’inspiration médiévale a même participé à l’émission. Cette diversité n’existe pas dans les autres versions. Autre originalité, sur un même prime time, le téléspectateur pourra écouter une chanson de Jacques Brel et une autre de Lady Gaga, c’est également une des spécificités de la version française. The Voice sur TF1 ne se limite pas à la pop music.

« Nous avons le niveau de talent le plus élevé de toutes les versions »

Si on cumule les meilleures audiences de The Voice sur les 15 marchés, le format atteint 70,6 millions de téléspectateurs. Pourquoi ce talent show est-il si événementiel selon vous ?

Il existe une vraie originalité dans cette émission. Le télé-crochet est un classique du concours de talent. The Voice a apporté des nouveautés qui ont totalement bouleversé le genre pour les téléspectateurs. Evidemment, la pureté de cette émission est selon nous sa principale forme. Cette promesse des auditions à l’aveugle, avec un jugement uniquement sur la voix, ça devrait être l’ADN de tous les concours de chant. Dans The Voice, on ne juge pas les candidats sur leur physique. C’est un format qui a donc chamboulé tous les paysages audiovisuels à travers le monde.

Malgré un très bon niveau, la phase des directs intéresse moins les téléspectateurs. Quels aménagements apporterez-vous cette saison pour tenter de réunir autant que pendant les auditions à l’aveugle ?

Sur les live de The Voice, TF1 est encore très largement au dessus des audiences des autres concours à la télévision française et au dessus de la moyenne de la case. Il est vrai que les performances des auditions à l’aveugle sont stratosphériques avec près de 10 millions de téléspectateurs, des chiffres purement démentiels. L’audience des directs est excellente puisque nous restons à un niveau très élevé. Nous continuons à travailler sur toutes les étapes pour les améliorer. Cette année, une nouvelle étape intervient, l’ultime épreuve. Des nouveautés seront également apportées à la phase des directs mais il est encore trop tôt encore pour en parler.

Les votes gratuits via Twitter pourraient-ils introduits pendant l’étape des live, comme dans la version américaine ?

À ce jour, Shine est encore très attachée à l’idée que l’on puisse faire participer le plus large du public via tous les moyens. L’appel surtaxé est le plus répandu, un mode d’interactivité qui a encore tout son sens aujourd’hui. Mais on ne s’interdit rien, nous sommes toujours ouverts à des améliorations et une recherche de modernité. Le débat de la gratuité n’est pas, selon nous, le seul chemin de nouveauté d’un programme.

Partie 2 > La tournée The Voice, la version Kids et l’avenir de Masterchef sur TF1


La tournée Danse avec les stars, autre format diffusé sur TF1, bénéficie actuellement d’un joli succès. Quel bilan tirez-vous de la tournée The Voice ?

Deux beaux succès avec ces premières saisons. C’est dans la droite lignée de l’ADN de The Voice. Les candidats sont donc partis à la rencontre du public qui les a aimés, supporter et encourager. Nous avons fait une tournée événementielle cette année encore, avec une augmentation considérable du nombre de billets. Les huit derniers candidats finalistes de la compétition ont ainsi repris leurs meilleurs titres interprétés sur TF1.

Quand sera diffusée la version ‘Kids’ de The Voice sur TF1 ?

TF1 décidera de la date de diffusion. Nous avons déjà mis en boîte certaines émissions. Les tournages se sont très bien passés. Garou, Jenifer et Louis Bertignac sont jurés dans cette version enfant que TF1 proposera quand elle le souhaitera.

Les primes seront-ils en direct comme pour la version adulte ?

Tout ce que je peux vous dire c’est que l’intégralité de l’émission n’a pas encore été mise en boîte à l’heure actuelle.

Autre format phare de Shine en France, Masterchef. L’édition 2013 est en baisse sur tous les critères. Comment analysez-vous cette érosion ?

Shine est satisfaite de cette saison. Le contexte concurrentiel de cette édition était difficile. La case du vendredi soir est compliquée avec des programmes bien installés sur les chaînes concurrentes. La comparaison entre Masterchef et les autres programmes diffusés dans cette case montrent que les performances de notre concours sur les cibles commerciales sont meilleures. Nous réfléchissons avec TF1 aux améliorations à apporter pour la prochaine saison. Nous avons de vrais aménagements en projets qui promettent de belles surprises.

« Nous voulons être différents et innovants »

Malgré son succès, la version australienne est maintenant diffusée en quotidienne tandis que les Pays-Bas y réfléchissent sérieusement, afin de pérenniser la marque. Cette alternative a-t-elle été envisagée par Shine et TF1 ?

En Australie, il s’agit d’une quotidienne de prime, avec des épisodes de 30 à 45 minutes, 6 jours sur 7, pendant 12 semaines. C’est un processus de programmation qui n’existe pas en France. Shine tient beaucoup à la diffusion de ce format en prime time. Maintenant, nous discuterons avec TF1 des modalités de diffusion, mais elle demeure une émission qui doit être diffusée en première partie de soirée.

Dans la même catégorie, Shine travaille actuellement sur l’adaptation de « The Winner is…  » avec Benjamin Castaldi, pour TF1. C’est un format qui n’a pas fonctionné à l’international. Shine prendrait-elle des risques ?

Quand nous mettons aujourd’hui un programme à l’antenne, on prend toujours des risques, qu’il ait fonctionné ou non à l’étranger. Nous n’oublierons jamais la première conférence de presse avant le lancement de The Voice où on nous expliquait l’échec programmé de cette émission et la fin des télé-crochets. Il y a toujours un danger dans l’adaptation d’un format. The Winner is fonctionne très bien au Moyen Orient où elle est produite par Sony, et des discussions seraient en cours pour son retour en Allemagne. Elle a réalisé également un belle première saison en Italie, avec des audiences supérieures à The Voice (The Voice est diffusée sur une chaîne secondaire en Italie, RAI 2, tandis que The Winner is a été programmé sur la chaîne privée leader Canal 5, ndlr).

Qu’est-il advenu de votre projet de talk, La fourmilière, adapté d’un format espagnol à succès ?

Le programme ne sera finalement pas diffusé en France. On n’a trouvé ni la bonne alchimie, ni la bonne chaîne. De plus, nous pensons qu’aujourd’hui, il y a suffisamment de talk show à l’antenne. Nous voulons être différents et innovants et ce marché est particulièrement encombré.