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Céline Nallet, DG de HD1 : « J’adorerais pouvoir faire Game Of Thrones mais c’est impossible »

Robin Girard-Kromas
Publié le 22/05/2013 à 17:22 Mis à jour le 25/06/2013 à 11:19

Robin Girard-Kromas : Cinq mois après le lancement, quel bilan dressez-vous sur HD1 aujourd’hui ?

Céline Nallet : Nous sommes très contents. On est leader des six nouvelles chaînes HD avec 0.6% de part de marché en avril, mais aussi devant sur les principales cibles. On a connu une progression record en doublant quasiment notre audience entre décembre et avril. Le public découvre la chaine et il y reste. Nous détenons aussi le record des nouvelles chaînes avec le film Gladiator. Et enfin, sur l’étude de CSA sur la notoriété de la TNT HD, nous terminons encore premiers. Tous les indicateurs sont au vert !

Cette hausse d’audience ne s’est-elle pas accompagnée d’ambitions à la baisse ? Vous annonciez 80% d’inédit entre 18h et 23h au lancement, un pourcentage aujourd’hui tombé à moins de 10%...

On a ajusté notre grille, ce qui est normal quand on lance une chaine. Nous avions fait le pari au lancement de programmes courts inconnus et d’une sitcom inédite. Mais nous nous sommes rendu compte que ces fictions inédites n’étaient pas repérées comme la chaine n’avait pas de notoriété. Le public ne venait pas. Donc nous avons fait le choix de partir sur des marques plus identifiées. Après, on a toujours beaucoup d’ « inédit TNT » sur HD1 avec une offre très complémentaire et nouvelle par rapport aux autres chaines TNT.

Code Barge, Fritkot, Pour le meilleur et pour le pire : HD1 abandonne-t-elle l’humour ?

Non, je pense toujours que la comédie peut fonctionner. Dans ce cas précis, c’était de la sitcom, un format américain peu développé en France. Nous aimerions d’ailleurs faire de la création sur ce type de fiction à terme. Après, nous diffusons aussi des unitaires comédies le vendredi qui fonctionnent plutôt bien. Donc l’humour peut attirer. Mais quand on construit l’audience d’une chaîne, il faut d’abord la faire connaître des téléspectateurs avant que les nouveautés arrivent.

De 17 heures à 21 heures, vous redémarrez déjà l’intégrale de Brothers & Sisters...

La série a très bien marché et depuis son lancement la chaîne est montée en initialisation. Ce n’est pas parce qu’on est arrivé le 12 décembre que tout le monde nous a découvert à ce moment-là. D’ailleurs, sur le début de cette nouvelle intégrale, nous réalisons des audiences supérieures à la première salve. Nous permettons à un nouveau public de découvrir la série.

« Tous les indicateurs sont au vert ! »

Comment justifiez-vous l’arrivée de la télé-réalité sur la chaîne avec Les Maçons du coeur ou Premier Amour ?

Les maçons du cœur, ce n’est pas de la télé-réalité, mais du docu-réalité. Nous avons toujours dit que nous souhaitons trouver d’autres types de programmes qui racontent des histoires. Les maçons, c’est un moyen de tester les nouvelles écritures. Quant à Premier amour, c’est plus de l’ordre du magazine.

Les meilleures audiences de HD1 sont réalisées avec des fictions estampillées TF1 ou des films. Comment HD1 peut-elle être identifiée par les téléspectateurs avec ce genre de programmes ?

Sur la TNT, on a déjà une vraie identité, car on propose énormément d’ « inédit TNT ». Julie Lescaut et RIS sont des fictions qui ne sont passées sur aucune autre chaine que TF1. Niveau long métrage, nous avons diffusé plus de films inédits en clair que n’importe quelle autre chaîne en prime, même France 2. Nous effectuons une sélection de films que l’on a peu vus ailleurs.

Partie 2 > Quel avenir pour Clap et les shortcoms


Vous déclariez récemment « ne pas vous intéresser aux mêmes séries » que NT1 et TMC. Pourtant, vous diffusez désormais Downton Abbey. Comment l’expliquez-vous ?

L’offre de programmes doit être variée et riche. Downton Abbey est un peu l’exception qui confirme la règle. C’est une perle, une magnifique série européenne, qui a eu de nombreux prix. On trouvait dommage de ne pas proposer aux téléspectateurs de la revoir même si elle est déjà passée sur TMC. Mais cela ne change pas le fait qu’en règle général, on ne va pas sur les séries de TMC et NT1.

Etes-vous satisfaite de votre magazine sur le cinéma, Clap ?

Je suis contente du résultat, il y a un vrai ton, il traite bien de l’actu. Le problème, c’est que c’est un peu court donc dur à identifier pour les téléspectateurs. On aimerait bien que les audiences progressent un peu, on est en phase de tuning et d’aménagement. On a pas encore tranché sur le format qu’on aurait à la rentrée.

Prévoyez-vous l’arrivée prochaine d’un autre magazine ?

Ce n’est pas à l’ordre du jour. Nous préférons concentrer nos investissements sur la fiction qui est au cœur de notre ligne éditoriale.

