Toutelatele

Leslie Caron revient sur son rôle dans New York Unité Spéciale

Tony Cotte
Publié le 20/02/2008 à 13:41 Mis à jour le 31/03/2011 à 17:57

C’est avec un grand honneur que Toutelatele.com se rend au bar de l’hôtel Vendôme à Paris. Sur place, Leslie Caron accorde quelques interviews à des journalistes privilégiés. Difficile de ne pas être impressionné assis à côté de celle qui a dansé aux côtés de Gene Kelly et donné la réplique à Maurice Chevalier ou encore Warren Beatty. Mais réduire Leslie Caron à une liste de collaborations prestigieuses ne serait que blasphématoire. L’actrice française, pourtant considérée comme américaine auprès du public francophone, reste un grand nom du 7e Art. Celle qui a triomphé en tant que Gigi à la fin des années 50 est revenue devant les caméras, à titre exceptionnel, en 2006 dans la série New York Unité Spéciale le temps d’un épisode. Rencontre avec une grande comédienne beaucoup trop rare sur les écrans...

Tony Cotte : Vos dernières apparitions sont très espacées dans le temps. Pourquoi une actrice aussi rare sur les écrans accepte de faire une apparition dans New York Unité Spéciale ?

Leslie Caron : On m’a proposé un joli rôle dramatique très bien structuré. J’admire la qualité de New York Unité Spéciale. Je ne rate jamais un épisode, c’est un bonheur que de suivre une série aussi bien construite.

Tony Cotte : Aujourd’hui éloignée de Hollywood, vous avez ouvert une auberge dans un cadre tranquille à Villeneuve-sur-Yonne. Une série policière ne semble-t-il pas aux antipodes de votre mode de vie ?

Leslie Caron : On a tous des intérêts différents dans la vie. J’ai d’abord été danseuse, j’aime aussi jouer la comédie et peindre. Chez moi, il y a comme un architecte manqué. Ce qui m’a intéressé dans cette histoire d’auberge, c’était de sauver des vieilles ruines adorables au bord de la rivière. Si je n’en avais pas fait l’acquisition pour les rénover, ce serait devenu un parking. Là, je peux recevoir beaucoup de monde sans me sentir coupable d’être égoïste et de dépenser de l’argent. C’est un service payant avec lequel je donne du travail entre 8 à 12 employés tous les jours de l’année. Je suis très fière d’être une petite femme d’affaires qui fait tourner la machine (rires).

Tony Cotte : Cette ambiance est à mille lieues des plateaux de tournage que vous avez souvent fréquentés. La transition a-t-elle été évidente ?

Leslie Caron : J’ai jamais été la star blonde oxygénée au volant d’une Rolls-Royce avec un petit chien (rires). Ce n’est pas comme ça que j’ai vécu. Et comme les Français ne me faisaient pas vraiment de propositions intéressantes en tant qu’actrice, je me suis lancée dans cette aventure et je suis contente de l’avoir fait.

Tony Cotte : Votre nomination aux Emmy Awards (l’interview a été réalisée avant la cérémonie, ndlr) vous encourage-t-elle à continuer de faire des apparitions pour la télévision ?

Leslie Caron : La comédie me passionne. J’aime l’ambiance des studios et avoir des projets. Je ne suis pas quelqu’un qui pense à se retirer... J’attends que Neal (Bear, showrunner de New York Unité Spéciale, ndlr) me fasse d’autres propositions. Il m’a dit qu’il avait quelque chose pour moi dans un futur proche...

Tony Cotte : Seriez-vous prête à faire des apparitions dans d’autres séries télévisées actuellement à l’écran ?

Leslie Caron : Je suis prête à écouter toutes les propositions. J’adore Urgences, la franchise Law & Order et j’aime beaucoup les Experts. C’est parfait quand on est fatigué le soir, il n’y a pas d’émotions. C’est technique, divertissant et toujours satisfaisant de savoir que les assassins sont attrapés. C’est comme être en Suisse, on est rassuré (rires).


Tony Cotte : Quel regard portez-vous sur les séries télévisées d’aujourd’hui ?

Leslie Caron : Elles se sont considérablement améliorées techniquement. La photographie est remarquable ainsi que le jeu des acteurs. Le seul danger est que l’on devienne trop expert. Les showrunner sont tellement habiles qu’ils peuvent presque faire ça les yeux fermés. C’est pour cette raison que les guest stars sont indispensables, nous ne sommes pas habituées aux fictions télévisées.

Tony Cotte : Certains disent qu’elles surpassent le cinéma aujourd’hui. Partagez-vous ce point de vue ?

Leslie Caron : Pas du tout ! Le cinéma contemporain est absolument fabuleux. Les acteurs jouent de mieux en mieux, car la technique les aide. A mes débuts, le son était très primaire et il fallait projeter comme si nous étions sur scène. La pellicule est beaucoup plus sensible aujourd’hui, on peut bouger plus vite et surtout il n’y a plus la censure...

Tony Cotte : Une allusion au code Hays ?

Leslie Caron : Absolument. Si vous saviez les règles qu’il y avait, c’était vraiment ridicule ! Par exemple, un mari et une femme ne pouvaient pas être au lit ensemble sauf si l’un des deux avait un pied par terre. Toutes ces règles ont fait beaucoup de mal au cinéma des années 50 et 60.

Tony Cotte : Comme la débauche fait également du mal au cinéma actuel...

Leslie Caron : Il y a surtout des défauts de violence et de voyeurisme. On montre beaucoup trop d’éléments sexuels aujourd’hui. Regarder des individus se lécher, ce n’est pas tellement... (elle marque un temps d’arrêt) Comme disait Truffaut : « Je préfère la suggestion ».

Tony Cotte : Vous avez joué aux côtés des plus grands acteurs du 7e art (Gene Kelly / Cary Grant / Warren Beatty...). Qui sont, selon vous, les futurs grands parmi la jeune génération ?

Leslie Caron : Il n’y a pas de futurs Gene Kelly ni de Fred Astaire. Et quant au genre de Cary Grant, je doute qu’il puisse réussir aujourd’hui. Ce style suave, distingué et bien habillé n’est pas vraiment à la mode pour un homme. Les femmes, elles, ne sont pas aussi soignées qu’autrefois, l’élégance n’est plus de mise. C’est le regret que j’ai par rapport à l’époque moderne. Et puis on ne se rend jamais compte que quelqu’un est très grand sur le moment, c’est après qu’on le sait...

Tony Cotte : Mais qui, aujourd’hui, pourrait avoir les capacités de l’être ?

Leslie Caron : Romain Duris est un merveilleux acteur. C’est une star. Il a du charisme, mais il y en a plein d’autres qui sont épatants, j’oublie simplement les noms. Les acteurs sont beaucoup plus caméléon maintenant, on peut les voir dans des comédies ou des drames. Ils n’ont plus une image fixe. Ça représente à la fois des avantages comme des inconvénients. Le problème est que souvent on ne les reconnaît pas, ils ne sont pas aussi identifiables que du temps des grands studios d’Hollywood.