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Christian Etchebest (Masterchef) : « Il faut arrêter de faire rêver les gens avec la cuisine ! »

Nastassia Dobremez
Publié le 09/07/2015 à 19:20 Mis à jour le 09/07/2015 à 21:06

La cinquième saison de « MasterChef » a débuté le jeudi 25 juin dernier sur TF1 et sera de retour dès le 30 juillet sur NT1, suite à une déprogrammation faute d’audience. Christian Etchebest fait partie des trois chefs ayant intégré le tout nouveau jury du concours de cuisine. Pour Toutelatele, il se confie sur cette aventure et regrette la vision biaisée que l’on se fait du métier de restaurateur aujourd’hui.

Toutelatele : Comment vous êtes-vous retrouvé à participer à MasterChef ?

Christian Etchebest : J’ai été contacté grâce aux émissions culinaires que j’ai faites sur M6 [Panique en cuisine, Bon et à savoir, La plus belle région de France…]. TF1 a fait un casting pour trouver des chefs selon les critères qu’ils avaient. Un jour, ils m’ont appelé pour savoir si le programme pouvait m’intéresser, j’ai dit oui tout de suite.

Comment s’est déroulée votre collaboration avec les chefs Gilles Goujon et Yannick Delpech ?

Ce sont de super belles rencontres. Nous nous sommes régalés à faire cette émission. On s’est rapprochés naturellement parce que je pense que l’on défend les mêmes valeurs. Et j’ai pu échanger avec eux. On est dans l’amitié et pas du tout dans la compétition.

Les aviez-vous déjà rencontrés auparavant ?

Je connaissais un petit peu Gilles, car nous sommes deux cuisiniers de la même génération. Mais on s’est vraiment découvert grâce à l’émission. On a passé huit semaines ensemble, 24 heures sur 24 !

« Dans MasterChef, j’ai beaucoup aimé faire évoluer les candidats dans un climat de convivialité et de gentillesse »

Qu’aimez-vous tout particulièrement dans le concept de MasterChef  ?

Je pars du principe que la cuisine appartient à tout le monde. J’aime que ce concours soit réservé aux amateurs. En plus, c’est une aventure humaine qui m’a permis de rencontrer d’une part, des gens qui n’ont pas la même profession que moi et d’autre part, des passionnés de gastronomie. J’ai beaucoup aimé faire évoluer les candidats dans un climat de convivialité et de gentillesse. C’est comme cela que je conçois mon métier.

En quoi cette émission est-elle différente des autres programmes culinaires ?

Je ne regarde pas vraiment ce qui se fait d’autre. À l’heure où ces émissions passent, à 20h50, on travaille, on est en plein service. Je ne connaissais même pas MasterChef et son mécanisme, je n’avais jamais vu un numéro en entier. Mais en substance, Top Chef met en scène des professionnels. Le niveau est supérieur. Alors que, pour moi, la cuisine ce n’est pas ça. C’est populaire, c’est l’art du partage. Je travaille dans la bistronomie, un domaine où tout n’est pas parfait et où la convivialité et l’amabilité sont les maîtres mots. En fait, MasterChef me ressemble plus que Top Chef.

Les candidats vous ont-ils étonnés ?

Non, il ne faut pas oublier que ce sont des amateurs. On ne peut pas leur demander ce qu’on demanderait à un professionnel. Avec Yannick et Gilles, on a mis quinze ans à apprendre ce métier ! Les candidats savent faire la cuisine, mais ils n’ont pas de bonnes bases. C’est à nous de les leur enseigner. J’ai l’impression que ces gens-là pensent qu’ils sont super bons parce qu’ils cuisinent chaque semaine pour leurs amis et que ça plaît. Mais il y a tout un apprentissage. On a essayé de leur faire comprendre cela. Mais leur évolution a été très intéressante tout au long du programme.

« MasterChef me ressemble plus que Top Chef »

Est-ce plus difficile de se lancer dans la cuisine aujourd’hui ?

Oui, on paye un peu les années télé. Tout le monde veut devenir cuisinier aujourd’hui, car dans MasterChef ou Top Chef, on montre de belles assiettes avec de jolies lumières. Mais la cuisine ce n’est pas ça ! C’est beaucoup de travail. Avant de faire de belles assiettes, on fait des trucs très difficiles pendant des années. Les gens ne le savent plus. On n’a pas arrêté de répéter aux candidats que monter un restaurant était extrêmement compliqué. Je connais la vraie vie de restaurateur. Je ne suis pas persuadé que les téléspectateurs qui ont vu ces émissions pensent que c’est aussi dur. Il faut être à la fois manager, savoir faire tourner un restaurant, préparer des recettes… On fait tout dans les petites structures ! Il faut arrêter de faire rêver les gens avec la cuisine ! Si j’avais un conseil à donner à ceux qui veulent se lancer dans cette voie, je les inciterais à construire un projet autour de la cuisine ou faire des stages pour comprendre la réalité du métier…

Devez-vous une partie de votre succès aux émissions de télévision que vous avez fait ces dernières années ?

Bien sûr, la télévision m’a aidé, je ne peux pas le nier. Aujourd’hui je suis propriétaire de trois bistrots et j’ai 40 salariés. Mais je me suis installé à Paris en 1998 et je n’ai commencé à faire de la télévision que dix ans après. Donc mon premier restaurant, je l’ai rempli sans cette médiatisation. J’ai coutume de dire que le travail paie toujours.