Vous avez privilégié pour l’heure le format des shortcoms. Pour quelle raison ?

Nous lançons notre première création originale, Ma Meuf, une série courte tendre et décalée le 10 juin prochain. La shortcom nous permet d’aller assez vite dans la création, de tester des choses, d’avoir une vraie originalité dans le fond et la forme. Nous en avons une seconde en préparation qui sera diffusée à la rentrée.

« Nous allons programmer Ma Meuf tous les jours avant le prime time »

Comme avec Clap, ne craigniez-vous pas que le public ne repère pas ces formats courts ?

Nous allons programmer Ma Meuf tous les jours avant le prime time ainsi qu’une salve de rediffusions le week end pour permettre au public de le revoir. Il ne s’agit pas d’un enjeu d’audience, mais plutôt d’un enjeu identitaire. Nous voulons montrer que nous pouvons proposer quelque chose de différent et exister dans le domaine de la création.

Vous déprogrammez Parenthood après plusieurs soirées aux audiences catastrophiques. Les séries inédites en prime time, est-ce un pari impossible ?

Avec Parenthood, on a fait un test. C’est un soap familial, c’était donc très gonflé de le proposer en prime time. On a voulu essayer, car la série est de bonne facture. Le public n’est pas venu, ça reste une très bonne fiction donc nous la programmerons ailleurs. Selon moi, il est faux de dire que les séries ne marchent pas. Cependant, il faut trouver des titres avec un peu de notoriété pour faire venir le public. Et ce genre de fictions sont souvent sur les chaînes historiques. Mais nous avons toujours dans les cartons Eli Stone, un « AllyMcBeal au masculin », donc nous n’abandonnons pas le genre.

Avez-vous déjà prévu une programmation spéciale pour votre grille estivale ?

Non, nous ne faisons pas de programmations spéciales comme vous avez pu le voir avec les vacances scolaires ou les jours féries. Il n’y a donc pas de raison pour que l’on bouleverse la grille pendant l’été. Cela dit, elle n’est pas encore finalisée.

Partie 3 > Quelle évolution pour HD1 ?


Que prévoyez-vous pour continuer à évoluer dans le bon sens la saison prochaine ?

Le prochain gros chantier, c‘est le feuilleton quotidien. On veut pouvoir le proposer dès que la chaîne aura une audience quasi nationale, fin 2014. On a déjà commencé à travailler dessus, car le processus est extrêmement long. Sinon, on s’intéresse à d’autres format, du type de la sitcom 26 minutes ou éventuellement de la scripted reality. Ce sont plutôt des projets 2014. Nous n’avons pas encore lancé de développement spécifique à ce sujet.

Pourquoi ne pas avoir repris le développement du feuilleton abandonné par TF1 il y a quelques mois ?

On a regardé ce qui avait été fait pour TF1. Mais c’était un feuilleton très généraliste, rassemblant toute la famille. De notre côté, on cherche quelque chose d’un peu différent, on part dans d’autres directions. On a pas complètement arrêté quel type de feuilleton on voulait, mais ce ne sont pas les mêmes enjeux que TF1. Il va falloir trouver une idée pour faire venir le public sur le canal 20 de la TNT. On réfléchit donc beaucoup sur le concept.

Ne souhaitez-vous pas investir sur des programmes de prime time ?

Non. On part plutôt sur le principe qu’on a peu d’argent à investir donc on veut s’en servir pour des programmes réguliers et quotidiens. Cela impose des formats assez courts. Pour investir en prime time, quand on voit la qualité de ce qui est proposé en fiction dans le genre, c’est difficile de rivaliser.

« Le prochain gros chantier, c‘est le feuilleton quotidien »

Quel regard portez-vous sur la fiction française alors qu’elle a beaucoup de mal à fonctionner chaque lundi sur TF1, comme l’a récemment montré Vive la Colo ?

Je ne peux pas parler de la fiction de TF1, mais je ne pense pas qu’il y ait de problème de créativité. La concurrence est très dure et la comédie est un format très compliqué. Aujourd’hui, certaines fictions continuent à bien marcher. C’est un phénomène naturel de renouvellement de la création.

Avec la démultiplication des chaînes, ne souhaitez-vous pas proposer une fiction plus ciblée ?

On peut aller dans des programmes un peu plus ciblés, mais on reste une chaîne en clair qui peut-être vu par tous les publics. On ne peut pas faire de la création comme de la payTV. J’adorerais pouvoir faire Game Of Thrones, mais c’est impossible en prime sur une chaîne en clair. Tous les publics doivent pouvoir nous regarder.

Selon Les Echos, HD1 est largement leader en ce qui concerne les investissements publicitaires. Quand pensez-vous atteindre l’équilibre ?

On est très contents du travail de la régie, on est très loin devant les autres chaînes. Par rapport aux prévisions, le marché est plus bas qu’annoncé donc nous avons les mêmes tendances baissières que l’ensemble des acteurs du secteur. On vise l’équilibre le plus tôt possible, malheureusement on n’a aucune visibilité sur le marché publicitaire donc on ne peut pas fixer une échéance ou une date actuellement.